Eglises d'Asie

Les catholiques malaisiens confrontés à un manque de place dans les cimetières chrétiens

Publié le 24/05/2023




« Je savais que cela arriverait il y a 16 ans », signale Francis Mascrinhos en parlant du manque de places dans les cimetières chrétiens en Malaisie. Face à cette situation, seuls les columbariums hébergeant les urnes funéraires restent disponibles et de nombreux catholiques choisissent la crémation. Francis, un catholique malaisien à la tête d’une société de pompes funèbres dans l’archidiocèse de Kuala Lumpur, explique que certains fidèles parcourent jusqu’à 40 km pour trouver de la place dans une autre paroisse.

Un cimetière musulman à Malacca, en Malaisie (janvier 2014). L’Église en Malaisie est confrontée à un manque de places dans les cimetières chrétiens du pays.

Durant les années 1980 et 1990, de vastes projets immobiliers sont apparus dans l’État de Selangor, près de Kuala Lumpur, la capitale malaisienne. À l’époque, le gouvernement local a imposé à chaque projet d’allouer un terrain pour un cimetière. Les promoteurs ont toutefois réussi à obtenir des autorités que les règles soient assouplies, en soutenant qu’un cimetière au milieu d’un quartier en plein développement serait un « mauvais feng-shui » (porte-malheur) et que personne ne voudrait acheter une maison près d’un cimetière.

Une décennie plus tard, les gens ont commencé à en ressentir les effets, en particulier les catholiques. Les cimetières existant sur les terrains paroissiaux étaient déjà surchargés. Beaucoup de paroisses n’avaient pas de cimetière et les cimetières publics étaient déjà complets. Le problème semblait cependant limité car il y avait des cimetières privés. Mais ceux-ci se remplissaient vite également, et ceux qui étaient disponibles étaient exorbitants.

« Il y a vingt à trente ans, ils ont interpellé l’Église sur la question »

Durant les années 1990, l’Église luthérienne en Malaisie a acheté des terrains privés face à cette situation, afin de fournir des emplacements abordables pour les enterrements et les columbariums (où sont placées les urnes funéraires contenant les cendres des défunts). Ces emplacements étaient réservés aux paroissiens luthériens à l’origine, mais ils ont été ensuite ouverts à d’autres face à la demande importante. Les catholiques se sont hâtés d’acheter des terrains et ceux-ci ont été rapidement remplis. En fin de compte, seuls les columbariums restaient disponibles et de nombreux catholiques ont choisi la crémation.

Selon Francis J. Mascrinhos, l’Église catholique en Malaisie aurait dû réfléchir à des solutions il y a des années, à l’instar des luthériens. Son oncle P. C. Archibald et son ami Norman Dragon, qui possédaient une des premières entreprises de pompes funèbres, ont demandé à l’archidiocèse de Kuala Lumpur de se pencher sur le problème. « Il y a vingt à trente ans, ils ont interpellé l’Église sur la question et ils en ont parlé dans la presse », explique Francis. Ce dernier a pris la suite à la tête des pompes funèbres en 2011. Deux ans plus tard, il a écrit au ministre en chef de l’État pour demander d’allouer un terrain pour un cimetière chrétien. Quatre ans plus tard, l’État a accepté d’accorder un terrain à la Fédération chrétienne de Malaisie (CFM).

« Je savais que cela arriverait il y a 16 ans »

Il y a également le problème des funérariums. On compte près de 16 églises catholiques à Kuala Lumpur et dans les villes voisines de Petaling Jaya, Puchong, Shah Alam et Subang Jaya, pour environ 11 funérariums. Ces paroisses comptent au total environ 300 000 catholiques – une estimation donnée par un prêtre local. Les funérariums sont en permanence encombrés, et certains parcourent jusqu’à 40 km pour trouver de la place dans une autre paroisse. « Il y a d’autres options à part les funérariums chrétiens, mais les familles veulent un endroit situé dans les locaux paroissiaux, un lieu sacré situé près de l’église. Ainsi, c’est plus facile pour eux de rendre un dernier hommage à leurs proches et de prier pour les âmes des défunts », estime Francis Mascrinhos.

« Je savais que cela arriverait il y a 16 ans », signale-t-il en parlant du manque de places. Il attribue cela au fait que de nombreux propriétaires immobiliers refusent que des veillées funèbres ou des funérailles soient organisées dans leurs locaux, car cela serait considéré comme « tabou ». Avant cela, des veillées pouvaient avoir lieu chez les gens. Pour Francis, l’Église locale doit être proactive et l’archidiocèse de Kuala Lumpur doit travailler avec les pompes funèbres catholiques afin de trouver une solution viable à long terme. « Nous avons le savoir-faire. Nous faisons cela depuis des années », assure-t-il.

Le père Christopher W. Soosaipillai, chargé de cette question au sein de l’archidiocèse de Kuala Lumpur, explique que l’Église locale travaille avec ses partenaires de la Fédération chrétienne de Malaisie (CFM) afin de trouver une solution durable et d’obtenir la meilleure situation possible auprès des autorités locales et fédérales. Il ajoute que la CFM est déjà en lien avec le gouvernement de l’État de Selangor pour la construction d’un cimetière. Selon lui, la fédération cherche également à rencontrer le gouvernement fédéral afin d’allouer plus de terrains aux chrétiens.

(Avec Ucanews)