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Bornéo : les communautés indigènes de l’État de Sabah s’attellent à la reforestation durant la pandémie

Publié le 08/01/2022




Après la pandémie, quand les communautés indigènes de Sabah (Bornéo) se sont retrouvées sans travail, un groupe a rejoint la coopérative Kopel afin de reboiser la forêt tropicale autour du fleuve de Kinabatangan. « J’ai rejoint l’équipe de reforestation afin d’aider ma famille financièrement », confie Nurul Susanti Nasir. Selon Global Forest Watch, entre 2001 et 2020, la Malaisie a perdu un quart de sa couverture végétale, soit près de 2 millions d’hectares de forêt.

Une entreprise d’exploitation forestière, en 2010 dans une forêt tropicale de l’État de Sabah, à Bornéo.

Le long du fleuve de Kinabatangan, dans la partie malaisienne de l’île de Bornéo, un groupe d’hommes et de femmes a entrepris de reboiser la région. Ils ont d’abord défriché le terrain avec des machettes, puis ils ont planté plusieurs milliers de jeunes arbres qu’ils entretiendront au cours des prochaines années. Le collectif, composé exclusivement de membres des communautés indigènes locales, fait partie de Kopel, une coopérative qui a été fondé à l’origine comme une entreprise de tourisme durable dans quatre villages de la province de Batu Puteh, dans la région de Sabah.

« Quand le travail a cessé [à cause de la pandémie], j’ai rejoint l’équipe de reforestation afin d’aider ma famille financièrement », confie Nurul Susanti Nasir, qui travaillait auparavant comme femme de ménage pour les familles en vacances, interrogée par New Naratif. « J’aime travailler en forêt, c’est enrichissant. » Après plusieurs mois d’interruption à cause des craintes de contagion et par manque de moyens (habituellement générés par le tourisme), le groupe s’est à nouveau mis à planter des arbres pour reboiser la forêt tropicale. La région entourant le fleuve de Kinabatangan, le deuxième fleuve le plus long du pays, jouit d’une riche biodiversité.

Toutefois, la province de Batu Puteh et la région de Sabah sont également couvertes de terrains dédiés à la culture de l’huile de palme : l’huile récoltée dans ces régions représente 6 % de la production mondiale. Selon des chiffres publiés par Global Forest Watch, entre 2001 et 2020, la Malaisie a perdu un quart de sa couverture végétale, ce qui correspond à près de 2 millions d’hectares de forêt, ou 809 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone (ce qu’il faut pour produire environ 103 millions de smartphones).

190 mille hectares perdus le long du fleuve Kinabatangan

Durant la même période, la région autour du fleuve a perdu 28 % de ses arbres, ou 190 000 hectares de forêt tropicale. Par conséquent, la population d’orangs-outans a été réduite de presque un tiers. Le groupe Kopel essaie d’inverser la tendance. Ainsi, en 1995, l’Australien Marti Vogel, fondateur de la coopérative, a travaillé avec la population locale afin qu’elle puisse bénéficier des revenus de l’industrie du tourisme. Il a travaillé avec plusieurs agences qui ont amené des vacanciers à Sabah et Sarawak, tout en remarquant que ce n’étaient jamais les communautés locales qui s’enrichissaient.

En 1999, Kopel a collecté des fonds afin de lancer son premier programme de reforestation. Depuis, 350 hectares de forêts ont été replantés, et des corridors forestiers reliant des régions protégées ont été créés. Avant la pandémie, le groupe a accueilli près de 6 000 visiteurs par an dans le cadre de son programme de tourisme durable. Après le début de la pandémie, les opérations ont été interrompues, l’équipe de 40 membres a été divisée par deux et les fonds se sont raréfiés.

« Avant la pandémie, notre principale activité était le tourisme et la conservation », confie Saidal bin Udin, manager actuel de Kopel. Le programme de reforestation a survécu grâce à des partenariats avec plusieurs organisations de recherche, intéressées par l’expérience de la coopérative sur le terrain. Des chercheurs surveillent la croissance des arbres afin de calculer la séquestration du carbone, mais il s’agit d’une tâche compliquée et difficile, le carbone pouvant être stocké dans les sols et dans les arbres.

Amaziasizamoria Jumail, une chercheuse du centre Danau Girang Field, mesure la taille des arbres et installe des paniers tous les six mois afin de calculer la quantité de feuilles mortes et de bois mort. Elle prélève des échantillons de terre et les envoie à l’université de Cardiff, où ils sont analysés afin de mesurer la séquestration du carbone. « Une forêt en bonne santé est capable de stocker plus de carbone », explique-t-elle. « C’est très important de travailler avec les communautés, parce qu’au final, ce sont elles qui vivent dans ces forêts. Elles connaissent le mieux les espèces qui les composent et le genre de forêt qu’elles veulent. Il s’agit donc avant tout de créer des forêts saines, des espaces adaptés aux animaux et aux habitants. »

(Avec Asianews)