Eglises d'Asie – Chine
Le crucifix de Jimmy Lai, peint en août 2022 dans une prison hongkongaise
Publié le 28/02/2024
Une peinture avec un Christ sur une grande croix verte, entourés de huit grandes fleurs orange, avec la signature de l’auteur clairement visible en dessous, ainsi que le lieu et la date de la réalisation de l’œuvre : Jimmy Lai, Prison de Stanley à Hong-Kong, 13 août 2022. Le tableau a déjà été exposé quelques jours dans une chapelle dédiée à saint Michel, au sein de la Busch School of Business de l’Université catholique de Washington.
Pour beaucoup, c’est un témoignage visible de la foi fervente qui soutient l’entrepreneur catholique hongkongais, âgé de 76 ans, fondateur du journal pro-démocratie Apple Daily, et qui est en prison à Hong-Kong depuis déjà quatre ans pour avoir défendu les mouvements pro-démocratie via l’ex-quotidien hongkongais. En prison, Jimmy Lai peint et réalise souvent des œuvres sur des thèmes religieux, mais peu appréciées des autorités locales qui, selon certains témoignages, ont déjà essayé de l’empêcher de continuer.
Pour cette raison, l’exposition permanente de son travail artistique à l’Université catholique de Washington, et soutenue par son ami, le père Robert Sirico, fondateur de l’Institut Acton, est particulièrement significative. Afin de continuer de solliciter l’attention de l’opinion publique sur Jimmy Lai, il a aussi réalisé le documentaire The Hong Konger (« Le Hongkongais »), qui raconte sa vie, ses combats et par-dessus tout sa foi qui l’a guidé dans ses choix.
Tout ceci se passe alors que le procès de Jimmy Lai se poursuit à Hong-Kong, au cours duquel il risque une peine de prison à vie dans le cadre de la Loi sur la sécurité nationale, et qui se déroule pour beaucoup d’une façon de plus en plus grotesque. Lors de la séance du 26 février, le procureur est allé jusqu’à produire une « preuve » de collusion de l’ancien patron de presse avec des forces étrangères, en citant Donald Trump qui, après l’arrestation de l’entrepreneur en 2020, avait désigné publiquement l’éditeur de l’Apple Daily comme « un homme courageux ».
Nouveau projet de loi relatif à la sécurité nationale
En ce qui concerne les anciens rédacteurs en chef du journal, il leur est demandé de décrire les choix qu’ils ont faits à propos d’articles individuels dans le cadre de leur couverture des évènements de 2019 à Hong-Kong, et d’expliquer les directives qu’ils avaient reçues de leur éditeur. Tout ceci est particulièrement significatif à la lumière des débats sur l’Article 23, la nouvelle législation locale qui, au nom de la sécurité, risque de réprimer encore davantage la liberté d’expression.
L’Article 23 de la Loi fondamentale, ou mini-Constitution, de Hong Kong exige que le gouvernement adopte des lois locales dans le but d’interdire sept infractions, notamment celles de trahison et de sédition. Une période de consultation publique est restée ouverte jusqu’au 28 février.
Le chef de l’exécutif hongkongais, John Lee, a limité l’espace et le temps réservés aux débats publics sur la nouvelle mesure : tout commentaire n’était permis que jusqu’à la fin du mois de février, et il a fait comprendre que les parmi les opinions exprimées, celles favorables à la nouvelle législation l’emporteraient largement. Ce qui n’est pas surprenant quand on considère ce qui est arrivé à toutes les voix qui ont tenté de faire progresser les demandes pro-démocratie.
Des « conséquences considérables » pour la liberté de la presse
Malgré tout, l’Association des Journalistes de Hong-Kong (HKJA) a exprimé son opinion sur la Loi sur l’exécution de l’article 23 (Article 23 Enforcement Act), en affirmant qu’elle pourrait avoir des « conséquences considérables » pour la presse. Dans un communiqué, l’association a appelé les autorités à fournir des définitions plus claires sur ce qui constitue précisément les sept offenses ciblées, y compris concernant les ingérences extérieures et les vols de secrets d’État, et dont les définitions sont jugées trop vagues – ce qui pourrait aisément être manipulé afin d’attaquer la liberté de la presse.
Par ailleurs, Agnès Chow, une jeune militante catholique pro-démocratie, qui a été emprisonnée dans le cadre de la Loi sur la sécurité nationale et qui a pu récemment s’échapper à l’étranger, est actuellement au Canada où elle a trouvé refuge. Dans une vidéo de plus de 20 minutes publiée sur YouTube, Agnès Chow, qui est à nouveau officiellement recherchée par la police hongkongaise, a raconté en détail les mois qu’elle a passés en prison, y compris des séjours passés en confinement solitaire.
Elle y explique également avoir lu plus de 20 nouvelles écrites par l’auteur japonais Keigo Higashino, ainsi que beaucoup d’autres séries fantastiques populaires, afin de tenter d’oublier sa situation difficile. « Parfois, quand je finissais un roman et que je revenais à la réalité, entourée de murs, assise sur un lit trop dur, cela m’a vraiment remplie d’un sentiment de solitude et de tristesse », raconte-t-elle. Elle ajoute qu’elle ne prend pas à la légère sa liberté retrouvée, d’où son initiative de parler devant une caméra, en ajoutant qu’elle espère continuer de publier d’autres vidéos à l’avenir.
(Avec Asianews)
CRÉDITS
Asianews