Eglises d'Asie – Pakistan
Les mesures de sécurité renforcées au Pakistan avant la Semaine sainte
Publié le 05/04/2023
La police pakistanaise a renforcé la sécurité autour des églises de la ville de Peshawar, dans le nord-ouest du pays, avant les fêtes de Pâques. Ces mesures ont été prises après la mort d’un balayeur chrétien de Peshawar, Kashif Masih, abattu par un homme non identifié le 1er avril, le dimanche des Rameaux, dans la capitale de la province de Khyber Pakhtunkhwa (voisine de l’Afghanistan).
« Notre foi reste forte même si pour nous, Pâques est annulé. Nous ne pouvons pas célébrer après cette mort violente », explique son frère, Naveed Masih. Une caméra de surveillance de l’église de l’Armée du Salut, une des quatre églises de l’enclave chrétienne de Peshawar, montre un homme à moto et masqué en train de tirer à trois reprises sur Kashif Masih, père de trois enfants.
Le père Tariq Mehmood, curé de l’église Saint-Jean-Vianney de Peshawar, confie que la célébration des fêtes chrétiennes sous « la menace des armes » est devenue une habitude. « Il y a des alertes de sécurité ininterrompues dans notre province. La police nous demande de prendre des précautions avant chaque rassemblement. Nous remercions les agences de sécurité pour leur coopération », assure le prêtre.
La sécurité doublée avant le dimanche des Rameaux
Au moins dix policiers sont habituellement placés autour de l’église, située sur un des axes principaux de la ville, durant les célébrations. Leur nombre a été doublé le dimanche des Rameaux, et 16 volontaires catholiques équipés de détecteurs de métaux ont contrôlé tous ceux qui entraient dans l’église. La police surveille l’enclave chrétienne de Peshawar afin d’éviter d’autres attaques contre les chrétiens de la ville, où les minorités religieuses sont souvent prises pour cible.
La mort de Kashif Masih est survenue un jour après l’assassinat d’un commerçant sikh, Dayal Singh, par un homme à deux-roues non identifié dans un autre quartier de Peshawar. Selon la police, Dayal Singh est mort le 31 mars dans sa boutique, qui vendait des produits à prix réduits afin d’aider les musulmans face à la crise économique durant le mois du Ramadan. Le 30 mars, un ophtalmologiste hindou, Birbal Genani, a été abattu par des attaquants inconnus dans la ville portuaire de Karachi. Son assistant a également été blessé par balles.
Les militants jihadistes poursuivent une série d’attaques au Pakistan depuis novembre 2022, quand les talibans pakistanais, liés aux talibans afghans qui ont repris le pouvoir dans le pays voisin, ont annulé un accord de cessez-le-feu avec le gouvernement pakistanais. Le groupe rebelle a décidé de mettre fin à l’accord quand l’armée a renforcé sa répression contre les talibans pakistanais dans la province de Khyber Pakhtunkhwa et dans d’autres régions du pays d’Asie du Sud.
La reprise de l’Afghanistan par les talibans en 2021, après la défaite des forces de l’Otan menées par les États-Unis, a poussé à l’action les talibans pakistanais, dont les responsables se cachent dans des régions frontalières accidentées du pays voisin.
« Les minorités religieuses sont des cibles faciles »
Les talibans pakistanais sont particulièrement présents à Peshawar, la sixième plus grande ville du Pakistan (plus de 2,3 millions d’habitants), où ils peuvent frapper facilement. En janvier, l’église protestante de Tous-les-Saints de Peshawar a célébré le premier anniversaire de la mort de son pasteur William Siraj, tué par un homme à moto. Le pasteur appartenait à l’Église du Pakistan, une union d’Églises protestantes, notamment méthodistes et anglicanes.
« Les terroristes sont plus que jamais déterminés à affaiblir l’État et à aggraver la situation », assure le pasteur Shahzad Murad, vicaire actuel de l’église de Tous-les-Saints. Il ajoute que les intentions de prière pour les progrès économiques et politiques sont devenues constantes dans toutes les églises catholiques et protestantes à Peshawar. « Les minorités religieuses sont des cibles faciles. Mais cela devient difficile. Dieu essuiera nos larmes », poursuit-il, en ajoutant que quatre sikhs ont également été tués l’an dernier.
Son église, qui a aussi été attaquée par deux kamikazes en 2013, a demandé aux volontaires de contrôler les foules de fidèles durant la Semaine sainte. L’attentat de 2013, considéré comme le pire subi par les chrétiens au Pakistan, a causé 70 morts et plus de 120 blessés.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Kamran Chaudhry / Ucanews