Eglises d'Asie

Baloutchistan : les chrétiens afghans réfugiés trouvent un nouvel espoir au Pakistan

Publié le 24/06/2022




Depuis le retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan, près de 250 000 habitants ont fui au Pakistan voisin et sont aujourd’hui réfugiés dans le pays, dont des chrétiens convertis de l’islam. « D’un côté, notre propre peuple essayait de nous tuer, tandis qu’un pasteur nous aidait avec des rations et de l’argent. J’ai trouvé le Christ comme mon sauveur », explique ainsi Arifa Rahimi, âgée de 24 ans, réfugiée actuellement à Quetta dans la province pakistanaise du Baloutchistan, baptisée en novembre dernier.

Le pasteur Irfan James baptise un réfugié afghan à Quetta (province du Baloutchistan, Pakistan).

Trois jours avant que les Talibans prennent le contrôle de Kaboul, Arifa Rahimi a reçu un appel téléphonique menaçant. « Vous avez été tracée. Nous savons que vous êtes une ‘kafir’ [infidèle] chiite et une journaliste qui publie des choses contre nous », disait la voix à l’autre bout du fil. En septembre 2021, Arifa Rahimi a loué une voiture pour rejoindre la frontière entre Chaman (Pakistan) et Spin Boldak (Afghanistan) avec son frère, accompagnés de leurs quatre neveux, âgés de 8 à 14 ans.

Vêtue d’un « chadori » bleu clair (une « burqa » la couvrant des pieds à la tête), elle a pu entrer sans visa à Quetta dans la province pakistanaise du Baloutchistan. « Chaque passager a dû payer 6 310 afghanis [67 euros], mais le chauffeur a fait payer les billets à moitié prix pour les enfants », explique la jeune afghane, âgée de 24 ans, qui a travaillé comme journaliste à Kaboul pour Farhang Press. Heureusement pour le groupe, la sécurité à la frontière n’était pas encore renforcée dans les premiers jours du retour au pouvoir des Talibans. Et le simple fait d’attendre d’avoir des papiers officiels aurait pu les exposer à une arrestation voir une possible exécution.

« J’ai trouvé le Christ comme mon sauveur »

« Mes parents âgés n’ont pas pu nous rejoindre », explique Arifa, qui partage aujourd’hui une des quatre pièces d’une maison louée avec d’autres familles afghanes à Quetta. Elle a supprimé les appels reçus des Talibans afin d’éviter des problèmes à la frontière pakistanaise, et elle utilise aujourd’hui une carte SIM locale. Mais en tant que réfugiée sans papiers, elle n’a aucun revenu. Son frère, un tailleur, soutient la famille financièrement.

Arifa a été baptisée en novembre dans une petite église protestante de Quetta par un pasteur appelé Irfan James. « J’ai découvert et accepté le Christ en lisant Jean 3,16, dans la Bible [‘Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique’]. D’un côté, notre propre peuple essayait de nous tuer, tandis qu’un pasteur nous aidait avec des rations et de l’argent. J’ai trouvé le Christ comme mon sauveur », explique-t-elle.

Elle fait partie d’une centaine de croyants qui ont reçu une bible de la part du pasteur James, qui est également chargé d’un ministère clandestin à Jalalabad, dans l’est de l’Afghanistan. Il doit laisser pousser sa barbe et laisser au Pakistan les papiers liés à son activité pastorale avant de franchir la frontière, à l’aide de contacts locaux. Ces contacts l’aident aussi à reloger des chrétiens afghans. « Changer son aspect physique est crucial pour la survie », confie le pasteur James via WhatsApp. « Beaucoup de gens ont aussi changé de numéro de téléphone pour éviter les persécutions. Les convertis afghans, avec le personnel de défense et les porte-paroles de l’ancien gouvernement, sont sur la liste principale visée par les Talibans. »

250 000 Afghans ont franchi la frontière depuis le retour des Talibans

Près de 450 familles afghanes, vivant dans un parc d’Islamabad, ont organisé des manifestations durant des mois afin de demander un statut légal, avec beaucoup d’entre elles cherchant une issue vers les pays européens. Pour le pasteur James, au lieu de réprimer les manifestations par la police, le gouvernement pakistanais devrait loger ces réfugiés à titre humanitaire. « Des femmes disparaissent et des familles sont forcées de vendre leurs enfants à cause de la faim et de la crise économique. Les groupes d’Église peuvent également investir dans des petits commerces et des camps médicaux afin d’aider les afghans convertis. »

Depuis le retour des Talibans au pouvoir, l’organisation Christian Solidarity International et deux Églises locales ont soutenu 400 réfugiés afghans à Quetta et Chaman. Ils sont près de 250 000 Afghans à avoir franchi la frontière pour entrer au Pakistan. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), 1,3 million de réfugiés afghans sont enregistrés au Pakistan. En Afghanistan, on compte entre 10 000 et 12 000 chrétiens, tous convertis de l’islam et forcés de vivre leur foi en secret chez eux ou dans d’autres lieux en retrait.

Rahimi reste inquiète pour la sécurité de ses parents qui sont toujours dans son pays d’origine, en particulier après un raid récent mené par les Talibans. « Ils ont fouillé notre maison, ils ont trouvé ma photo, ils ont consulté mes appels depuis le Pakistan et ils ont menacé ma famille. Ils ont été relogés depuis. Mes neveux dépendent de moi. Tout est si cher mais je ne veux pas retourner là-bas. Nous avons besoin d’aide », confie-t-elle.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Pastor Irfan James / Ucanews