Eglises d'Asie – Bangladesh
L’Église bangladaise crée une nouvelle équipe contre les violences à l’égard des femmes
Publié le 01/04/2023
L’Église catholique au Bangladesh est en train de former une équipe spécialisée contre les abus de plus en plus nombreux subis par les femmes bangladaises, que ce soit chez elles, sur leur lieu de travail ou ailleurs. Les évêques du pays ont officiellement approuvé la création de ce groupe qui dépendra du Bureau des femmes de la Conférence épiscopale bangladaise, explique Rita Roselin Costa, responsable du bureau.
« Nous avons décidé de former cette équipe afin de lancer différentes actions, y compris sur le plan juridique, le plus tôt possible en cas de signalement de toute sorte d’abus », confie Rita, interrogé le 29 mars. Elle ajoute que son équipe devrait débuter son travail cette année, même si aucune date officielle n’a été annoncée. L’équipe, qui sera également en contact avec des représentants dans l’ensemble des huit diocèses bangladais, espère couvrir toutes les confessions chrétiennes présentes dans le pays.
La veille, le 28 mars, le bureau national d’Oxfam International (une confédération d’organisations caritatives indépendantes) a publié un rapport affirmant que la majorité des femmes bangladaises sont exposées à différentes formes d’abus sur leur lieu de travail. Près de 72 % d’entre elles sont victimes de violences psychologiques, 74 % de violences verbales, 31 % de violences physiques et 6 % de violences sexuelles, selon le rapport publié mardi dernier à Dacca.
Par ailleurs, 81 % des répondantes à l’étude ont affirmé travailler dans des conditions précaires, et seulement 1 % d’entre elles ont eu des congés maternité payés. De plus, 76 % n’ont reçu aucun soutien de leur employeur pour leur sécurité sociale. L’étude a été menée auprès de 1 507 répondantes de différentes régions du pays.
« La plupart de mes collègues disent avoir été maltraitées »
Parmi elles, deux ouvrières catholiques décrivent des traitements abusifs subis sur leur lieu de travail. Nipa Biswas, une femme de ménage de Dacca, explique qu’elle travaille dans la région depuis cinq ans. Elle n’a pas d’emploi permanent mais travaille huit heures par jour dans près d’une vingtaine de maisons par mois. « La plupart de mes collègues disent avoir été maltraitées, que ce soit des gifles pour de petites erreurs ou du harcèlement sexuel. Comme je ne travaille de façon permanente dans aucune maison, je peux facilement changer de travail si la famille est abusive », confie cette mère de deux enfants.
Sabita Das, 35 ans, catholique et banquière dans la ville de Khulna, dans le sud du Bangladesh, évoque également des « propositions indécentes » de la part de supérieurs, en précisant qu’elle n’a pas osé les signaler par crainte de perdre son poste. « Je n’ai jamais eu de problème et je sais me défendre. Mais je n’oserai aucune poursuite judiciaire », ajoute-t-elle. Selon elle, celles qui occupent des emplois peu rémunérés comme les employées du textile sont plus exposées à cause de leur situation socio-économique défavorisée.
Selon les rapports, les femmes restent particulièrement vulnérables aux abus dans un pays comme le Bangladesh, majoritairement musulman et conservateur. En 2021, l’OMS a classé le pays en 4e position avec les Îles Salomon, parmi 61 pays notés selon la prévalence de la violence sexuelle infligée par un partenaire. L’organisation, qui s’est basée sur des chiffres entre 2000 et 2018, a également affirmé que 50 % des Bangladaises ont été confrontées à des abus physiques et psychologiques. Les trois pays les plus mal notés sont le Kiribati (53 %), les Fidji (52 %) et la Nouvelle guinée (51 %).
Rita Costa explique qu’au Bangladesh, à cause de la domination masculine, la crainte de perdre son emploi et de trop longues procédures judiciaires, les abus ne sont généralement pas signalés, que ce soit au domicile ou sur le lieu de travail. « Les victimes ne disent rien s’il n’y a aucune garantie de poursuite contre l’agresseur et si elles risquent de perdre leur travail pour avoir porté plainte », ajoute-t-elle.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Stephan Uttom / Ucanews