Eglises d'Asie

Les hindous bangladais célèbrent Durga Puja malgré des craintes d’attaques contre la minorité

Publié le 07/10/2022




Alors que les hindous bangladais ont célébré la fête de Durga Puja, le plus grand festival annuel de la minorité religieuse, les diocèses catholiques du pays ont salué les communautés locales et ont fait part de leur soutien face aux menaces d’attaques extrémistes. « Les hindous sont toujours dans la peur à cause des trop nombreuses attaques », explique le père Antoine Sen, responsable de la Commission Justice et Paix du diocèse de Dinajpur. Cette année, 22 sites religieux hindous ont été attaqués au Bangladesh selon le Conseil national Puja.

En octobre 2012 à Cox’s Bazar durant le festival Durga Puja (photo d’archives).

Les minorités hindoues au Bangladesh ont célébré leur plus grande fête religieuse de l’année, Durga Puja, malgré des craintes d’attaques de groupes islamistes dans le pays. « Même si le gouvernement promet tous les ans une sécurité renforcée, il y a déjà eu plusieurs attaques dans le passé. C’est pourquoi nous étions à nouveau dans la crainte cette année, parce que nous ne savions pas s’il y aurait une attaque cette fois-ci », explique Shikhon Sarker Shipon, secrétaire du Conseil des célébrations Puja du Bangladesh.

« Nous savons comment l’extrémisme religieux a augmenté dans le pays. Nous devons demander une protection policière durant les cérémonies, sinon nous ne pourrions pas assurer la sécurité. Si le gouvernement n’est pas plus strict que cela, ce pays finira par être contrôlé par les fondamentalistes », a-t-il ajouté.

La fête de Durga Puja, dédiée à la divinité hindoue Durga, célèbre sa victoire sur le démon Mahishasura, qui évoque la victoire du bien sur le mal. Les dix jours de festivités ont lieu durant « Ashin », le septième mois du calendrier hindou, qui tombe en septembre-octobre. La fête prend fin avec le jour de « Vijaya Dashami » – l’immersion des idoles de Puja et d’autres divinités dans les rivières après de grandes processions –, qui symbolise le départ de Durga et son union avec le dieu hindou Shiva.

Le festival est particulièrement célébré par les hindous bengalis et dans les États de l’est indien, dont le Bengal occidental et l’Assam. Cette année, on comptait près de 32 168 « Mandaps » (des tentes décorées et installées dans tout le pays) selon le Conseil national Puja. Le 3 octobre dernier, Khurshid Hossain, chef d’une unité d’élite de la police locale, a déclaré aux journalistes que des mesures avaient été prises pour la sécurité du festival. « Nous faisons de la surveillance en ligne. Les services de renseignement sont devenus plus efficaces que jamais », a-t-il ajouté.

« C’est vrai que nous ne sommes pas sereins en célébrant Durga Puja »

Des responsables hindous dans tout le pays reconnaissent que des mesures strictes ont été prises afin d’éviter des attaques éventuelles et tout autre incident. L’an dernier en effet, une série d’attaques contre des « Puja Mandaps » ont eu lieu après la profanation d’un coran au Bangladesh, faisant au moins cinq victimes. Cette année, outre la police, des volontaires hindous dans les régions urbaines et rurales ont également assuré la protection des sites du festival de jour comme de nuit.

Cependant, un hindou du village de Sahapara, à Lohagarh dans le district de Narail, explique qu’il n’était pas serein cette année durant les festivités. Son village a subi une attaque islamiste en juillet dernier après une publication sur Facebook qui aurait « heurté » les sentiments religieux des musulmans. Un temple ainsi que plusieurs maisons et boutiques appartenant à des hindous ont été vandalisés et incendiés, forçant plusieurs centaines d’habitants à fuir leur domicile.

« C’est vrai que nous ne sommes pas tranquilles en célébrant Durga Puja, il y a toujours une crainte d’une éventuelle attaque alors que nous devrions fêter notre plus grand festival religieux avec plaisir », confie Suman Pal, un villageois hindou de 25 ans. Il ajoute qu’avec une quinzaine de jeunes, ils ont participé aux services de sécurité de nuit. « Nous appelons le gouvernement du Bangladesh à poursuivre les coupables d’attaques, ainsi les autres n’oseront pas s’attaquer aux minorités », ajoute-t-il.

Soutien des diocèses bangladais

Cette année, 22 sites religieux hindous ont été attaqués dans le pays, et sept membres de la minorité ont été poursuivis en justice dans le cadre d’une loi sur la cybersécurité, après avoir été accusés d’offense religieuse contre l’islam, selon le Conseil Puja du Bangladesh. Par ailleurs, le groupe de conseil juridique Ain o Salish Kendra, qui assure la protection des droits des minorités dans le pays, a enregistré 3 600 attaques contre les minorités depuis 2013, dont une majorité visant la communauté hindoue.

Selon le recensement national de 2022, les hindous représentent un peu moins de 9 % de la population bangladaise sur plus de 165 millions d’habitants. Au cours des 40 dernières années, ce chiffre est passé de 13,5 % à 8,5 % selon le Conseil pour l’unité hindoue, bouddhiste et chrétienne du Bangladesh. Le groupe estime que l’augmentation des attaques islamistes et l’émigration des minorités hindoues expliquent cette évolution.

Durant le festival Durga Puja, les diocèses catholiques bangladais ont salué les communautés hindoues et exprimé leur soutien face aux menaces fondamentalistes. Le père Antoine Sen, responsable de la Commission Justice et Paix du diocèse de Dinajpur, souligne que « les hindous sont toujours dans la peur à cause de trop nombreuses attaques, notamment cette année ». « J’attribuerai la responsabilité de cette situation avant tout au gouvernement, puis aux extrémistes religieux. Si les autorités avaient renforcé la justice après les différentes attaques qui ont eu lieu, de tels incidents ne se seraient pas reproduits », poursuit le prêtre.

(Avec Ucanews)