Eglises d'Asie

Honorer la mémoire des défunts, une pratique enracinée dans la minorité chrétienne bangladaise

Publié le 14/11/2020




La minorité chrétienne bangladaise, qui représente moins d’1 % de la population sur 160 millions d’habitants, reste très attachée aux visites des cimetières et à la prière pour les défunts durant le mois de novembre, notamment à l’occasion de la fête du 2 novembre, pour la Commémoration des fidèles défunts. Le père Eugene J. Anjus, ancien secrétaire de la Commission pour la liturgie et la prière de la Conférence épiscopale bangladaise, explique qu’au Bangladesh, « les gens sont très religieux et portent beaucoup d’estime aux âmes des défunts ».

Deux enfants allument des cierges sur la tombe d’un proche, au cimetière catholique du Saint-Rosaire, le 2 novembre 2017 à Dacca.

Depuis le 2 novembre, jour de la Commémoration des fidèles défunts, Promila Gomes s’est rendu au moins deux fois par semaine au cimetière de la paroisse catholique Sainte-Rita, dans le district de Pabna, dans le diocèse de Rajshahi, dans l’ouest du Bangladesh. « Je viens prier pour mon père, pour mon beau-père et ma belle-mère, pour leur Salut et pour leur demander de veiller sur ma famille. J’essaie de venir autant que je le peux toutes les semaines, et nous prions tous les soirs à la maison », explique Promila Gomes, âgée de 68 ans. Elle vient déposer des cierges avec des villageois catholiques de sa paroisse. Elle est souvent accompagnée par ses deux fils. Elle explique qu’elle a appris cette pratique des visites au cimetière dans son enfance. « J’accompagnais souvent mes grands-parents et je les regardais prier Dieu, par l’intercession des proches défunts et des ancêtres. Après mon mariage, je voyais ma belle-mère faire de même. Je mourrai un jour, et j’espère que mes enfants continueront cette tradition », ajoute-t-elle.

David Baroi, 46 ans, membre de la paroisse catholique du Très Saint Rédempteur, dans le district de Gopalganj, dans le centre du pays, a également l’habitude de rendre visite aux tombes de ses proches durant le mois de novembre. Ce père de deux enfants, propriétaire d’une épicerie, a perdu ses parents étant enfant. Il s’est battu pendant des années avant de faire prospérer son commerce. « Aujourd’hui, je m’en sors grâce à mon commerce. Mais même si mon emploi du temps est surchargé, je prends le temps de visiter le cimetière afin de prier pour mes parents. Je crois que leurs bénédictions m’ont aidé à traverser les épreuves. C’étaient des gens bien, et j’espère qu’ils sont au Ciel, d’où ils continuent de bénir ma famille », ajoute David, qui prie également le chapelet tous les soirs avec sa famille.

« Tant qu’ils seront en vie, je crois qu’ils continueront »

Dans un pays majoritairement musulman, les visites dans les cimetières chrétiens sont fréquentes au cours du mois de novembre. Dans les régions rurales et urbaines, de nombreux protestants et catholiques se rendent auprès des tombes de leurs proches tout au long de l’année. Beaucoup de paroisses célèbrent également des messes dans les cimetières, une à deux fois par mois. Le 2 novembre, la plupart des messes sont célébrées en plein air dans les cimetières, en présence de plusieurs milliers de fidèles qui viennent prier pour leurs proches défunts. Pourtant, Promila Gomes et David Baroi affirment tous deux que ces traditions des visites aux cimetières ont tendance à se perdre. « Certains jeunes, qui ont grandi avec la foi de leurs grands-parents dans les régions rurales, maintiennent ces traditions », précise David Baroi. L’Église a toujours encouragé ces traditions des visites aux cimetières et la prière pour les défunts.

Ces traditions sont également enracinées dans la foi et la culture populaire, pour le père Eugene J. Anjus, ancien secrétaire de la Commission pour la liturgie et la prière de la Conférence épiscopale bangladaise. « Dans notre pays, les gens sont très religieux et ils portent beaucoup d’estime aux âmes des défunts. Nos prêtres rendent visite aux cimetières régulièrement afin de bénir les tombes et d’organiser des célébrations, particulièrement au cours du mois de novembre. Les gens croient fermement qu’en honorant les défunts, ils peuvent recevoir des bénédictions et des grâces de leur vivant », explique le prêtre. Selon lui, toutefois, cette tradition perdure et n’est pas en déclin. « Les gens ont beaucoup d’estime pour leurs proches défunts. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on voit de nombreuses visites dans les cimetières tout au long de l’année. C’est une sorte de relation spirituelle qui leur donne de la force, et tant qu’ils seront en vie, je crois qu’ils continueront », assure le père Anjus. Les chrétiens, dont une majorité de catholiques, représentent moins d’1 % de la population sur plus de 160 millions d’habitants. Selon l’Annuaire Pontifical 2019, on compte près de 400 000 catholiques bangladais pour 8 diocèses.

(Avec Ucanews, Natore)


CRÉDITS

Stephan Uttom / Ucanews