Eglises d'Asie

Pas de veillée du 4 juin pour la 3e année consécutive, ni de messe en mémoire des victimes de Tiananmen

Publié le 04/06/2022




Ce samedi 4 juin à Hong-Kong, pour la troisième année consécutive, les autorités locales ont interdit l’organisation de la vigile annuelle en mémoire du massacre de la place Tiananmen, qui a fait plusieurs milliers de victimes en 1989 à Pékin lors d’un mouvement prodémocratie. Carrie Lam, cheffe de l’exécutif hongkongais (dont le mandat se termine le 30 juin) a rappelé clairement que tous les rassemblements publics doivent respecter les restrictions sanitaires et tout particulièrement la législation sur la sécurité nationale, adoptée il y a deux ans après les manifestations de 2019.

Le 4 juin 2018 lors de la vigile annuelle en mémoire des victimes du massacre de la place Tiananmen (4 juin 1989).

Pour la troisième année consécutive, les autorités hongkongaises ont interdit le maintien de la vigile annuelle au Victoria Park, organisée durant de nombreuses années en mémoire des victimes du massacre de la place Tiananmen. Le 4 juin 1989, le gouvernement a ordonné une répression violente contre des manifestants qui protestaient à Pékin pour la liberté et la démocratie ; plusieurs milliers de personnes ont été tuées, dont de nombreux étudiants et citoyens ordinaires.

Récemment, Carrie Lam, cheffe de l’exécutif hongkongais (dont le mandat de cinq ans s’achèvera le 30 juin), a rappelé clairement que tous les rassemblements publics doivent respecter les restrictions anti-Covid, et par-dessus tout, la loi sur la sécurité nationale adoptée il y a deux ans par le gouvernement central en vue de réprimer le mouvement prodémocratie. Comme l’a remarqué Hong Kong Free Press, Carrie Lam n’a pas précisé quelles parties de ces mesures empêchent les participants de marquer la vigile annuelle en mémoire de Tiananmen.

L’an dernier, beaucoup d’habitants de l’ancienne colonie britannique ont malgré tout tenu à commémorer le massacre de 1989 en plaçant des bougies à leurs fenêtres. D’autres se sont rassemblés par petits groupes dans plusieurs parties de la ville. Plusieurs centaines de personnes ont également défié l’interdiction en se rendant près de Victoria Park, à Causeway Bay, avant d’être refoulés par la police. Certains ont aussi placé des bougies allumées devant Victoria Park.

Ce samedi 4 juin, le parc sera à nouveau vide, les organisateurs des vigiles annuelles ayant tous été arrêtés ou poursuivis. L’Alliance de Hong-Kong pour le soutien des mouvements patriotiques démocratiques de Chine (une organisation prodémocratie créée le 21 mai 1989 à Hong-Kong, lors des manifestations et du massacre de la place Tiananmen à Pékin), qui était traditionnellement l’organisatrice des vigiles annuelles, a été dissoute en septembre dernier, la police locale ayant ciblé l’organisation dans le cadre de la loi sur la sécurité nationale.

Censure et répression dans le cadre de la loi sur la sécurité nationale

Pour la première fois, l’Église catholique locale ne célébrera pas de messe en mémoire des victimes de Tiananmen. Le diocèse de Hong-Kong craint que des commémorations officielles des événements de 1989 durant des célébrations puissent être ciblées par la législation sur la sécurité nationale. Il y a un an, des affiches sont apparues aux portes de sept églises catholiques, en avertissant les autorités catholiques locales de ne pas célébrer de messe pour Tiananmen.

Selon ceux qui ont affiché ces menaces, les célébrations en mémoire des événements de juin 1989 seraient contraires à la loi. Pourtant, une messe a malgré tout été célébrée dans chaque église l’an dernier. Dans une messe, le cardinal Joseph Zen, évêque émérite de Hong-Kong, a évoqué les « frères et sœurs » qui ont sacrifié leur vie « pour notre démocratie et notre liberté ». Actuellement, le cardinal attend son procès (qui aura lieu en septembre) pour son rôle dans un fonds d’aide aux manifestants prodémocratie de 2019.

Toutefois, les chrétiens hongkongais n’ont pas tous écarté toute action ce samedi. Ainsi, dans une tentative de contourner l’interdiction, l’Église méthodiste Ward Memorial de Yau Ma Tei a organisé une prière spéciale mardi dernier en mémoire de Tiananmen. Tout comme en Chine continentale, les autorités hongkongaises ont commencé à prendre des mesures pour tenter de dissimuler toute référence physique ou virtuelle à ce qui s’est passé en 1989. Les échanges en ligne sont étroitement surveillés, tandis que les statues et œuvres d’art en référence aux événements ont été retirées des lieux publics.

Le plus célèbre exemple est celui du retrait du « pilier de la honte » (Pillar of Shame) de l’Université de Hong-Kong, qui est pourtant resté durant près de 25 ans sur le campus. Une réplique sera cependant inaugurée ce samedi 4 juin à Taïwan. Les autorités ont également fermé un musée dédié aux événements. Par ailleurs, les manuels scolaires ne font plus qu’une brève référence à ce qui s’est produit il y a 33 ans, et les enseignants évitent les discussions sur le sujet par crainte de représailles. Les ouvrages sur le massacre de Tiananmen ont aussi disparu des librairies, et la société d’audiovisuel public de Hong-Kong, RTHK, a supprimé toute image liée au sujet de ses archives, selon Nikkei Asia. En public, les habitants ne peuvent plus évoquer ce qui s’est passé qu’en parlant des « événements de 1989 ».

(Avec Asianews)