Eglises d'Asie

Le sanctuaire de Saint-Antoine de Padoue de Panjora attire toujours plus de pèlerins bangladais

Publié le 12/02/2020




Le sanctuaire de Saint-Antoine de Panjora, au nord de Dacca, attire d’année en année toujours plus de pèlerins de tout le pays, aussi bien hindous et musulmans que catholiques. Une dévotion populaire qui remonterait à plusieurs siècles, avec l’apparition d’une statue de saint Antoine dans la région de Panjora, suivie de guérisons miraculeuses jusqu’à la construction d’une chapelle puis l’essor du sanctuaire comme site religieux majeur dans le pays. Les célébrations du 7 février, le jour de la fête de saint Antoine de Padoue, étaient présidées par le cardinal Patrick D’Rozario, archevêque de Dacca : « Saint Antoine était un sage et un saint homme, mais il était également humble et simple. Ses œuvres nous attirent, et en tant que disciples, nous avons été baptisés dans la même foi. »

Une danse religieuse traditionnelle au début de la messe, le 7 février durant le pèlerinage annuel du sanctuaire de Panjora.

Chaque année, depuis trois ans, Badhon Gomes se prépare plusieurs semaines à l’avance au pèlerinage annuel au sanctuaire de Saint-Antoine de Padoue, situé dans le village de Panjora, dans le district de Gazipur, à 50 km au nord de Dacca. Badhon Gomes, père de famille catholique et trentenaire, vit à Parowan, l’un des seize villages, dont celui de Panjora, qui dépendent de la paroisse de Saint-Nicolas de Tolentino. Fondée à Nagari en 1695, il s’agit de l’une des plus anciennes églises catholiques du Bangladesh. Cette année, pour la quatrième année consécutive, Badhon Gomes a été chargé de coordonner la distribution des repas gratuits aux fidèles qui sont venus au sanctuaire pour le festival annuel, le 7 février à l’occasion de la fête de saint Antoine de Padoue. « Nous avons offert des repas gratuits à cinq cents fidèles, mais notre objectif était d’en distribuer plus de mille. Mais à cause des restrictions sur les déplacements des véhicules motorisés autour du sanctuaire, beaucoup de pèlerins n’ont pu en profiter », explique Badhon Gomes. Les villageois chrétiens et hindous de Parowan et de Bhasania, dont des paroissiens de l’église Saint-Augustin d’Hippone, ont soutenu l’initiative. Ainsi, au cours des trois dernières années, 800 à 1200 personnes ont pu recevoir des repas gratuits grâce au groupe de Badhon Gomes. « Pour les habitants de la région, le sanctuaire de Saint-Antoine est une fierté. Les gens pensent qu’ils peuvent recevoir des grâces spéciales par l’intercession du saint en se mettant au service des pèlerins », ajoute-t-il.

Le village de Panjora compte une chapelle qui abrite une statue de saint Antoine qui, bien que petite, est devenue particulièrement populaire dans la région au fil des siècles. Le site, qui dépend de l’archidiocèse de Dacca, est le sanctuaire catholique le plus populaire sur la douzaine que compte le pays, majoritairement musulman. Le Bangladesh compte également d’autres sanctuaires dédiés à la Vierge, qui accueillent entre cinq et sept mille fidèles durant les festivals annuels. Cette année, deux messes ont été célébrées au sanctuaire de Saint-Antoine, en présence de plus de 70 000 pèlerins catholiques, hindous et musulmans. Près de 6 000 personnes ont également participé à la neuvaine de prières organisée avant la fête, selon les responsables du sanctuaire. Dès la fin des célébrations, durant le festival, plusieurs milliers de fidèles sont venus prier devant la chapelle et les répliques de la statue du saint, en honorant, en embrassant ou en touchant la statue. Plusieurs centaines d’entre eux ont également offert différentes offrandes en action de grâce ou pour demander une intention particulière. « J’ai beaucoup entendu parler de saint Antoine par des amis, et je suis venu ici pour la première fois, avec ma femme et notre fils de quatre ans. Nous avons prié pour notre famille. J’aimerais revenir ici tous les ans », confie Sri Trinath, un hindou de 26 ans de Dacca. En 2018, face à la dévotion populaire à saint Antoine qui continue de grandir d’année en année, l’archidiocèse de Dacca a nommé un recteur à temps plein pour veiller sur le sanctuaire et sur les besoins spirituels des pèlerins.

Entraide et bienfaiteurs au soutien des pèlerins

Plusieurs milliers de pèlerins, dont une majorité de catholiques, viennent chaque année au sanctuaire pour le festival annuel.

