Eglises d'Asie – Pakistan
Islamabad arrête dix Pakistanais accusés de trafic humain après le naufrage en Grèce
Publié le 22/06/2023
Les autorités pakistanaises ont arrêté dix personnes accusées de trafic humain après le naufrage d’un bateau de migrants majoritairement pakistanais dans la péninsule du Péloponnèse, en Grèce. Au moins 82 passagers ont perdu la vie et plusieurs centaines sont portés disparus, alors que le chalutier vétuste transportait entre 700 et 750 hommes, femmes et enfants, dont entre 300 et 400 Pakistanais, selon les témoignages des survivants.
La catastrophe a eu lieu durant la nuit du 13 au 14 juin au large des côtes. Des Égyptiens, des Syriens, des Palestiniens et des Afghans étaient également à bord. Les médias pakistanais estiment jusqu’à 298 victimes pakistanaises suite au naufrage. Ce lundi 19 juin, le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif a déclaré un jour de deuil national. Il a également annoncé la création d’une commission de quatre membres qui sera chargée d’enquêter spécialement sur les trafics humains. Le gouvernement prévoit la publication d’un rapport d’ici la semaine prochaine, et M. Sharif a promis que les trafiquants seraient « sévèrement punis ».
La plupart des arrestations au Pakistan ont eu lieu au Cachemire, la région d’origine de la majorité des migrants pakistanais à bord (peut-être environ 135 d’entre eux), tandis que les autres sont originaires de la province du Pendjab. Les détenus sont accusés d’avoir envoyé des jeunes pakistanais en Lybie, d’où le bateau est parti vers l’Italie. Par ailleurs, le 15 juin, neuf Égyptiens avaient été arrêtés en Grèce, soupçonnés d’être des passeurs, dont le capitaine de l’embarcation. Les neuf accusés ont comparu au tribunal mardi dernier, en niant les accusations.
Entre 2,3 et 2,5 millions de roupies pakistanaises payés aux passeurs par passager
Les familles des victimes ont confié avoir payé entre 2,3 et 2,5 millions de roupies pakistanaises (entre 7 300 et 8 000 euros environ) pour pouvoir embarquer vers l’Italie. Muhammad Mukhtar Butt, dont le fils, Kashif, âgé de 27 ans, était à bord, a expliqué au journal pakistanais Dawn qu’il avait reçu l’appel du passeur qui avait arrangé le voyage de son fils quelques jours avant le naufrage, en le félicitant parce que Kashif allait rejoindre l’Europe. Depuis, il ajoute que le passeur « a disparu et son téléphone est coupé ».
Les familles de six autres migrants originaires d’un village près de Wazirabad racontent les mêmes récits. Malgré le manque de contact avec des proches depuis au moins dix jours, d’autres familles ont appris que les leurs n’étaient pas à bord, alors qu’il y a beaucoup d’incertitude avec l’identification des victimes. De son côté, Raja Sakundar, du district de Kotli dans la province du Cachemire, explique que ses neveux, âgés de 18 et 36 ans, ont disparu. Usman, l’un des survivants, a pu contacter sa famille depuis un camp de réfugiés en Grèce, afin de prévenir ses parents. Il leur a dit que le bateau s’était retrouvé à court d’eau potable et qu’il dérivait depuis cinq jours.
38 % d’inflation en mai dernier au Pakistan
Selon le Guardian, au moins six personnes sont décédées à bord du chalutier avant le naufrage, par manque d’eau potable et à cause de l’encombrement du navire. Une fois sur le bateau, des Pakistanais ont raconté qu’ils ont été « placés dans les zones les plus dangereuses du chalutier » et que les femmes et les enfants ont été enfermés dans la cale. Les hommes arrêtés au Pakistan ont donné à la police les noms des trafiquants avec qui ils ont travaillé (Chaudhry Zulqernain, Talat Kiani, Khalid Mirza et Sajid Mehmood, presque tous basés en Lybie), en expliquant que le voyage vers l’Europe débute en général avec un vol régulier vers les Émirats Arabes Unis, l’Égypte ou la Lybie.
Un des détenus a également affirmé que son fils était à bord du bateau naufragé. Les passeurs ont reconnu que d’autres Pakistanais qui avaient déjà tenté le voyage sont actuellement dans des prisons libyennes. Plusieurs jeunes pakistanais qui n’ont aucune chance d’obtenir un visa légal vers un pays européen tentent aussi des voyages risqués via l’Iran ou la Turquie. Au cours de l’an dernier, le Pakistan a traversé une grave crise politique et économique, avec une inflation qui a atteint 38 % en mai dernier et des négociations en cours avec le Fonds monétaire international (FMI) afin de tenter de décrocher un prêt pour éviter que le pays se retrouve en défaut de paiement.
(Avec Asianews)