Eglises d'Asie

Manifestations prodémocratie : les tortures policières toujours d’actualité malgré les engagements du gouvernement

Publié le 09/11/2021




Plusieurs organisations, dont Human Rights Watch, ont dénoncé des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements commis par la police thaïlandaise, après plusieurs affaires concernant des jeunes manifestants prodémocratie, détenus et brutalisés par des policiers. Les autorités locales ont notamment été accusées d’un usage excessif de la force lors des manifestations, alors que de nombreux jeunes thaïlandais demandent des réformes politiques dans un pays dirigé par un gouvernement proche de l’armée et remplaçant le régime militaire au pouvoir depuis 2014.

Plusieurs organisations accusent le gouvernement thaïlandais d’avoir échoué à mettre fin aux tortures policières.

La semaine dernière, deux jeunes manifestants thaïlandais ont rapporté des actes de tortures subis durant des interrogatoires, commis par des policiers après une manifestation organisée devant un commissariat de Din Daeng, dans le district de Bangkok. La zone a été le théâtre de nombres tensions entre les jeunes manifestants et la police ces derniers mois. Le 29 octobre dernier, Attasith Nussa, 35 ans, était avec une foule rassemblée devant le commissariat, afin de demander à la police de libérer des militants prodémocratie détenus.

Attasith a été photographié la semaine dernière avec des bleus au visage et un œil blessé. Il a expliqué avoir été arrêté par la police, emmené dans une salle d’interrogatoire et torturé, en étant accusé d’avoir mis le feu à un sanctuaire situé à côté du commissariat. « Un policier m’a traîné vers un banc en bois, et il a cogné ma tête dessus à deux reprises », a-t-il confié à un site d’information thaïlandais, couvrant les questions liées aux violations des droits de l’homme dans le pays. « Il m’a répété ces questions à de nombreuses reprises. Puis il m’a frappé les côtes et l’estomac avec un bâton. Après cela, il m’a saisi au cou et il m’a étranglé, presque jusqu’à l’évanouissement. »

Selon lui, plusieurs policiers l’ont frappé et étranglé, en le battant pendant plus d’une heure pour le pousser à parler et à donner le mot de passe de son téléphone, avant de l’enfermer au commissariat avec d’autres manifestants. Weeraphap Wongsaman, un autre manifestant âgé de 18 ans, a raconté un sort similaire aux mains de plusieurs policiers, le même jour. « On m’a menotté les mains dans le dos. Ils m’ont placé sur une chaise dans une salle d’interrogation », a-t-il ajouté, en précisant qu’un policier lui a même dit qu’il avait de la chance qu’on ne lui tire pas dessus avant de le jeter dans une rivière.

Appels à créer un corps indépendant chargé de recevoir les plaintes

Plusieurs organisations affirment que le traitement des deux manifestants relève de pratiques de tortures et d’autres formes de mauvais traitements commis régulièrement par la police en Thaïlande, où les autorités locales semblent souvent agir au mépris des lois. En août, un jeune homme de 24 ans accusé de trafic de drogue a été torturé à mort dans un commissariat de la ville de Nakhon Sawan – des actes qui ont été filmés par des caméras de sécurité. Les images ont fuité sur Internet, alors que les policiers avaient tenté auparavant de faire passer sa mort comme le résultat d’une overdose de drogue.

Pour l’organisation Human Rights Watch, même si les deux militants prodémocratie qui ont témoigné de leur sort s’en sont sortis, leurs affirmations doivent être prises au sérieux. « Les récits d’Attasith et de Weeraphap montrent que le gouvernement thaïlandais n’a pas su respecter ses engagements répétés à mettre fin aux tortures policières », a dénoncé Brad Adams, directeur pour l’Asie d’Human Rights Watch, dans une déclaration publiée la semaine dernière. « Le fait que ces abus aient été commis non pas dans une prison provinciale éloignée mais à Bangkok prouve que la police ne craint pas d’être poursuivie », a souligné Brad Adams, en appelant les autorités thaïlandaises à « créer un corps indépendant et crédible chargé de recevoir les plaintes d’abus commis par la police, de mener des enquêtes et de poursuivre les coupables ».

Outre les actes de torture, c’est aussi la brutalité policière qui est dénoncée. Au cours de l’an dernier, alors que de nombreux jeunes thaïlandais sont descendus dans la rue pour demander des changements politiques, beaucoup de militants prodémocratie, y compris des femmes et des adolescents, ont été brutalisés par la police. Lors des manifestations, des policiers vêtus d’équipements antiémeutes ont souvent été accusés d’un usage excessif de la force afin de disperser les militants, demandant des réformes dans un pays dirigé par un gouvernement allié à l’armée et remplaçant la junte à l’origine du coup d’État de 2014.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

USchick (CC BY-SA 3.0)