Comme Badhon Gomes, un groupe de jeunes catholiques du Club Saint Don Bosco du village de Nagari ont participé à la distribution de repas gratuits l’an dernier. « Nous avons servi plus de deux cents pèlerins en 2019. Cette année, nous avons pu en distribuer plus de cinq cents, et nous espérons dépasser mille repas l’an prochain. Des villageois et d’anciens membres du club ont participé généreusement pour soutenir notre initiative », confie Pranto Rozario, 24 ans, président du club, qui ajoute que leur but est surtout de servir les pèlerins qui viennent de loin, en particulier les catholiques indigènes du diocèse de Mymensingh. « D’habitude, le jour de la fête, les pèlerins se retrouvent avec des proches pour déjeuner. Mais beaucoup d’entre eux n’ont pas de famille ici, et ils n’osent pas s’inviter, tandis que le prix de la nourriture dans les hôtels de la région est très élevé durant le festival. Nous avons donc voulu les aider en faisant ce petit service. » Mighty Sampson, un catholique de 36 ans de l’archidiocèse de Chittagong, visite le sanctuaire depuis 14 ans. Avec d’autres pèlerins, il a organisé le transport de près d’une centaine de passagers vers le sanctuaire, grâce aux dons de catholiques de la région. « Pour être honnête, je suis très croyant mais pas très pratiquant. À cause de mes journées de travail surchargées, je n’ai pas le temps d’aller à l’église et à la messe régulièrement. Mais j’ai organisé ces transports comme un service rendu à la communauté », explique Sampson, qui dirige une équipe d’ingénieurs de GPH Steel.

En plus d’amener des pèlerins au sanctuaire, son groupe parraine également les dépenses des pèlerins en difficulté. Il précise qu’il ne cherche pas de grâces divines ou faveurs particulières en retour. « Je crois qu’en aidant les gens, je peux me rapprocher de Dieu. En aidant les gens à participer à une fête religieuse, je n’attends rien de particulier, mais Dieu pourvoira au mieux pour moi », ajoute-t-il. Beaucoup de catholiques de la région offrent de l’eau et de la nourriture aux pèlerins, et leur proposent de se reposer chez eux. L’Église locale reçoit également de nombreux dons financiers ou logistiques de la part de bienfaiteurs aussi bien chrétiens que non chrétiens, et provenant de particuliers ou d’organisations, explique le père Joyanto S. Gomes, de la paroisse catholique de Nagari. Ainsi, les fleurs qui ornent le sanctuaire durant le festival sont fournies par une famille catholique, tandis que les décorations de la voûte, les écrans LED et le système sonore sont parrainés par des particuliers et des organisations. De plus, plusieurs catholiques ont donné 650 paniers repas pour les pèlerins. Ces dernières années, grâce aux dons des pèlerins, le site s’est également développé pour pouvoir loger davantage de monde. « À l’avenir, l’Église indienne voudrait que le sanctuaire soit élevé au rang de basilique. Nous espérons que les pèlerins continueront à nous soutenir », confie le père Gomes.

Un appel à la sainteté et à l’humilité

On ignore à quand remonte exactement cette dévotion à saint Antoine dans la région, mais elle serait vieille de plusieurs siècles. Certains affirment qu’une petite statue de saint Antoine est apparue et réapparue à Panjora à plusieurs reprises ; un fait mystérieux et miraculeux qui aurait attiré de nombreux pèlerins. Bientôt, de nombreuses personnes ont témoigné que l’intercession du saint avait fait des miracles dans leur vie, notamment des naissances, des objets retrouvés ou des épreuves difficiles surmontées. La légende de saint Antoine de Panjora et les témoignages se sont répandus, faisant du sanctuaire un site catholique majeur dans le pays. Plus tard, une fidèle catholique locale, Catherine Peries, a donné le terrain à l’Église pour permettre d’y construire une chapelle, où est conservée la statue miraculeuse. En 2016, le Vatican a permis une visite au sanctuaire des reliques de saint Antoine de Padoue, en reconnaissance pour sa considérable popularité dans le pays. Le jour de la fête, le 7 février, le cardinal Patrick D’Rozario, archevêque de Dacca, a célébré deux messes et appelé les fidèles à devenir saints et humbles comme saint Antoine. « Saint Antoine était un sage et un saint homme, mais il était également très humble et simple. Ses œuvres nous attirent à lui, et en tant que disciples, nous avons été baptisés dans la même foi. Comme lui, nous avons été appelés à prêcher la Bonne Nouvelle en pensées, en paroles et en actes », a-t-il déclaré durant son homélie. Saint Antoine de Padoue est né à Lisbonne, au Portugal, le 15 août 1195. Il a été ordonné prêtre, et plus tard, il est devenu franciscain. Il était reconnu par tous pour son grand amour des pauvres et des malades, et pour sa connaissance des Écritures. Il est mort en 1231 à l’âge de 35 ans à Padoue, en Italie. Le Vatican l’a canonisé un an plus tard, et il a été déclaré docteur de l’Église en 1946.

(Avec Ucanews, Panjora)


CRÉDITS

Piyas Biswas / Ucanews