Eglises d'Asie – Bangladesh
Après le Covid-19, la mousson et les inondations frappent les zones rurales bangladaises
Publié le 25/07/2020
Pendant une semaine, Mohammad Syed et sa famille ont dû trouver refuge sur une digue anti-inondation. « Notre maison a été inondée tellement rapidement que nous avons dû fuir immédiatement, en emportant tout ce que nous pouvions. J’ignore ce qui est arrivé à notre maison et à nos affaires », explique Mohammad, 45 ans, musulman, fermier et père de trois enfants. Il vit de son activité agricole, sur un peu moins d’un hectare de terrain, et il se demande comment sa famille va pouvoir survivre après de lourdes pertes, à cause des inondations provoquées par la mousson. « Il y a des inondations presque tous les ans, et nous y sommes habitués. Mais cette année, la situation est vraiment catastrophique. En plus des maisons détruites, les cultures ont été ravagées », s’inquiète-t-il. Mohammad Syed avait investi environ 50 000 takas (510 euros), qu’il avait empruntés à une ONG locale, afin de pouvoir planter du riz paddy et des légumes sur son terrain, dans la région de Sariakandi, dans le district de Bogra, dans le nord du Bangladesh. Tout a été inondé. « À cause du Covid-19, j’ai dû dépenser davantage à cause de la montée des prix des graines, des engrais et de la main-d’œuvre. Je ne sais pas comment je vais pouvoir rembourser mon emprunt et compenser les pertes. » Thakur Chondro Barmon, 35 ans, un mécanicien et ouvrier agricole de la région de Taraganj, dans le district de Rangpur, est lui aussi en difficulté. Ce père hindou de deux enfants a non seulement perdu sa maison dans les inondations, mais aussi près d’un demi-hectare de riz. « À cause de la pandémie, les revenus de mon garage ont fortement chuté. J’ai dépensé 20 000 takas afin de planter du riz, mais tout a été détruit. Je suis vraiment angoissé pour ma famille », confie-t-il, en songeant aussi à son fils et à sa famille qui ont de la fièvre. « Les cultures sont détruites et je n’ai plus de revenus. Nous ne survivons que grâce à ce que gagne ma femme avec son travail de couturière. »
578 équipes médicales envoyées sur le terrain
Plusieurs millions d’autres personnes comme Mohammad Syed et Thakur Barmon subissent les conséquences des inondations qui frappent actuellement le Bangladesh, l’Inde et le Népal. Plusieurs dizaines de personnes ont déjà succombé dans ce qui est considéré comme l’un des pires épisodes de mousson en plusieurs décennies. Les autorités bangladaises estiment qu’environ trois millions de personnes ont été bloquées dans le nord, dans le nord-est et dans les régions centrales du pays. Au moins 67 personnes sont mortes par noyade, ou suite à des morsures de serpent ou à des diarrhées. Près de 5 000 personnes ont également souffert de divers maux comme des diarrhées, des problèmes de peau, des complications respiratoires ou oculaires, explique le Dr Ayesha Aktar, directrice adjointe du Centre national de contrôle et de gestion des crises sanitaires (National Health Crisis Management and Control Center). « La plupart des décès ont été causés par des diarrhées, et si les inondations continuent, la situation risque d’empirer. Des équipes médicales ont été envoyées dans les zones affectées. Ces équipes travaillent dur afin de fournir des pastilles de purification de l’eau, pour assurer que les populations locales puissent avoir accès à de l’eau potable et à des médicaments adaptés », ajoute-t-elle. Afin d’éviter la propagation de diverses maladies véhiculées par l’eau, le gouvernement bangladais a formé 578 équipes médicales envoyées dans toutes les zones affectées, confie le Dr Enamur Rahman, ministre d’État pour la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence. « Nous avons déjà alloué 8 200 tonnes de riz et 28,2 millions de takas [287 342 euros] d’aide financière aux victimes des inondations. Nous distribuerons également d’autres aides dont des repas cuisinés. Nous sommes prêts pour une inondation prolongée et nous avons suffisamment de stocks de nourriture pour aider les personnes dans le besoin », assure-t-il.
Près d’un quart de la population bangladaise exposée
De nombreuses ONG locales et internationales, qui avaient déjà investi beaucoup d’argent dans la lutte contre le Covid-19, se sont retrouvées démunies face aux inondations. « Les groupes humanitaires ont du mal à obtenir des aides financières étrangères, alors que le pays donateurs sont eux aussi en difficulté à cause de la pandémie », souligne Sukleash George Costa, directeur régional de la Caritas de Rajshahi, qui s’est rendu dans une des zones affectées, dans le nord-est, et qui a été témoin de la souffrance des habitants. « Durant la crise sanitaire, les gens ont pu rester chez eux et cuisiner. Mais maintenant, leurs maisons ont été détruites et leurs réserves de nourriture ont disparu. Ils se retrouvent démunis sur les routes et sur les digues, et si la situation se poursuit, ils sont en danger », assure-t-il. « Afin de lutter contre cette nouvelle crise, tous les différents acteurs, y compris le gouvernement et les organisations privées, ont besoin de travailler ensemble », insiste-t-il. Le Bangladesh, situé sur des plaines en basse altitude, aux abords de l’un des plus grands deltas au monde, qui se déverse dans le golfe du bengale, est particulièrement exposé aux catastrophes naturelles comme les cyclones, les inondations et l’érosion fluviale. Les inondations frappent régulièrement la région, entraînant des destructions matérielles considérables. C’est une source majeure d’appauvrissement pour près d’un quart des 160 millions d’habitants du pays.
(Avec Ucanews, Natore)
CRÉDITS
Liton Das / Ucanews