Eglises d'Asie – Chine
Ilham Tohti, intellectuel ouïghour et défenseur de la minorité au Xinjiang, parmi les nominés au prix Nobel
Publié le 16/10/2020
Avant son arrestation en 2014, Ilham Tohti était un intellectuel ouïghour émérite, surtout connu comme fondateur et directeur du site Internet bilingue Uighur Online, lancé en 2006 pour dénoncer les violations des droits de l’homme subies par les Ouïghours en Chine et pour tisser des liens entre les ethnies Hans et Ouïghoures. Le site a été fermé par les autorités chinoises à plusieurs reprises : en 2008 avant les Jeux olympiques de Pékin, puis en mars et avril 2009. Aujourd’hui, il reste fermé depuis 2014. Quand Ilham Tohti, qui a été nominé parmi les candidats au prix Nobel de la paix 2020, a été condamné le 25 septembre 2014 pour séparatisme, le professeur d’économie a dénoncé une arrestation injuste. Il a été condamné à la perpétuité et se trouve toujours détenu dans une prison chinoise. Ilham Tohti, aujourd’hui âgé de 50 ans, est sur les listes de surveillance chinoises depuis 1999. Avant une première arrestation officielle en 2009, il a déjà été placé en résidence surveillée dans le passé. Comme la majorité des habitants de la province du Xinjiang, Ilham Tothi appartient à la minorité ouïghoure, réprimée par Pékin de ce qui a été dénoncé comme un véritable « génocide culturel ».
Colonialisme et « génocide culturel »
Né en 1969 au Xinjiang, Ilham Tohti a suivi ses études supérieures à l’université Minzu de Pékin. Il y a développé une expertise sur la situation économique et sociale dans la région du Xinjiang. La République populaire de Chine a les yeux rivés sur le Xinjiang (qui signifie « nouvelle frontière ») depuis 1949 quand la province a été annexée par Pékin. Malgré le statut du Xinjiang, classé comme région autonome, la Chine s’est efforcée d’assimiler la culture ouïghoure dans la culture chinoise dominante. Pékin a saisi toutes les occasions de favoriser la langue chinoise aux dépens de la langue et de la culture ouïghoures. Depuis, Pékin considère la Xinjiang comme partie intégrante de la Chine continentale, et voit toute autre suggestion et position comme une trahison. C’est la raison pour laquelle Ilham Tohti, qui s’est opposé à cette politique au Xinjiang, a été condamné pour séparatisme. Dans le cadre d’un « génocide culturel » au Xinjiang, la Chine a favorisé un changement démographique dans la région, en soutenant les migrations des Hans dans la région autonome.
Selon les médias locaux, la population Han était d’environ 5 % au Xinjiang en 1949, contre plus de 40 % en 2020. Ilham Tohti s’est notamment efforcé d’ouvrir des lignes de communication entre les Hans et les Ouïghours. Il est également devenu une cible des autorités pour ses critiques de l’assimilation culturelle et du colonialisme Han opéré par Pékin au Xinjiang. Malgré une position modérée concernant les questions d’autonomies de la minorité ouïghoure, il a été arrêté pour servir d’exemple. Depuis son arrestation, la communauté internationale a condamné sa détention et a salué son travail visant à tisser une communication saine entre Ouïghours et Hans. En 2019, il a reçu deux prix internationaux majeurs, le prix Sakharov, remis par le Parlement européen, et le prix des droits de l’homme Václav-Havel, décerné par le Conseil de l’Europe. Cette année, il a également été nominé parmi les candidats au prix Nobel de la paix 2020, qui a finalement été accordé au Programme alimentaire mondial. Sa fille, Jewher Ilham, a reçu le prix Sakharov à Strasbourg, en confiant qu’elle ignorait si son père était toujours vivant. Sous l’autorité de Xi Jinping, la Chine a renforcé la répression contre les Ouïghours, dont près d’un million ont été envoyés dans des camps, dans le cadre d’une politique de « rééducation » et de répression religieuse.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Youtube / Ucanews