Eglises d'Asie

En pleine crise, le cardinal Ranjith juge le 75e anniversaire de l’indépendance trop fastueux

Publié le 07/02/2023




Ce samedi 4 février, le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo, a pris la parole à l’occasion des célébrations du 75e anniversaire de l’indépendance du Sri Lanka en regrettant que les dirigeants politiques n’aient pas pu trouver de solution concrète à la grave crise économique qui frappe le pays depuis plusieurs mois. « Un gouvernement qui n’a pas d’argent pour faire venir des médicaments dépense 200 millions de roupies [plus de 500 000 euros] pour célébrer l’indépendance avec une grande fierté », a-t-il dénoncé.

Le 4 février à Colombo lors d’une manifestation silencieuse organisée par la Conférence des supérieurs majeurs du Sri Lanka (CMRS).

Le 4 février, les célébrations du 75e anniversaire de l’indépendance du Sri Lanka (les premières depuis que le nouveau président Ranil Wickremesinghe est arrivé au pouvoir) ont eu lieu au parc de Galle Face Green, à Colombo. À cette occasion, l’Église locale s’est cependant montrée sceptique en critiquant les coûts jugés exorbitants de la cérémonie, et la police a réprimé brutalement des manifestations organisées par des militants.

« Le 75e anniversaire de notre indépendance face au régime colonial britannique survient à une époque critique et éprouvante pour notre pays », a reconnu le président Wickremesinghe dans son message adressé à la population.

« C’est un moment décisif. Mais il représente pour nous une opportunité d’évaluer nos forces et nos réussites en tant que nation, mais aussi de corriger nos erreurs et nos échecs. » Le Sri Lanka continue de subir sa pire crise économique depuis son indépendance, alors que le taux de change contre le dollar américain a chuté de 182 à 360 roupies.

« Le pays est en train de basculer dans la misère »

De son côté, le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo, est allé jusqu’à déclarer dans un communiqué que l’Église catholique locale et la population sri-lankaise « sont devenus prisonnières de la pauvreté et d’une dictature brutale ». « Les dirigeants n’ont pas su trouver de solutions concrètes à la crise. Un gouvernement qui n’a pas d’argent pour faire venir des médicaments dépense 200 millions de roupies [plus de 500 000 euros] pour célébrer l’indépendance avec une grande fierté », a-t-il dénoncé.

« Nous devons réfléchir à la façon dont le pays est en train de basculer dans la misère, à cause de l’égoïsme et de la soif de pouvoir des responsables politiques qui ont dirigé notre pays depuis 75 ans », a-t-il poursuivi.

La Conférence des supérieurs majeurs du Sri Lanka (CMRS) a également organisé une manifestation silencieuse samedi matin devant le Centre pour la société et la religion (CSR) à Colombo, où des membres ont déployé une bannière demandant « Où est la liberté ? La liberté n’appartient pas aux responsables politiques mais aux citoyens ». Le père Rohan De Silva, directeur du CSR, explique s’opposer à la cérémonie du 75e anniversaire de l’indépendance, « qui a coûté 200 millions de roupies » alors que tout a été « pillé » et « détruit ».

Une manifestation pacifique réprimée à Colombo

Par ailleurs, le soir du 3 février, la police sri-lankaise et une unité antiémeute se sont attaquées à des manifestants qui protestaient pacifiquement selon les principes de la satyagraha, la méthode de résistance non-violente et de désobéissance civile instaurée par Gandhi. « Devant le Théâtre Maradana Elphinstone, nous nous sommes assis avec les enfants dans l’après-midi, mais le soir, vers 22 heures, nous avons été attaqués brutalement avec des canons à eau et du gaz lacrymogène. Il y a des blessés », ont déclaré plusieurs personnes présentes.

Des participants ont été chassés à coups de matraque, et quelques jeunes partisans de la satyagraha ont été expulsés et battus. Une femme et trois hommes ont été arrêtés. « C’est clair que le but n’était pas seulement de disperser mais de punir », s’est plaint Ambika Sathkunanathan, un des responsables de la Commissions pour les droits de l’homme du Sri Lanka.

(Avec Asianews)


CRÉDITS

Melani Manel Perera / Asianews