Eglises d'Asie

Les dirigeants de l’Asean envisagent des négociations avec l’opposition birmane

Publié le 15/11/2022




Les neuf États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Asean), rassemblés à Phnom Penh, la capitale cambodgienne, du 10 au 13 novembre pour le sommet du bloc régional, ont publié un rapport sur la situation en Birmanie. À cette occasion, ils ont envisagé « d’autres approches » face à la crise dans le pays d’Asie du Sud-Est, dont d’éventuelles négociations avec l’opposition contre la junte. Certains y voient une nouvelle déclaration symbolique qui pourrait n’avoir que peu d’effets.

Des drapeaux des États membres de l’Asean, en 2018 à Hô-Chi-Minh-Ville.

Les neuf États membres de l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-Est) ont évoqué la possibilité d’ouvrir des négociations avec les leaders de l’opposition contre la junte birmane, responsable du coup d’État de février 2021. Le rapport en quinze points, dévoilé à l’occasion du sommet annuel des responsables du bloc régional, organisé du 10 au 13 novembre à Phnom Penh, la capitale cambodgienne, indique que « l’Asean examinera la possibilité d’explorer d’autres approches qui pourrait permettre de soutenir l’application du consensus en cinq points [ndlr : décidé en avril 2021 sur la situation en Birmanie lors d’un sommet précédent de l’Asean à Jakarta] ».

Pour les diplomates des pays membres, cela permettrait d’envisager des pourparlers avec le Gouvernement d’unité nationale (NUG), représentant l’opposition birmane en exil, et avec les Forces de défense populaires insurgées, qui poursuivent leur mouvement de résistance armée. La majeure partie du nouveau document réaffirme les déclarations précédentes de la junte sur la question, c’est-à-dire en condamnant une nouvelle fois la violence et en appelant toutes les parties concernées à respecter le consensus en cinq points. Cela dit, selon le document, les diplomates de l’Asean soulignent que « d’autres approches » pourraient permettre à l’Indonésie d’agir plus fermement contre la junte.

« La Birmanie proteste vigoureusement et condamne les tentatives des États membres de l’Asean d’entrer en contact avec ces organisations criminelles et terroristes, par n’importe quel moyen ou sous n’importe quelle forme », a déclaré le ministère des Affaires étrangères birman en réaction au rapport de l’Asean.

Alors que le Cambodge siège cette année à la présidence du bloc régional, le Premier ministre Hun Sen a déjà tenté en vain de négocier avec le chef de la junte Min Aung Hlaing. Par conséquent, le dirigeant cambodgien s’est retrouvé embarrassé quand le régime birman a refusé de libérer de prison comme promis l’Australien Sean Turnell – ancien conseiller d’Aung San Suu Kyi.

Une menace pour la paix et la sécurité dans la région

Les tensions montent toujours alors que le chef de la junte et ses généraux continuent d’ignorer le consensus de l’Asean (qui impose de mettre fin aux violences, d’entamer un dialogue constructif entre toutes les parties, de permettre une médiation via la présidence de l’Asean, d’autoriser l’aide humanitaire et d’ouvrir des négociations via l’envoyé spécial de l’organisation régionale en Birmanie).

Malgré les engagements de la junte qui a signé le consensus, quatre militants prodémocratie ont été exécutés le 25 juillet dernier, dont un ancien membre du parlement, et ce malgré les appels de Hun Sen et seulement une semaine avant une rencontre des ministres des Affaires étrangères de l’Asean (le 3 août 2022 à Phnom Penh).

Par ailleurs, Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, a appelé la junte à libérer tous les prisonniers politiques et à mettre fin aux violences, face à une situation qui reste « critique et fragile ». « La situation en Birmanie est un cauchemar sans fin pour les habitants et une menace pour la paix et la sécurité dans la région », a confié le secrétaire de l’Onu aux journalistes ; au moins 2 100 civils ont été tués et plus de 14 000 personnes ont été arrêtées depuis que le gouvernement élu d’Aung San Suu Kyi a été renversé l’an dernier.

Selon Charles Santiago, de l’association des Parlementaires de l’Asean pour les droits de l’homme, la nouvelle déclaration du bloc régional sur la Birmanie est « profondément décevante ». Il souligne qu’aucune amélioration n’a été apportée au consensus en cinq points, qu’il considère comme « extrêmement inefficace ».

« Alors que l’armée birmane continue de commettre toutes sortes d’atrocités afin de prendre le contrôle du pays, en plongeant la Birmanie dans le chaos et en ruinant son économie, l’Asean s’avère incapable de réagir à la crise d’une manière réellement percutante », s’est-il indigné. « Le temps presse pour des milliers de Birmans qui résistent au régime militaire et qui souffrent sous la junte meurtrière, et l’Asean ne fait rien d’autre que faire des déclarations tièdes et des gestes symboliques. »

(Avec Ucanews)