Eglises d'Asie – Chine
Les autorités chinoises de Mongolie intérieure ciblent un livre consacré à l’histoire mongole
Publié le 06/09/2023
Alors que le pape François a salué la grande histoire du peuple mongol durant son voyage historique à Oulan-Bator, à quelques centaines de kilomètres de là, de l’autre côté de la frontière entre la Mongolie et la Chine, la même histoire a été supprimée des librairies. Les autorités de la région autonome chinoise de Mongolie intérieure, où un cinquième de la population appartient à l’ethnie mongole, ont ordonné le retrait d’un livre publié en 2004 intitulé Une histoire générale des Mongols (« A General History of the Mongols ») en le décrivant comme un exemple de « nihilisme historique ».
À Hong-Kong, le journal pro-Pékin Sing Tao a rapporté la décision en citant une directive annoncée le 25 août par la branche de Mongolie intérieure de l’Association chinoise de distribution de livres et de périodiques, qui dépend du gouvernement. La mesure est surprenante étant donné que le livre, qui a été publié par des chercheurs du Département d’études mongoles de l’Institut d’éducation de Mongolie intérieure (Inner Mongolia Institute of Education), présentait déjà la culture mongole dans une perspective nationaliste chinoise.
« Beaucoup d’universitaires et de ressortissants mongols n’aiment pas ce livre [Une histoire générale des Mongols] parce qu’il décrit les Mongols comme un peuple de Chine », explique Yang Haiying, un professeur de l’université Shizuoka au Japon, interrogé par Radio Free Asia. Mais dans l’esprit de la politique de sinisation du président Xi Jinping, aujourd’hui, toute mention d’une identité mongole distincte va déjà trop loin selon les perspectives du Parti communiste chinois.
Les catholiques chinois appelés à « être de bons chrétiens et de bons citoyens »
En fait, dans les régions périphériques chinoises, les Ouïghours de Xinjiang ne sont pas les seuls à avoir des revendications basées sur une identité séparée. Ceci explique pourquoi le gouvernement a empêché les évêques catholiques chinois de se rendre à Oulan-Bator pour la visite du pape François. Des petits groupes de catholiques chinois sont malgré tout parvenus à venir en Mongolie pour l’occasion avec un visa touristique, afin de participer aux événements en agitant des drapeaux de la République populaire de Chine.
Ce dimanche 3 septembre, à l’issue de la messe qui a été célébrée dans la capitale mongole, le pape François a appelé les catholiques chinois à « être de bons chrétiens et de bons citoyens ». Mais comme on pouvait s’y attendre, ceci n’a pas été rapporté par les médias officiels chinois. Il est à noter que Xinde, le principal site internet catholique de Chine continentale, a fait de même. Xinde informe pourtant régulièrement ses lecteurs sur le magistère du pape.
« J’ai beaucoup de respect pour le peuple chinois »
Ainsi, le site a bien couvert la messe célébrée par le Saint-Père à Oulan-Bator, en citant le site web Vatican News. Toutefois, aucune référence n’a été faite du message du pape au peuple chinois ni aucune allusion de la présence du cardinal John Tong, évêque émérite de Hong-Kong, et de Mgr Stephen Chow, évêque de Hong-Kong, aux côtés du Saint-Père. Rien n’indique que Xinde refuserait de rapporter de telles informations, s’il n’y avait pas une ligne rouge qu’il ne peut franchir. Pourtant, les paroles du pape ont déjà fait leur chemin auprès des catholiques chinois via d’autres canaux.
Dans un point presse organisé le 4 septembre, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de Chine n’a pas évoqué les remarques imprévues du pape à Oulan-Bator ; à la place, le ministère s’est contenté de citer ce qui avait déjà été déclaré quand le pape avait envoyé un message à Xi Jinping, en entrant dans l’espace aérien chinois vers la Mongolie. Le porte-parole a cependant réitéré le désir de Pékin de « renforcer la confiance mutuelle » avec le Vatican.
Durant son vol de retour, le pape François a à nouveau souligné la nécessité de maintenir et approfondir le dialogue. « Je crois que nous devons aller plus loin, pour mieux se comprendre mutuellement », a-t-il expliqué. « Les citoyens chinois ne devraient pas penser que l’Église n’accepte pas leur culture et leurs valeurs, et que l’Église est dépendante d’une autre puissance étrangère », a-t-il ajouté. « La commission présidée par le cardinal Parolin progresse sur ce chemin d’amitié, elle fait du bon travail ; il y a aussi du bon travail du côté chinois. En un mot, les rapports se développent. J’ai beaucoup de respect pour le peuple chinois. »
(Avec Asianews)