Eglises d'Asie

Le Sri Lanka ajouté à une liste de surveillance sur l’état des libertés fondamentales

Publié le 23/06/2022




Le Sri Lanka a été ajouté à une nouvelle liste de surveillance publiée par la plateforme en ligne Civicus Monitor, un outil de recherche qui fournit des données sur l’état de la société civile et des libertés civiques dans 196 pays. L’espace civil au Sri Lanka est actuellement classé par Civicus Monitor comme « obstrué » – contre des pays comme l’Inde où il est classé comme « réprimé », ou comme la Chine où il est classé comme « fermé ». L’organisation accuse Colombo d’avoir réagi aux manifestants contre la gestion de la crise économique sri-lankaise de manière excessive.

Des Sri-Lankais manifestant à Colombo, le 16 avril 2022. Les libertés civiles sont menacées alors que le pays subit sa pire crise économique depuis des décennies.

Le Sri Lanka a été ajouté à la dernière liste de surveillance de la plateforme Civicus Monitor, un outil de recherche en ligne fournissant des données sur l’état de la société civile et des libertés civiques dans 196 pays.

Ces derniers mois, alors que le pays a subi sa pire crise économique en plusieurs décennies, les autorités ont réagi aux manifestations contre le gouvernement en imposant des règles d’urgence restrictives et en recourant à des moyens excessifs et à la force contre les manifestants. Les journalistes ont également été visés, et des groupes pro-gouvernement ont attaqué des sites de manifestations en toute impunité. La nouvelle liste de surveillance de Civicus a aussi ajouté d’autres pays comme le Tchad, le Kazakhstan, le Kenya, le Mexique et la Hongrie.

Le 1er avril puis à nouveau le 6 mai, afin de contrer les manifestations, des règles d’État d’urgence ont été imposées à deux reprises au Sri Lanka, ce qui a permis aux autorités d’arrêter et de détenir des suspects sans mandat d’arrêt et de réprimer des droits fondamentaux comme la liberté d’expression, de rassemblement et de mouvement. Ces mesures ont renforcé les pouvoirs du président et réprimé les manifestations publiques tout en limitant l’accès aux espaces publics. De plus, elles ont permis le recours à la force contre toute personne enfreignant les règles.

Les autorités ont également coupé l’accès aux réseaux sociaux dont Facebook, YouTube, Twitter, Instagram et WhatsApp, le 1er avril durant 15 heures. Par ailleurs, les forces de sécurité ont aussi été mobilisées contre les manifestants, le 31 mars devant la résidence privée du président Gotabaya Rajapaksa, en ayant recours à une force excessive. Du gaz lacrymogène, des canons à eau et des balles en caoutchouc ont été employées, provoquant au moins 50 blessés. Plusieurs dizaines de manifestants ont été arrêtés et certains ont subi des mauvais traitements.

« Les autorités sri-lankaises doivent cesser d’arrêter les gens arbitrairement »

Le 19 avril, la police a également ouvert le feu contre un grand groupe de manifestants à Rambukkana, qui s’étaient rassemblés pour protester contre les pénuries de carburants et la montée des prix. Une personne est morte de blessures par balles et 12 autres ont été blessées. Le 5 mai, la police a utilisé du gaz lacrymogène contre des étudiants qui auraient tenté d’envahir le Parlement, et 12 individus ont été arrêtés.

« Les autorités sri-lankaises doivent cesser d’arrêter les gens arbitrairement juste parce qu’ils exercent leur droit à la liberté d’expression et de rassemblement pacifique, et il faut que tous ceux qui sont détenus puissent consulter un avocat et qu’ils soient traités convenablement en détention. Le gouvernement doit aussi enquêter immédiatement et de manière impartiale sur tout usage excessif de la force et sur les exécutions extrajudiciaires commises par les forces de l’ordre, et rendre publiques les conclusions des enquêtes afin de poursuivre les coupables en justice », a demandé Josef Benedict, chercheur de Civicus pour l’Asie.

L’organisation a également dénoncé une attaque en tout impunité contre des manifestants rassemblés pacifiquement devant le palais présidentiel de Colombo, le 9 mai dernier. La foule d’attaquants s’en est aussi pris à un site de manifestation connu sous le nom de « GotaGoGama ». Les chaînes de télévision locales ont montré des attaques contre des personnes désarmées à l’aide de barres métalliques, et des biens publics endommagés, sans l’intervention de la police.

L’espace civil au Sri Lanka actuellement classé comme « obstrué »

Les journalistes ont aussi été victimes de cette répression selon Civicus. Durant une manifestation devant la résidence privée du président, en mars, huit d’entre eux auraient été attaqués par les forces de l’ordre. Six journalistes ont été accusés de violer la section 120 du Code pénal, qui pénalise le fait d’« exciter des sentiments de mécontentement » du public contre le président ou le gouvernement.

Ces violations commises contre les manifestants font partie d’une série d’attaques des libertés civiles sous l’administration Rajapaksa, que les ONG ont suivies au cours des dernières années. Il y a eu des tentatives systématiques des autorités d’empêcher ou de troubler des manifestations et d’arrêter des manifestants pacifiques, en particulier dans le nord et l’est du pays, notamment contre les familles des victimes tamoules durant la Guerre civile (1983-2009). La loi du Sri Lanka sur la prévention du terrorisme a été détournée de nombreuses fois pour permettre des arrestations arbitraires, et les autorités ont également freiné ou attaqué violemment les efforts visant à poursuivre les coupables de crimes de guerre.

L’espace civil au Sri Lanka est actuellement classé par Civicus Monitor comme « obstrué » – contre des pays comme l’Inde où il est classé comme « réprimé », ou comme la Chine où il est classé comme « fermé ». En Asie, il est considéré comme « rétréci » ou « ouvert » seulement dans des pays comme la Corée du Sud, le Japon et Taïwan. Le classement du Sri Lanka est similaire à celui donné à des pays où l’espace civil est fortement contesté par le pouvoir, en imposant une combination de restrictions légales et pratiques à la pleine jouissance des libertés fondamentales.

(Avec Ucanews)