Eglises d'Asie

Le cardinal Ranjith, archevêque de Colombo, s’oppose aux partis fondés sur la religion ou l’ethnie

Publié le 02/09/2020




À l’occasion d’une célébration dans la basilique Notre-Dame de Lanka de Tewwata, à Ragama, à vingt kilomètres de la capitale, le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo, a pris la parole en appelant le gouvernement sri-lankais à interdire les partis politiques fondés sur l’appartenance ethnique ou religieuse. « Il y a trente ans, un groupe de chrétiens est venu me voir pour me dire que si nous formions un parti chrétien, nous pourrions défendre nos droits. Je leur ai dit que nous n’avions pas besoin de partis politiques chrétiens », a-t-il poursuivi, avant de revenir sur les attentats du 21 avril 2019 pour appeler à poursuivre les enquêtes.

Le sanctuaire Saint-Antoine de Kochchikade, à Colombo, où 28 personnes sont décédées durant les attentats du 21 avril 2019.

Le 30 août, à l’occasion d’une messe célébrée dans la basilique Notre-Dame de Lanka de Tewwata, à Ragama, à vingt kilomètres de la capitale, le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo, a appelé le gouvernement sri-lankais à interdire les partis politiques fondés sur la religion ou l’appartenance ethnique. Par ailleurs, l’archevêque a affirmé que la commission présidentielle chargée d’enquêter sur les attentats du 21 avril 2019 n’a identifié que les noms des personnalités politiques et des fonctionnaires qui n’ont pas rempli leurs devoirs. « Ceux qui sont derrière les attaques, qui les ont financées et qui ont placé les bombes, n’ont jamais été trouvés », a-t-il souligné. Le cardinal a confié qu’il espérait toujours que les autorités tiennent leur promesse faite à l’Église locale : identifier et de punir les responsables des attaques du dimanche de Pâques. « Si un gouvernement essaie de cacher ou de relâcher des coupables sans les condamner, je m’opposerai à ce gouvernement. Le gouvernement précédent n’a pas enquêté convenablement sur les attentats », a-t-il ajouté. « Même quand ils ont eu des informations sur les attaques avant qu’elles se produisent, ils n’ont pas agi comme il fallait. Les membres du gouvernement précédent tentent toujours de se protéger. Ils se sont tous lavé les mains et sont retournés chez eux, comme Ponce Pilate. »

« C’est une question d’humanité »

Neuf terroristes kamikazes affiliés à National Thowheed Jamath, un groupe islamiste local, ont attaqué trois églises et un hôtel de luxe, le 21 avril 2019, tuant au moins 269 personnes, dont 37 étrangers, et causant plus de 500 blessés. Suite aux attentats, la population et les responsables religieux ont dénoncé les dirigeants et le gouvernement pour avoir échoué à empêcher les attaques. L’ancien secrétaire à la Défense, Hemasiri Fernando, et l’ancien chef de la police Pujitha Jayasundara, ont été placés en détention préventive pour leur négligence malgré les informations obtenues par les services de renseignement sur une possible attaque à venir. « Il y a une victime qui a perdu sa femme et trois enfants. Il dort encore près de leurs tombes la nuit. Les autorités, les dirigeants de notre pays ne le comprennent pas. Ce n’est pas une question de politique, mais une question d’humanité », a insisté le cardinal Ranjith. « C’est une erreur de fonder un parti politique sur la religion ou sur la langue. J’appelle le gouvernement à interdire les partis basés sur la religion ou sur l’ethnie », a-t-il demandé par ailleurs. « Il y a trente ans environ, un groupe de chrétiens est venu me voir pour me dire que si nous formions un parti chrétien, nous pourrions défendre nos droits. Je leur ai dit que nous n’avions pas besoin de partis politiques chrétiens », a-t-il poursuivi.

« L’unité a été menacée depuis l’indépendance, et aujourd’hui, nous débattons sur des questions telles que la langue officielle du pays, sur l’ethnie dominante et à qui appartient le pays. Il est regrettable de voir que le pays est toujours divisé à cause des différences ethniques, linguistiques et religieuses. » L’archevêque de Colombo a confié que les attentats du 21 avril 2019 auraient pu faire encore bien plus de victimes, si un van, qui était garé à côté du sanctuaire Saint-Antoine de Kochchikade, avait explosé lui aussi. « On sait maintenant qu’ils préparaient une seconde attaque. J’espère que ceux qui conspiraient en secret pour préparer de telles atrocités seront punis. Sinon, cela pourrait se reproduire. » Le cardinal Ranjith a affirmé que certains officiers irresponsables versaient aujourd’hui « des larmes de crocodile » devant la commission présidentielle. De son côté, Nuwan Rathnaweera, un étudiant, estime que plutôt que de verser des larmes devant la commission présidentielle, ils auraient dû agir quand ils le pouvaient, pour protéger les vies de personnes innocentes. « Pourquoi n’ont-ils par remplis leurs devoirs correctement ? De plus, les chefs des partis politiques ont exploité les attentats afin d’attirer des partisans », a-t-il ajouté. « Certains responsables religieux demandent de poursuivre les responsables politiques corrompus, et certains moines bouddhistes tentent d’entrer au Parlement. Mais le peuple attend toujours des réponses. »

(Avec Ucanews, Colombo)


CRÉDITS

Niranjani Roland / Ucanews