Eglises d'Asie

La Birmanie n’est pas prête au rapatriement des Rohingyas selon un nouveau rapport

Publié le 27/07/2019




La Birmanie semble n’avoir fait que le minimum pour préparer le retour des musulmans rohingyas qui ont fui l’État d’Arakan (Rakhine) et qui se sont réfugiés au Bangladesh, selon une nouvelle étude publiée par un think-tank australien. Selon les résultats de l’étude, publiée le 24 juillet par l’Institut australien de Stratégie politique (ASPI – Australian strategic policy institute), « les analyses satellites montrent de faibles préparatifs en vue du retour d’un demi-million de réfugiés ». L’étude, qui a cherché à cartographier les conditions dans l’État d’Arakan, met en doute les préparatifs censés être en cours pour le retour des réfugiés, notamment sur les conditions de vie qui les attendraient sur place.

Une nouvelle étude, qui vient d’être publiée par le think thank australien ASPI, basée sur une imagerie satellite entre décembre 2018 et juin 2019, a étudié 392 sites rohingyas de l’État d’Arakan (Rakhine), qui ont été identifiés par l’UNOSAT (le programme opérationnel des Nations Unies pour les applications satellitaires) comme ayant été brûlés, endommagés ou détruits lors de la répression de 2017. Sur ces 392 sites, seuls 320 montrent des signes de reconstruction. L’étude montre également que 45 camps ont été construits ou agrandis, dont certains logeraient déjà des personnes déplacées internes. Plus inquiétant, le rapport décrit également une tendance à la « sécurisation » de la région alors que des installations militaires ont été construites sur d’anciens sites rohingyas. Par ailleurs, au moins 58 autres sites ont été détruits en 2018, et d’autres démolitions ont continué en 2019. « La destruction incessante de zones résidentielles en 2018 et 2019, clairement identifiable sur nos analyses satellites, pose de sérieuses questions quant à la volonté du gouvernement birman de faciliter un processus de rapatriement digne et sécurisé », commente Nathan Ruser, membre du groupe ASPI. « L’analyse que nous détaillons dans le rapport le démontre fortement », ajoute-t-il. À ce jour, le gouvernement birman et l’armée n’ont pas encore réagi suite à la publication du rapport. Kyaw Min, président du Parti de la démocratie et des droits de l’homme, un parti politique basé à Rangoun et qui se bat pour les droits des Rohingyas, confie qu’il n’est pas optimiste sur la situation.

« Leurs maisons ont été brûlées et détruites, où vivront-ils s’ils reviennent ? » demande-t-il. Il ajoute que le processus de rapatriement prendra au moins sept ans, même si le plan du gouvernement d’accepter 300 réfugiés par jour fonctionne correctement. La publication du nouveau rapport survient alors que les négociations se prolongent entre la Birmanie et le Bangladesh. Ce 27 juillet, une délégation birmane conduite par Myint Thu, secrétaire permanent des Affaires étrangères, doit rencontrer des réfugiés et faciliter leur rapatriement. Les deux pays ont déjà accepté le retour d’un groupe de 2 000 Rohingyas en novembre dernier, mais l’opération a été reportée alors que beaucoup de réfugiés craignaient pour leur sécurité. La Birmanie a répété de nombreuses fois qu’elle était prête au rapatriement des Rohingyas, en accusant le Bangladesh d’être responsable des retards. Une mission d’observation de l’ONU a conclu que la Tatmadaw, le nom officiel des forces armées birmanes, était responsable de quatre des cinq actes de génocide contre les Rohingyas, et que le chef militaire Min Aung Hlaing et cinq autres généraux devaient être poursuivis pour génocide et crimes contre l’humanité. La semaine dernière, les États-Unis ont imposé une interdiction de voyager contre Min Aung Hlaing et trois généraux birmans, pour leur rôle dans le nettoyage ethnique des Rohingyas et d’autres atrocités qui se sont produits dans l’État d’Arakan.

(Avec Ucanews, Mandalay)

Crédit : International Rivers / CC BY-NC-SA 2.0