Eglises d'Asie – Birmanie
Des frappes militaires ont visé deux églises dans les États Chin et Kayah, après l’intensification des combats
Publié le 16/10/2021
Le 13 octobre, deux églises ont été visées par les militaires birmans dans deux attaques séparées. Dans l’État Chin, dans l’est du pays, où les milices locales luttent depuis des mois contre la junte au pouvoir, une église baptiste a été entièrement détruite avec plusieurs maisons du village de Rialti, à quelques kilomètres de la ville de Falam. Selon un témoin interrogé par Radio Free Asia, l’attaque était en représailles après un convoi militaire visé par des milices Chin mercredi dernier. Quand les habitants ont vu les soldats arriver, ils ont fui dans la forêt d’où ils ont vu leurs maisons et leur église brûler. Un porte-parole de la junte a nié l’accusation, affirmant que « ce n’est pas correct de dénoncer l’armée dès que quelque chose survient pendant une bataille », et ajoutant que les militaires birmans « reconstruisent les édifices religieux qui ont été détruits par le feu ». Au contraire, la Chin Human Rights Organisation a confirmé l’attaque en la dénonçant comme un « crime de guerre » et en citant d’autres églises visées par l’armée.
La cinquième église catholique visée en cinq mois
Le même jour, des tirs d’artillerie ont visé l’église catholique de l’Immaculée Conception à Phruso, une commune du diocèse de Loikaw, dans l’État Kayah, dans l’ouest de la Birmanie. L’église, construite il y a quatre ans, a subi des dommages au niveau du toit et des murs. Personne n’a été tué ni blessé. Selon le père Wilbert Mireh, un jésuite, l’armée a visé spécifiquement l’église, étant donné qu’elle se trouve loin des autres bâtiments. Selon le père Francis Soe Naing, chancelier du diocèse de Loikaw, des prêtres et des religieuses étaient présents lors de l’attaque au village de Phruso, tout en précisant que les paroissiens s’étaient réfugiés en lieu sûr. « Il y a eu des combats à l’extérieur de Phruso, mais l’attaque contre l’église a eu lieu alors qu’il n’y avait eu aucun autre trouble à l’intérieur de la commune », explique le prêtre. Il s’agit de la cinquième église catholique du diocèse de Loikaw visée par les tirs de l’armée, depuis le début de la répression militaire contre la résistance civile, après le coup d’État du 1er février.
L’église du Sacré-Cœur de Kantharyar, un village près de Loikaw, a été frappée par des tirs d’artillerie qui ont tué quatre catholiques et causé huit blessés, le 23 mai dernier. L’église Saint-Joseph de Demoso a également été touchée le 26 mai. La cathédrale et sanctuaire marial du diocèse de Pekhon a aussi été visée il y a cinq mois. Au moins dix paroisses du diocèse de Loikaw ont été affectées par les conflits récents, qui ont déplacé plus de 100 000 personnes, dont des catholiques, qui ont trouvé refuge dans des églises, des couvents et chez des proches. « Nous avons un besoin urgent de médicaments pour le nombre croissant de personnes déplacées internes, alors que l’Église essaie de réagir au mieux malgré une baisse de moyens », confie le père Soe Naing, qui ajoute qu’ils ont d’autant plus besoin d’aide que les personnes déplacées abandonnent leurs travaux agricoles traditionnels. La dernière attaque contre une église catholique est survenue après l’intensification des combats opposant les militaires à l’armée Karenni et aux milices locales des États Kayah et Shan. L’État Kayah, une région reculée et montagneuse, compte près de 90 000 catholiques pour une population de 355 000 habitants.
240 000 personnes déplacées depuis le 1er février
Les responsables chrétiens, dont le cardinal Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun, continuent d’appeler à protéger les lieux de culte. Le 3 octobre, le pape François a également lancé un nouvel appel à la paix en Birmanie, en implorant Dieu d’envoyer le « don de la paix » pour une nation qui a déjà subi de nombreuses souffrances au cours des derniers mois. Le Saint-Père a répété à plusieurs reprises aux dirigeants militaires de cesser les violences, de libérer les personnes détenues et d’entamer un processus de paix. Le pays d’Asie du Sud-Est est toujours au bord de la guerre civile, après l’intensification des combats dans plusieurs régions birmanes, huit mois après le coup d’État. De nombreux civils des régions indigènes, notamment dans les régions majoritairement chrétiennes comme les États Kayah, Chin, Kachin et Karen, ont subi les conséquences de la reprise des conflits, alors que les populations locales ont déjà subi plus de cinq décennies de régime militaire. Les conflits causés par le coup d’État ont entraîné plus de 240 000 déplacements forcés, déclenchant une grave crise humanitaire, selon les Nations unies.
(Avec Ucanews et Asianews)