Eglises d'Asie

La Thaïlande tente de lutter contre la menace d’une crise démographique

Publié le 10/03/2022




L’an dernier, la Thaïlande a enregistré seulement 544 000 naissances pour 563 000 décès, sur une population de 69 millions d’habitants. Alors que le nombre de décès a dépassé celui des naissances pour la première fois, les autorités s’inquiètent des prémices d’une grave crise démographique, considérée comme un « tsunami » par certains experts dans le pays. Face à cette tendance, le gouvernement thaïlandais a annoncé une série de mesures pour tenter de pousser les jeunes thaïlandais à avoir davantage d’enfants.

Le gouvernement thaïlandais a lancé une vaste campagne afin de lutter contre la crise démographique dans le pays, alors que le nombre de naissances enregistrées n’a jamais été aussi bas. Parmi les nouvelles initiatives annoncées, les autorités projettent la création de garderies et de centres de fertilité, dont le nombre reste limité à Bangkok et dans les villes principales thaïlandaises, dans l’ensemble des 76 provinces du pays. De plus, sur les réseaux sociaux, des influenceurs ont également été recrutés afin d’appeler les gens à avoir des enfants.

Ces mesures surviennent alors que des chiffres publiés récemment indiquent seulement, pour l’an dernier, 544 000 naissances sur une population de 69 millions d’habitants ; ainsi le nombre de décès enregistrés, qui s’élève à 563 000, a dépassé celui des naissances pour la première fois. Le taux de fécondité était déjà sous le seuil de remplacement d’1,2 enfants par femme depuis des années, mais ce nouveau record a inquiété les décideurs thaïlandais, les poussant à trouver des façons d’encourager les jeunes thaïlandais à procréer plus tôt et davantage.

« Nous tentons de ralentir ce déclin des naissances et de renverser la tendance en appelant les familles qui le peuvent à avoir des enfants plus tôt », a déclaré Suwannachai Wattanayingcharoenchai, un représentant des autorités sanitaires du pays, interrogé par l’agence Reuters. Avec d’autres pays de la région bénéficiant d’un niveau de vie plus élevé comme Singapour, la Thaïlande a vu son taux de fécondité chuter continuellement au cours des trois dernières décennies, alors que de plus en plus de femmes thaïlandaises décident d’avoir des enfants plus tard, et souvent seulement un ou deux enfants.

Vers un tsunami démographique

La principale raison à cela a été une relative prospérité et une certaine mobilité sociale, qui ont amené beaucoup de femmes à poursuivre leurs études et leurs carrières avant d’avoir des enfants. « Les chiffres indiquent une crise démographique dans laquelle les états d’esprit qui amènent à fonder une famille ont changé », confie Teera Sindecharak, spécialiste en démographie de l’université Thammasat, située à Bangkok.

Par ailleurs, la Thaïlande est désormais considérée officiellement comme une société vieillissante, alors qu’un cinquième de la population est âgé de plus 60 ans. Cette tendance devrait également entraîner des conséquences sociales profondes avec des pénuries de main-d’œuvre, une baisse des recettes fiscales, une diminution de la population active et une hausse des dépenses médicales.

« Nous considérons cette tendance comme un ‘tsunami démographique’. C’est une vague énorme qui aura des impacts considérables », affirme Pramote Prasartkul, professeur en démographie à l’Institut IPSR (Institute for Population and Social Research) de l’université Mahidol (Bangkok). Selon lui, si les taux de fécondité suivent la tendance actuelle, d’ici 2040, le ratio entre le nombre de personnes en âge de travailler et le nombre de retraités sera d’1,7, contre 3,4 l’an dernier dans le pays – ce qui provoquera un profond bouleversement dans la société thaïlandaise.

De plus, l’économie nationale devrait en subir les conséquences. Rien que le secteur industriel national, particulièrement robuste en matière de production automobile et d’électronique, « subira des baisses de productivité, donc nous devons développer le nombre de travailleurs qualifiés et adopter les technologies automatisées », estimait Danucha Pichayanan, un haut fonctionnaire thaïlandais, lors d’un forum commercial organisé récemment.

En attendant, il reste à voir si les efforts du gouvernement pour encourager les jeunes couples à avoir davantage d’enfants porteront leurs fruits, alors que la dette des ménages a gonflé pour atteindre presque 90 % PIB, contre 59 % en 2010, selon la Banque de Thaïlande. Par conséquent, beaucoup de Thaïlandais, en particulier parmi les jeunes, peinent davantage à s’en sortir, et nombre d’entre eux sont donc plus réticents à l’idée d’avoir des enfants. « Cela devient très difficile pour beaucoup de gens », commente Teera Sindecharak.

(Avec Ucanews)