Eglises d'Asie

Islamabad : le président Arif Alvi décerne un prix à Iqbal Masih, ancien enfant esclave tué à douze ans

Publié le 29/03/2022




Le 23 mars à Islamabad, le président Arif Alvi a décerné le prix Sitara-e-Shujaat, l’une de ses plus hautes distinctions civiles, à Iqbal Masih, un jeune tisserand catholique, assassiné le 16 avril 1995 à l’âge de 12 ans à cause de son combat contre l’exploitation des enfants dans l’industrie du tapis au Pakistan. Après sa propre libération à l’âge de 10 ans, Iqbal Masih, avec le Front de libération contre le travail forcé des enfants (BLLF), a contribué à libérer 3 000 autres enfants du travail forcé. Le prix a été reçu en son nom par son frère Patras Masih.

Patras Masih (à gauche) reçoit le prix Sitara-e-Shujaat au nom de son frère Iqbal Masih, le 23 mars à Islamabad, des mains du président pakistanais Arif Alvi.

Le gouvernement pakistanais a décerné une de ses plus hautes distinctions civiles à un jeune tisserand catholique, assassiné pour avoir dénoncé le travail des enfants. Le 23 mars à Islamabad, la capitale pakistanaise, le président Arif Alvi a conféré le prix Sitara-e-Shujaat au défunt, Iqbal Masih, pour sa bravoure. Le 16 avril 1995, le jour du dimanche de Pâques, Iqbal Masih a été abattu lors d’une promenade à vélo avec deux amis de son village, près de Muridke à environ 350 km au sud-est d’Islamabad. Il avait seulement 12 ans.

Il avait été vendu comme esclave à l’âge de quatre ans par son père, qui voulait obtenir un prêt pour le mariage de son fils aîné. La dette de son père était de moins de 600 roupies (3 euros). Il a d’abord travaillé dans une fabrique de briques puis dans un atelier de tisserand. Il s’est échappé à l’âge de 9 ans avec d’autres camarades, avant de rencontrer un avocat du Front de libération contre le travail forcé des enfants (BLLF), qui l’aide à sortir de la servitude pour dette, et faisant de lui, à partir de l’âge de 10 ans, une figure publique contre l’esclavage moderne et l’exploitation infantile.

Après avoir rejoint le BLLF, il a dénoncé l’exploitation des enfants dans l’industrie du tapis au Pakistan, en contribuant à libérer près de 3 000 autres enfants du travail forcé et en sillonnant le pays pour sensibiliser sur l’esclavage des enfants. En 1994, il est devenu le plus jeune lauréat du Prix Reebok des droits de l’homme, une somme qu’il espérait utiliser pour suivre des études de droit.

« Il a enfin été honoré, 27 ans après sa mort »

« Je suis triste. Je voulais que ce soit Iqbal lui-même qui reçoive le prix. C’est un honneur pour la communauté chrétienne. Je remercie le président de s’être souvenu du martyre de mon frère », a confié Patras Masih, frère aîné d’Iqbal, qui a reçu le prix au sein de la Maison présidentielle. Davis Afzal Sahotra, secrétaire général d’une organisation locale (Public Peace Welfare Organization) au Pendjab, a déclaré sur Facebook : « Dès le plus jeune âge, le héros national Iqbal Masih a montré un exemple de courage et de bravoure aux enfants forcés de travailler pour des faibles salaires. Il a enfin été honoré, 27 ans après sa mort. »

En 2020, le gouvernement du Pakistan a interdit le travail domestique des enfants en votant un amendement rendant illégal le travail des enfants de moins de 18 ans dans les usines. Toutefois, selon l’Unicef, près de 3,3 millions d’enfants sont toujours concernés par la situation dans le pays. Des enquêtes récentes estiment que près de 4,5 millions de personnes, dont environ 1 million d’enfants, travaillent dans des conditions de semi-esclavage dans près de 20 000 fours à briques au Pakistan.

Selon la Commission nationale des droits de l’homme du Pakistan, les enfants qui travaillent dans les fours à briques ont un taux plus élevé de mortalité, et un enfant sur 20 y perd la vue. Beaucoup d’entre eux appartiennent aux minorités religieuses et marginalisées comme les chrétiens. « Malheureusement, notre pays subit le problème des lois non-appliquées. C’est comme si les institutions fermaient les yeux devant ces atrocités », déplore Albert David, membre de la Commission nationale pour les minorités du pays. Il a lui-même assisté à la cérémonie à Islamabad, et il prévoit de lancer une campagne de sensibilisation. « Ce prix remis à un militant catholique a renouvelé et encouragé notre encagement à poursuivre sa mission, en collaboration avec le gouvernement et la société civile. »

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Ucanews