Eglises d'Asie

L’Église pakistanaise appelle à l’unité nationale face à la crise économique

Publié le 15/06/2023




Le 9 juin, Mgr Joseph Arshad, président de la Conférence épiscopale pakistanaise, a publié un communiqué de presse au nom de la communauté catholique pakistanaise en appelant tous les dirigeants du pays d’Asie du Sud à « former une seule nation » face aux défis économiques actuels. Selon une enquête économique nationale publiée le 8 juin par le ministre des Finances, Ishaq Dar, le taux d’inflation a atteint 36,4 et 37,97 % en avril et en mai 2023 au Pakistan, soit les niveaux les plus élevés en Asie.

Un marché dans la ville de Naran, dans la province de Khyber Pakhtunkhwa, une région montagneuse au nord du Pakistan (2021).

Les responsables catholiques pakistanais ont appelé les autorités locales à s’unir pour sauver l’économie nationale, en difficulté face à des niveaux d’inflation records depuis deux mois – les plus élevés en Asie. Dans ce contexte, Mgr Joseph Arshad, président de la Conférence épiscopale pakistanaise, a appelé tous les dirigeants du pays d’Asie du Sud à « œuvrer pour le progrès et la prospérité du pays, sans rechercher d’avantages politiques personnels ».

Le 8 juin, une enquête économique annuelle nationale a révélé que la croissance du PIB entre 2022 et 2023 a été de seulement 0,3 %, et que les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et des exportations ont été fortement affectés par l’inflation élevée et les ralentissements provoqués par les inondations dévastatrices de l’an dernier.

« Il faut faire face aux défis économiques actuels en formant une seule nation. Il est urgent d’assurer nos besoins fondamentaux. Un programme fort pour relancer les valeurs morales dans la société est indispensable pour cela », a ajouté Mgr Arshad dans un communiqué de presse, publié le 9 juin.

Selon l’enquête publiée le 8 juin, qui a été présentée par Ishaq Dar, le ministre des Finances, le taux d’inflation moyen enregistré entre 2022 et mai 2023 est de 29,2 %. En avril et en mai 2023, le taux d’inflation national a atteint 36,4 et 37,97 % selon le Bureau national des statistiques, et le pays risque aussi de se retrouver en défaut de paiement sur sa dette souveraine.

L’inflation nationale a été aggravée par la hausse des prix des marchandises à l’échelle mondiale, par la perturbation des chaînes d’approvisionnement, par la dépréciation de la monnaie et par la crise politique actuelle au Pakistan. Par ailleurs, le pays n’est pas parvenu à décrocher des prêts indispensables auprès du Fonds monétaire international (FMI).

« Les classes moyennes souffrent beaucoup »

Le père Mario Rodrigues, recteur du lycée Saint-Patrick de Karachi, la plus grande ville du pays, explique que l’inflation a surtout affecté les plus pauvres, en particulier la communauté chrétienne. « Les classes moyennes souffrent beaucoup. Pour nous, l’inflation est vraiment en train de nous tuer », assure-t-il.

Le pasteur I. B. Rocky, de la colonie de Bahar (un bidonville chrétien dans les environs de Lahore, situé près d’une sortie d’égout et qui compte près de 80 églises et 50 000 chrétiens), craint quant à lui de rentrer le soir sans rien pouvoir acheter à manger en raison des prix exorbitants des produits alimentaires. « Pour avoir du bon riz, il faut aller aux mariages ou aux enterrements », remarque-t-il.

Le coût de la vie rend la vie impossible aux habitants du quartier, pour qui le blé et le riz deviennent de plus en plus chers, alerte le pasteur. Selon I. B. Rocky, les prix sont incontrôlés et un sac de farine de la même marque et de la même qualité peut être vendu à des prix bien différents selon les boutiques.

« Nous voulons du pain, pas des armes »

L’été dernier, les inondations ont submergé près d’un tiers du pays, en causant plus de 1 700 victimes et en affectant près de 33 millions d’habitants, dont presque 8 millions de déplacés. Le gouvernement, dans ce contexte et malgré les difficultés financières, a annoncé un budget de près de 50,5 milliards de dollars US le 9 juin dernier, avec une hausse de salaire spectaculaire pour les fonctionnaires et une augmentation de 16 % du budget défense.

« Nous voulons des ‘rotis’ [des pains sans levain], pas des armes. Les employés du gouvernement ne représentent que 20 % de la population. Les salaires n’ont pas augmenté pour le reste d’entre nous », signale I. B. Rocky, dont la réaction est largement partagée par la population locale. Le gouvernement actuel, dirigé par Shehbaz Sharif, est arrivé au pouvoir en avril 2022 quand le Premier ministre Imran Khan a été chassé par une motion de censure, votée à son encontre par l’Assemblée nationale.

(Avec Ucanews)