Eglises d'Asie

Chiang Mai : le nord de la Thaïlande affecté par la pollution atmosphérique

Publié le 24/04/2019




Autrefois connue pour son ambiance alpine et son air frais, la ville de Chiang Mai, dans le nord de la Thaïlande, est frappée chaque année par un épais brouillard qui s’installe durant plusieurs mois. Chaque année, durant la saison sèche qui peut durer jusqu’en mai, les fermiers locaux brûlent de larges bandes de terre en vue des futures récoltes, sans compter la combustion des déchets et les feux sauvages. Ainsi, le niveau de particules fines était particulièrement élevé le mois dernier, avec une concentration jusqu’à 532 µg/m3, soit cinq fois plus que le seuil fixé par l’OMS.

Dans un village éloigné des montagnes du district de Mae Taeng, dans la province de Chiang Mai dans le nord de la Thaïlande, l’air était autrefois pur et clair est devenu pollué par un épais brouillard, qui vient parfois s’étendre sur les villages Karens. Les villageois, dont la plupart survivent de l’agriculture, sont frappés par cette catastrophe environnementale. « Souvent, il y a tellement de ‘smog’ [brouillard de pollution] que je peux à peine respirer », confie Yupin Moosooloi, une jeune Karen de 24 ans qui travaille dans une école locale. Pourtant, leur situation reste meilleure que celle des habitants de la ville historique de Chiang Mai, où la toxicité de l’air a empiré. « Au moins, dans les montagnes, on peut encore voir les arbres au loin. En ville, le brouillard est bien plus épais. On n’y voit presque rien, le ‘smog’ recouvre tout », explique-t-elle. Autrefois connue pour son ambiance alpine et son air frais, la ville de Chiang Mai subit chaque année cette situation, quand un épais brouillard s’installe durant plusieurs mois. Chaque année, durant la saison sèche, les fermiers locaux brûlent des bandes de terres pour se débarrasser de la végétation desséchée en vue des nouvelles récoltes. Une pratique qui expose la région aux feux de forêt et qui entraîne une brume saisonnière depuis des années. Cette année, en revanche, ce « smog » a été particulièrement épais. La qualité de l’air en ville et dans les environs a largement dépassé les niveaux recommandés par l’OMS. L’air toxique irrite les yeux, la gorge et les poumons. Certains villageois essaient de se protéger en couvrant leur nez et leur bouche, mais c’est une protection médiocre. « Dans les montagnes, on ne peut pas faire grand-chose pour se protéger. Le brouillard survient tous les ans, mais cette année c’est particulièrement handicapant. En ville, beaucoup d’habitants mettent des masques et ils sont équipés de purificateurs d’air, mais dans mon village, nous n’avons pas les moyens pour cela », ajoute Yupin Moosooloi.

Un niveau de particules fines particulièrement élevé

Beaucoup de villageois ne sont pas conscients des risques que cette situation représente pour leur santé. Ainsi, nombre d’entre eux ne réalisent pas l’importance de se protéger contre la pollution de l’air. Pourtant, le mois dernier, la concentration de particules fines s’est élevée à 532 µg/m3, soit cinq fois plus que les seuils fixés par les experts. C’est le niveau le plus élevé enregistré dans le monde, encore plus que dans les villes les plus polluées de l’Inde. L’exposition prolongée à une telle pollution atmosphérique peut entraîner de graves problèmes de santé, comme des maladies pulmonaires ou des troubles cardiaques. « Dans mon village, les plus touchés sont les enfants », explique Yupin. Plusieurs d’entre eux souffrent de toux chroniques et de fièvres. « Certains ont même commencé à cracher du sang », ajoute-t-elle. Le système de soins reste rudimentaire dans son village, où les autochtones se reposent souvent sur les méthodes de guérison traditionnelles, en plus des visites occasionnelles auprès des médecins qualifiés. Malheureusement, la population locale est en partie responsable de cette situation. « Le smog est en partie provoqué par les feux sauvages », assure Yupin. « Certains fermiers jettent des bouts de cigarette derrière eux quand ils vont nourrir les bêtes, et la végétation prend feu. » Quand cela arrive, les villageois ne peuvent pas faire grand-chose à part attendre que le feu s’éteigne tout seul ou qu’une pluie s’en charge. « Les membres du gouvernement affectés dans la région sont en sous-effectif », poursuit Yupin. « Quand un incendie survient, ils demandent aux villageois de les aider à l’éteindre. Chez moi, il n’y a pas encore eu d’incendie, mais c’est arrivé dans d’autres villages. » Pour empirer les choses, les villageois ont l’habitude de brûler tous leurs déchets, ce qui peut entraîner d’épaisses fumées toxiques. Quand cette pratique est répétée à grande échelle, l’impact sur l’environnement est considérable.

Cette année, la qualité de l’air a empiré non seulement à Chiang Mai, mais aussi dans d’autres provinces du nord du pays. La pollution affecte la population locale, mais elle fait également fuir les touristes, ce qui entraîne des pertes financières pour la région, où le niveau de vie reste largement inférieur à Bangkok. Malgré le lancement d’une alerte nationale sur la pollution de l’air dans le nord de la Thaïlande, le gouvernement s’est peu préoccupé de la situation. Lors d’une visite récente dans la région, le Premier ministre Prayut Chan-o-cha s’est engagé à résoudre le problème rapidement. Mais le gouvernement n’a pas fait grand-chose à part installer des canons qui vaporisent de l’eau afin d’aider à dissiper la brume, mais dont les effets sont limités. Selon les experts, il faut trouver une solution à long terme. Certains appellent les autorités à mettre en garde les fermiers locaux. « Le gouvernement doit trouver un moyen de dissuader les fermiers de brûler les déchets et la végétation », estime le Dr Rangsrit Kanjanavanit, un cardiologue qui enseigne à la faculté de médecine de l’université de Chiang Mai. De leur côté, les villageois espèrent que le brouillard se dissipe rapidement avec le retour des pluies régulières, d’ici quelques mois.

(Avec Ucanews, Chiang Mai)


CRÉDITS

Tibor Krausz / Ucanews