Eglises d'Asie

A Hô-Chi-Minh-Ville, l’Église va aux périphéries

Publié le 24/11/2018




Attentive aux centaines de milliers de migrants qui affluent vers Saïgon (Ho-Chi-Minh-Ville), la mégalopole du Sud, l’Église vietnamienne y construit avec pragmatisme son avenir territorial.

À une vingtaine de kilomètres du centre de Hô-Chi-Minh-Ville, la mégalopole s’essouffle : les rocades laissent place à des routes défoncées, les hautes tours à des constructions inachevées, les terrains vagues à des plantations maraîchères. On est loin de la propreté soigneusement entretenue du centre ville, à la façon de Singapour. Et pourtant, près de cinq millions de migrants, dits « internes », c’est-à-dire venus des campagnes, viennent investir ces nouvelles zones urbaines, attirés par les nombreux emplois créés par les zones industrielles ceinturant la capitale du Sud. Parmi eux, 6 % sont catholiques, soit 300 000 baptisés qui viennent augmenter d’un tiers la population catholique de Saïgon, déjà proche des 700 000 personnes.

D’où la décision, quasiment industrielle, mise en œuvre par Mgr Joseph Do Manh Hung, administrateur apostolique de l’archidiocèse de Hô-Chi-Minh-Ville, de créer pas moins de 50 stations missionnaires (6 000 catholiques par station, à peu près tous les trois kilomètres). Aujourd’hui, 22 stations ont été créées, dont huit ont reçu des autorités l’autorisation de célébrer la messe dominicale. Parmi ces dernières se trouve la « station » de Vin Loc. Elle se présente comme un hangar couvert de tôle, avec quelques modestes annexes bâchées, le tout comme posé entre deux champs détrempés. Mais on comprend vite que se trouvent là toutes les activités d’une paroisse vietnamienne en ordre de marche : des laïcs engagés, un jeune prêtre entreprenant, des activités sociales et éducatives… Lorsque le P. Joseph Thai a été ordonné, il y a trois ans, ici il n’y avait rien. Aujourd’hui, le curé constate : « Les gens veulent prier, se rassembler. Le gouvernement ne veut pas de constructions, mais peu à peu, nous avançons. Ils nous ont ainsi autorisés à monter une crèche. »

Dans son grand bureau de l’archevêché historique de Saïgon, Mgr Joseph Do Manh Hung offre une vision d’ensemble du projet. Il veille à l‘acquisition des terrains, à maintenir des relations cordiales avec les autorités. Et surtout, il organise le financement de l’opération : pas moins de sept millions de dollars. La générosité des fidèles (de Saïgon comme de la diaspora) s’allie à des prêts sans intérêts, à des legs bienvenus, à des dons reçus lors d’ordinations. « Tout cela pour répondre aux besoins des migrants. C’est notre façon à nous d’aller aux périphéries ! Parce que les migrants sont pauvres, ils devraient faire vingt kilomètres pour aller à la messe ? Lorsque le prêtre arrive pour l’onction des malades, trop souvent, le malade est mort ! » explique Mgr Joseph Do Manh Hung.

En un juste retour de l’Histoire, l’évêque rend hommage aux missionnaires et aux martyrs MEP, dont les tombes qui se trouvent dans l’ancienne chapelle du centre pastoral diocésain, à l’ombre des nouvelles tours d’affaires, témoignent de l’enracinement profond de la foi : « Nous avons reçu, grâce à vous, l’héritage de la foi. Puis vous nous avez aidés à former nos formateurs : 169 prêtres du diocèse sont allés se former aux MEP, à Paris. Parmi eux, on compte seize évêques et deux abbés de monastères. » Mais surtout, attentif aux enjeux partagés de l’avenir, il affirme : « Nous souhaitons collaborer avec l’Église de France pour l’évangélisation. »

(EDA / Frédéric Mounier)

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CRÉDITS

Jean-Marie Dufour