Eglises d'Asie – Chine
Centenaire du PCC : le Parti communiste chinois sort de l’ombre à Hong-Kong
Publié le 13/07/2021
Depuis que Hong-Kong a été rétrocédée à la Chine par les Anglais en 1997, Pékin s’est efforcé d’éviter de rendre le Parti communiste chinois (CCP) trop visible dans une ville où beaucoup de familles avaient fui les pires excès du pouvoir chinois. Pourtant, depuis quelques années, le parti a abandonné cette tradition de travailler dans l’ombre, alors que les autorités poursuivent une répression de plus en plus ouverte contre les critiques en tentant de forcer le centre financier hong-kongais à coller avec l’image autoritaire de Chine continentale. « Le CCP avait plusieurs raisons pour rester dans l’ombre », explique Willy Lam, analyste politique, cité par l’AFP. « Le CCP a été lié à une série de terribles erreurs, y compris la Révolution culturelle et les trois années de famine, entre autres. » Le soutien discret de Pékin à des émeutes menées par des militants communistes en 1967, qui ont fait près de cinquante morts, et la répression sanglante de la place Tiananmen en 1989 par les autorités chinoises, ont également laissé beaucoup de méfiance envers le parti parmi la population hong-kongaise.
Le parti mis en avant à l’occasion du 100e anniversaire de sa fondation
Avant la rétrocession de la ville à Pékin, l’ancien dirigeant chinois Deng Xiaoping – considéré comme le créateur de la politique « un pays, deux systèmes », qui devait permettre à Hong-Kong de conserver ses libertés et son autonomie –, s’était efforcé de calmer les tensions en assurant aux Hong-Kongais qu’ils n’avaient pas besoin d’aimer le parti pour être considérés comme des patriotes. « Nous ne demandons pas qu’ils soient favorables au système socialiste chinois ; nous leur demandons juste d’aimer Hong-Kong et leur patrie », avait-il déclaré. Avec près de 90 millions de membres, le parti est omniprésent en Chine continentale, mais il a toujours été pratiquement invisible à Hong-Kong. Le parti lui-même n’a jamais été enregistré comme une institution officielle, et les principaux dirigeants de la ville ont toujours nié en être membres – en tout cas en tant qu’élus. Mais le CCP est devenu de plus en plus visible ces dernières années, en particulier à l’approche des festivités du centenaire de sa fondation. Les drapeaux rouges aux couleurs du parti ont été affichés un peu partout à travers la ville ces dernières semaines, aux côtés d’immenses panneaux annonçant l’anniversaire.
Le gouvernement local a également organisé une exposition intitulée « Cent années de prospérité et de grandeur », tandis que quatre agences du gouvernement de Pékin ont organisé une conférence avec divers discours à la gloire du parti. C’est la première fois que de tels événements ont lieu à Hong-Kong, et c’est une preuve de plus que la définition du patriotisme annoncée par Deng Xiaoping a bien changé sous le règne du président Xi Jinping. « Sauvegarder l’autorité du CCP, c’est protéger la politique ‘un pays, deux systèmes’ », a assuré Luo Huining, directeur du Bureau de liaison de Pékin à Hong-Kong, lors d’un discours donné durant la conférence. « Ceux qui protestent et qui demandent la fin du parti unique sont les vrais ennemis de la prospérité et de la stabilité à Hong-Kong », a-t-il ajouté. Cette visibilité accrue du parti survient alors que les autorités appliquent une nouvelle répression politique en réponse au mouvement pro-démocratie hong-kongais lancé il y a deux ans. Pékin a imposé une nouvelle loi sur la sécurité nationale à Hong-Kong pénalisant toute dissidence, tout en lançant une campagne intitulée « les patriotes dirigent Hong-Kong » afin de faire pression sur les opinions politiques de la population.
Les mesures sanitaires utilisées contre les manifestants prodémocratie
Depuis le début de la crise sanitaire, les mesures anti-Covid ont également été employées contre le mouvement en interdisant tout rassemblement public. Par ailleurs, la plupart des leaders du mouvement ont été arrêtés dans le cadre de la nouvelle loi ou ont fui à l’étranger. « Pékin emploie une méthode de gouvernance plus directe à Hong-Kong », commente Johnny Lau, journaliste et analyste politique, cité par l’AFP. « Les représentants du gouvernement central n’hésitent plus à s’imposer et à montrer leur présence et leur autorité. Avec la nouvelle loi et la campagne ‘les patriotes dirigent Hong-Kong’, les autorités disent implicitement qu’aujourd’hui, les Hong-Kongais doivent aimer la Chine et le parti », ajoute-t-il. Les habitants proches du pouvoir soutiennent cette tendance. Dans une interview publiée le 7 juillet par le site chinois ultranationaliste Guancha.cn, Lau Sia-kai, ancien conseiller en chef de la CPU (Central policy unit) à Hong-Kong, souligne que le CCP était autrefois considéré comme un « sujet sensible » dans la ville.
C’est pourquoi ses activités n’étaient pas organisées publiquement. Il ajoute que cette approche est aujourd’hui « démodée », parce que selon lui, les manifestants prodémocratie ont tenté de faire de Hong-Kong « une base d’infiltration pouvant être utilisée par des forces d’opposition pour remettre en question l’influence du parti ». Une fois l’opposition prodémocratie hong-kongaise « vaincue », poursuit-il, « le parti pouvait prendre le pouvoir et revenir sur le devant de la scène ». Les autorités hong-kongaises ont soutenu cette idée. Après l’application des nouvelles lois, demandant à tous les fonctionnaires et dirigeants de prêter des serments de loyauté, Erick Tsang, secrétaire des Affaires constitutionnelles et continentales, a déclaré qu’il ne pouvait plus y avoir d’ambiguïté. « Vous ne pouvez pas dire que vous êtes patriotique mais que vous n’aimez pas l’autorité du Parti communiste chinois ou que vous ne la respectez pas, cela n’a aucun sens », a-t-il confirmé.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
pxfuel.com / CCO