Eglises d'Asie – Bangladesh
L’Église bangladaise contribue au renouveau des traditions populaires locales
Publié le 23/10/2019

Chute et renouveau
Le Pala Gaan est une tradition populaire des régions rurales bangladaises. Il serait dérivé du Sankirtan, une ancienne tradition religieuse hindoue mêlant narration, musique et danses, afin de conter des récits spirituels et de véhiculer des idées religieuses. Durant des siècles, le Pala Gaan s’est surtout transmis comme une tradition orale, mais certaines équipes ont écrit des textes et des scénarios afin de mieux le préserver. Au Bangladesh, majoritairement musulman, près de la moitié des quelque 600 000 chrétiens, pour la plupart catholiques, viennent de la communauté bengalie, le groupe ethnique majoritaire dans le pays. La plupart sont des descendants d’hindous de castes inférieures qui se sont convertis au christianisme il y a plusieurs siècles. D’autres chrétiens appartiennent à plusieurs dizaines d’autres groupes ethniques ; les chrétiens bengalis et indigènes ont maintenu beaucoup de leurs traditions culturelles, même après leur conversion. À la lumière des enseignements du concile Vatican II (1962-1965), l’Église catholique locale a essayé d’inculturer la liturgie en intégrant les musiques et danses traditionnelles, et en encourageant les traditions religieuses populaires comme le Pala Gaan, la comédie musicale du Jishu Nila (Vie de Jésus), celle du Koshter Gaan (Chant du serviteur souffrant, durant le carême), ou encore le Thakurer Geet (Ballade de saint Antoine de Padoue). Face à l’influence des médias, aux divertissements modernes et à l’agitation de la vie urbaine, ces traditions ont tendance à attirer moins de monde, même si certains groupes persévèrent en organisant des représentations occasionnelles, avec le soutien de l’Église locale.
Éveil des consciences
Le père Pradeep Perez, S. J., a étudié les traditions populaires et religieuses locales pendant des années. Actuellement, il poursuit un doctorat sur les traditions populaires dont celle du Thakurer Geet (Ballade de saint Antoine de Padoue), toujours populaire parmi les chrétiens bengalis de l’archidiocèse de Dacca et du diocèse de Rajshahi. Le père Pradeep est convaincu de l’importance de préserver ces traditions. « Les formes modernes de divertissement peuvent être plaisantes, cela ne remplace pas l’interaction humaine », poursuit-il. « Par exemple, le Pala Gaan peut soutenir et approfondir la vie spirituelle des gens et contribuer à façonner notre identité en tant que chrétiens bangladais », explique-t-il. « Ces temps-ci, nous avons souvent constaté un éveil des consciences à propos des pratiques culturelles et religieuses, ce qui montre que beaucoup de gens sont encore attirés par la culture traditionnelle. Nous devons la défendre. » En 2015, le prêtre a lancé un concours de Thakurer Geet entre 18 équipes, ce qui a permis de mettre en lumière la richesse de cette tradition locale, ses défis et les besoins de soutiens. « La beauté de ces dévotions populaire vient en partie de leur tradition orale, mais le temps est venu de mettre les choses par écrit pour qu’elles ne disparaissent pas un jour », souligne le père Pradeep. « Les gens font perdurer ces traditions par amour, et il faut se demander comment ils veulent les transmettre aux générations futures. » Pour lui, les initiatives du diocèse de Barishal sont une bonne avancée, et cela peut être reproduit ailleurs dans le pays. « Les traditions populaires doivent avoir une vraie place dans l’Église, elles doivent être soutenues et disposer d’aides financières. L’Église peut réfléchir à la création d’un fonds qui peut permettre de les soutenir en continu. » À Barishal, Jacob Baroi estime qu’il a de bonnes chances de contribuer à raviver le Pala Gaan dans la région. « Même si c’est venu tardivement, je salue les efforts de l’Église locale pour défendre le Pala Gaan », se réjouit-il. « Maintenant, je rêve de former une bonne équipe, qui jouera non seulement localement mais qui aidera également à répandre la tradition Pala Gaan dans le pays. »
(Avec Ucanews, Dacca)
CRÉDITS
Stephan Uttom / Ucanews
