Eglises d'Asie

Le pape François aux Birmans : « Face à la violence, gardez l’espoir, l’unité et la vérité. »

Publié le 18/05/2021




Lors d’une messe spéciale célébrée à Saint Pierre de Rome dimanche pour la communauté birmane, le souverain pontife a encouragé les Birmans à ne pas perdre la foi et à s’engager, même au péril de leur vie.

Près de 200 personnes ont participé, dimanche, à une messe spéciale célébrée pour la communauté birmane à Rome par le pape François. Des religieuses, prêtres, séminaristes et laïcs birmans vivant à Rome et dans d’autres régions d’Italie s’étaient rassemblés pour la célébration eucharistique, au cours de laquelle les lectures, prières et psaume étaient prononcés en birman.

Visiblement ému, le pape s’est adressé durant son homélie non seulement aux personnes présentes mais aussi aux quelques 750 000 catholiques, ainsi qu’aux autres chrétiens et aux fidèles de différentes confessions qui suivaient la célébration en ligne depuis ce pays à majorité bouddhiste de 52 millions d’habitants : « Chers frères et sœurs, a-t-il interrogé, en ces jours où votre pays bien-aimé, le Myanmar, connaît la violence, les conflits et la répression, demandons-nous : qu’est-ce que nous sommes appelés à garder ? » Il a ensuite encouragé les Birmans à conserver « la foi, qui aide à garder l’espoir lorsque tout espoir semble perdu », l’unité, pour éviter « la maladie de la division qui affaiblit nos familles, nos communautés, nos peuples… » et la vérité « non pas pour défendre des idées et devenir des gardiens d’un système de doctrines et de dogmes, mais pour rester engagés auprès du Christ »

Depuis le début de son pontificat, le pape François a marqué un intérêt tout particulier pour la Birmanie, un pays à la communauté catholique modeste mais dynamique. Il y a effectué la première visite papale de l’histoire, en 2017. Il y a nommé le premier cardinal, Charles Maung Bo, aujourd’hui une voix très écoutée dans le pays. Il a également reçu Aung San Suu Kyi au Vatican en 2013. Depuis le coup d’état du premier février dernier, il a plusieurs fois apporté son soutien au peuple birman et condamné les violences des militaires.

Une allocution au pape a été prononcée à la fin de la messe par un jeune prêtre birman, le père Bosco Mung Sawng, qui a exprimé sa gratitude pour l’amour du pontife pour « ce petit troupeau », à un moment où « la communauté internationale nous a abandonnés. »

Le message pontifical a été accueilli avec émotion par les communautés catholiques de Birmanie, dont beaucoup sont situées dans les zones à minorités ethniques, des territoires particulièrement durement frappés par les combats, notamment chez les ethnies Karen et Kachin, où frappes aériennes et attaques terrestres sont désormais quotidiennes. Ces derniers jours, de violents combats dans l’état Chin, une province à forte présence chrétienne, ont fait plonger la zone dans la guerre civile.

Un peu plus de 100 jours après le coup d’État, la Birmanie est au bord du chaos et du désastre humanitaire. Le nombre de morts a officiellement dépassé les 800 personnes – et pourrait bien être beaucoup plus élevé, selon les ONG birmanes. Près de 5 000 citoyens ont été arrêtés, dont près de 4 000 sont actuellement incarcérées. Un mouvement de désobéissance civile des travailleurs du secteur public a conduit des milliers de personnes à perdre leur logement et leur salaire. L’économie s’est effondrée et la famine augmente : près de la moitié de la population pourrait passer sous la barre du seuil de pauvreté d’ici quelques mois selon des projections récemment publiées par l’ONU. Au moins 40 000 civils ont fui leurs villages pour échapper aux assauts de l’armée.

Pendant la messe, le pape François a lancé un appel clair à l’engagement politique des Birmans : « Parfois, en tant que Chrétiens, nous voulons faire des compromis, mais l’Évangile nous demande de rester fermes dans la vérité, et d’offrir notre vie aux autres au nom de cette vérité, a-t-il rappelé. Face à la guerre, à la haine, la fidélité à l’Évangile et la volonté d’être des faiseurs de paix nécessite de s’engager, y compris à travers des choix sociaux et politiques, même lorsque cela signifie de risquer sa vie. Ce n’est qu’à ce prix que les choses peuvent changer. »

(Avec Ucanews)

Crédit Alfredo Borba / CC BY-SA 4.0