Eglises d'Asie

Des villageois chrétiens de l’État Kachin fuient à nouveau les violences dans le nord du pays

Publié le 12/07/2023




Le 3 juillet dernier, des combats ont éclaté entre les militaires birmans et l’Armée de l’indépendance Kachin (KIA), après l’arrivée de renforts de la junte dans la région, provoquant la fuite de plus de mille villageois, majoritairement chrétiens. Depuis l’indépendance du pays en 1948, la KIA est régulièrement opposée à l’armée en demandant l’autonomie et l’autodétermination de la région. Près de 27 000 habitants ont été déplacés dans la région depuis le coup d’État militaire de 2021.

Des jeunes catholiques birmans avec des prêtres et des religieuses durant un pèlerinage pour la paix dans le pays, le 6 mai dernier dans le diocèse de Kalay.

Plus de mille personnes, majoritairement catholiques et baptistes, ont fui leur village dans l’État Kachin, dans le nord de la Birmanie, près de la frontière chinoise, après de nouveaux combats entre les forces militaires birmanes et les rebelles de l’ethnie Kachin. Ceux qui ont pris la fuite appartiennent à près de 160 familles du village de Nan San Yang, situé à environ 20 km de la ville de Laiza (siège de l’Armée de l’indépendance Kachin, ou KIA). Les combats ont éclaté le 3 juillet et ceux qui ont fui ont pris refuge dans la paroisse catholique de la ville de Wai Mai.

Gam Aung, qui représente le groupe de villageois de Nan San Yang, explique que d’autres habitants risquent de faire de même face à la poursuite des violences dans la région. « Nous nous sommes échappés avec seulement quelques vêtements, en laissant derrière nous nos maisons et notre bétail. Nous espérons rentrer dans notre village dans une ou deux semaines », ajoute-t-il, interrogé le 7 juillet.

Dans ce contexte incertain, ceux qui ont fui leur village s’inquiètent de la capacité des groupes catholiques de la région et des autorités locales à continuer de les soutenir à long terme. « À long terme, nous aurons forcément besoin de nourriture et de médicaments, sans compter qu’il faudra trouver une solution pour les enfants scolarisés », poursuit Gam Aung.

Le père Vincent Shan Lum, curé du village de Nam San Yang, explique qu’il a fui avec les villageois le 3 juillet, et qu’ils devront peut-être rester dans l’enceinte de la paroisse de Wai Mai durant plusieurs semaines. Le père Shan Lum, basé en principe au presbytère de Myitkyina (situé à environ 80 km du village), explique que c’est la seconde fois que les villageois sont forcés d’échapper aux violences. « En juin 2011, ils ont déjà été déplacés à cause des combats entre les militaires et la KIA, et ils ont passé des années dans des camps dans le canton de Wai Maw, avant de pouvoir rentrer au village en décembre 2018. »

« Les civils vivent à la merci de d’une autorité militaire irresponsable »

Des attaques militaires ont lieu régulièrement dans la région de Kachin, majoritairement chrétienne, depuis l’indépendance de l’ancienne colonie britannique en 1948. Depuis cette époque, la KIA continue de militer pour l’autonomie et l’autodétermination de la région. Les dernières violences ont été provoquées par la junte militaire birmane, qui aurait envoyé des renforcements près de la ville de Laiza.

Cependant, le régime n’a fait aucune déclaration publique à propos de la reprise des combats avec les rebelles de l’État Kachin. Mais le 4 juillet, la KIA a appelé les habitants à la vigilance en signalant une situation tendue à cause de l’arrivée des renforts de l’armée. « D’autres combats sont attendus si l’armée ne retire pas ses troupes. Donc les gens doivent préparer des provisions, comme du riz, pour une longue période », a prévenu le colonel Naw Bu, porte-parole de la KIA, selon le journal local Myitkyina News Journal, basé dans l’État Kachin.

Plus de 101 500 habitants ont été hébergés dans les camps de la région depuis 2011, dont environ 27 000 qui ont été déplacés après le coup d’État militaire de 2021, selon Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Sur près d’1,7 million d’habitants dans l’État Kachin, on compte une majorité de chrétiens dont environ 116 000 catholiques.

Le 6 juillet devant le Conseil des droits de l’homme, Volker Turk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a déclaré que la violence brutale exercée par la junte contre les civils et son refus de laisser les aides humanitaires accéder aux victimes des catastrophes constituent un « mépris absolu envers l’humanité ». « Les civils vivent à la merci de d’une autorité militaire irresponsable », a-t-il dénoncé.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

RVA Tedim service / Ucanews