Eglises d'Asie

La campagne « Rose Blanche » lancée à Rangoun pour défendre l’unité interreligieuse

Publié le 07/06/2019




Le mardi 4 juin au soir, de nombreux fidèles de diverses confessions, bouddhistes, musulmans, chrétiens et hindous, se sont rassemblés dans le centre de Rangoun, aux côtés de la communauté musulmane, à l’occasion de la rupture du jeûne du ramadan. La campagne « Rose Blanche » a été lancée afin de défendre les minorités menacées par les bouddhistes nationalistes. Elle a débuté le 17 mai à Rangoun, avant de s’étendre rapidement dans les villes de Sagaing, Mawlamyine, Mandalay, Bago, Naypyitaw et Pyay. Ces dernières années, la Birmanie a connu plusieurs périodes de violences religieuses, pour la plupart visant les musulmans Rohingyas de l’État d’Arakan.

Début juin, dans la soirée, alors que la pluie tombait sur la ville de Rangoun, bouddhistes, musulmans, chrétiens et hindous se sont rassemblés pour prier ensemble et partager l’iftar, le repas de rupture du jeûne du ramadan. Des jeunes de plusieurs religions ont offert des roses blanches aux musulmans et à des fidèles d’autres confessions en signe de solidarité avec les minorités du pays. La campagne « Rose Blanche » a été lancée par des militants interreligieux, peu après la fermeture forcée de plusieurs lieux de culte musulmans temporaires par une centaine de moines bouddhistes nationalistes, dans trois quartiers musulmans du canton de Dagon du Sud, à Rangoun, durant la nuit du 14 au 15 mai. L’initiative interreligieuse vient notamment du moine bouddhiste Ashin Seindita, de la Fondation Asia Light, et de plusieurs autres militants interreligieux, qui ont voulu montrer leur compassion à la communauté musulmane vivant en périphérie de la ville. La campagne « Rose Blanche » a débuté le 17 mai à Rangoun, avant de s’étendre rapidement dans les villes de Sagaing, Mawlamyine, Mandalay, Bago, Naypyitaw et Pyay.

Thet Swe Win, un militant qui a participé au lancement de la campagne à Rangoun, explique que l’objectif de l’initiative est de rejeter la violence et de montrer leur solidarité aux minorités et aux populations opprimées. « Il faut que davantage de monde, en particulier les bouddhistes, participe à la campagne, pour qu’ils joignent leurs voix à ceux qui veulent combattre la violence », confie-t-il, ajoutant que beaucoup de bouddhistes restent silencieux malgré leur opposition aux nationalistes extrémistes. « Les nationalistes ont l’audace d’élever la voix pour parler de nationalisme. Et nous, les bouddhistes, nous devons élever la voix contre la haine et contre les violences faites aux minorités. » Thet Swe Win a appelé les musulmans à rester patients face aux actes antimusulmans des nationalistes, et à réagir avec intelligence. « Si une des deux parties répond trop violemment, cela pourrait facilement ouvrir la voie aux opportunistes politiques », a-t-il ajouté. Ces dernières années, la Birmanie a connu plusieurs périodes de violences religieuses, visant pour la plupart les musulmans Rohingyas de l’État d’Arakan (Rakhine).

Protection des minorités contre la montée du nationalisme

Les moines extrémistes de l’organisation Ma Ba Tha (Association patriotique du Myanmar ou Association pour la protection de la race ou de la religion), ont encouragé les violences antimusulmanes en 2012, qui ont causé plus de deux cents morts et poussé des dizaines de milliers de personnes à fuir l’État d’Arakan. L’organisation, aujourd’hui interdite et se faisant appeler sous un autre nom (Fondation Philanthropique Buddha Dhamma), est connue pour sa rhétorique antimusulmane. La minorité musulmane en Birmanie a été visée et manipulée par plusieurs régimes militaires depuis les cinq dernières décennies. Les musulmans représentent environ 4,3 % de la population dans ce pays majoritairement bouddhiste, selon le recensement de 2014. La plupart d’entre eux sont arrivés au IXe siècle, et sont d’origine indienne, chinoise ou pathi. Al Haj Aye Lwin, musulman et cofondateur du groupe Religions for Peace Birmanie (Religions pour la Paix, une conférence internationale de représentants des religions dédiée à la promotion de la paix), se réjouit du lancement de la campagne « Rose Blanche » et de la participation d’un grand nombre de jeunes de diverses confessions, montrant leur unité dans la diversité. Al Haj Aye Lwin ajoute qu’il y a plusieurs années, des militants interreligieux ont lancé plusieurs campagnes dans le but de contrer la montée du nationalisme et du sentiment antimusulman, attisés par les moines extrémistes. « Nous devons nous adapter à ceux qui sont différents, parce qu’ils ont le droit d’être différents. Et nous devons prendre conscience de la diversité », ajoute-t-il. Ashin Seindita, fondateur de la Fondation Asia Light, basée à Pyin-Oo-Lwin (dans le centre du pays, à l’est de Mandalay), se réjouit également de l’engagement de nombreux jeunes dans des activités interreligieuses. « La nouvelle génération voit les gens comme des êtres humains, quelle que soit leur race, leur religion ou leur ethnie. »

(Avec Ucanews, Mandalay)


CRÉDITS

White Rose Campaign / Ucanews