Eglises d'Asie – Birmanie
Plus de 5 000 réfugiés birmans affluent en Thaïlande pour échapper aux combats
Publié le 28/12/2021
Selon le gouverneur de la province de Tak, Somchai Kitcharoenrungroj, dans une déclaration du dimanche 26 décembre, « au moins 5 358 villageois en provenance de Birmanie ont traversé la rivière Moei pour trouver refuge sur le sol thaïlandais ». Il ajoute que « l’armée thaïlandaise a étendu l’aide humanitaire dans la région aux réfugiés birmans, qui sont arrivés en masse dans les districts de Mae Sot et Phop Phra, où les blessés sont soignés par des médecins ». Un geste inhabituel qui reflète la gravité de la situation de l’autre côté de la frontière.
Un responsable des Nations unies s’est déclaré « horrifié » après des « informations crédibles » selon lesquelles au moins 35 civils ont été tués le 24 décembre et leurs corps brûlés dans l’État Kayah au Myanmar, et a demandé au gouvernement d’ouvrir une enquête. L’organisation Save the Children a déclaré samedi que deux de ses employés avaient été « pris » dans l’incident et étaient portés disparus, ajoutant avoir « la confirmation que leur véhicule privé a été attaqué et incendié ». Des hommes, des femmes et des enfants figuraient parmi les victimes. Les médias locaux ont attribué l’attaque à la junte militaire.
« Je condamne ce grave incident et toutes les attaques contre des civils dans le pays », a déclaré Martin Griffiths, secrétaire général adjoint des Nations unies aux affaires humanitaires, dans un communiqué, appelant à « une enquête approfondie et transparente ».
Le Myanmar est le théâtre de violents confits armés depuis un coup d’État en février, et plus de 1 800 personnes ont été tuées lors de répression des mouvements contestataires par les forces de sécurité, selon un groupe de surveillance local.
Des « Forces de défense du peuple » (PDF) ont surgi dans tout le pays pour combattre la junte. Plusieurs provinces, aux frontières indiennes et thaïlandaises, ont glissé dans une sanglante guerre civile.
Samedi, des photos circulant largement sur les médias sociaux, montraient deux camions et une voiture incendiés sur une route du canton de Hpruso, dans l’État Kayah, avec une quarantaine de corps calcinés à l’intérieur, y compris des enfants. Selon des sources locales, la zone est à majorité chrétienne baptiste. Les minorités chrétiennes paient un tribut particulièrement lourd dans le combat contre la junte : dans les États Chin, Kachin et en pays Karen, elles sont en première ligne.
Un membre d’un groupe local de la PDF a déclaré que ses combattants avaient trouvé les véhicules brûlés samedi matin, après avoir reçu des témoignages selon lesquels l’armée birmane avait arrêté plusieurs camions à Hpruso. La veille, le vendredi, les combattants de la PDF avaient affronté l’armée birmane à proximité du village.
« Lorsque nous sommes allés vérifier dans la zone ce matin, nous avons trouvé des cadavres brûlés dans deux camions. Nous avons trouvé 27 cadavres », a-t-il déclaré à l’AFP sous couvert d’anonymat samedi.
« Nous avons trouvé 27 crânes », a déclaré un autre témoin. « Mais il y avait d’autres cadavres sur le camion, qui étaient trop abîmés, donc nous n’avons pas pu les compter. »
Les deux humanitaires portées disparues dans l’attaque rentraient chez elles après avoir effectué une mission dans la région, a déclaré l’organisation Save the Children dans un communiqué, ajoutant qu’elle avait suspendu ses activités dans plusieurs régions birmanes.
« Nous sommes horrifiés par la violence exercée à l’encontre de civils innocents et de notre personnel, des humanitaires dévoués qui aident des millions d’enfants dans le besoin à travers le Myanmar », a déclaré Inger Ashing, directrice générale.
En octobre, le groupe a déclaré que son bureau dans la ville de Thantlang, dans l’ouest du pays, avait été détruit par des bombardements de la junte qui avait également rasé des dizaines de maisons à la suite d’affrontements avec un groupe anti-junte local.
« Ce massacre correspond à une technique de la junte de plus en plus répandue, qui consiste à assassiner quiconque semble montrer la moindre solidarité avec les armées ethniques » selon un porte-parole du Karenni Human Rights Group. Le 7 décembre dernier, des militaires birmans avaient déjà été accusés de la tuerie d’une dizaine de villageois y compris des mineurs, près de la ville de Lay Kaw : ils les avaient rassemblés, attachés et brûlés vifs, selon le Dr Sasa, un représentant du gouvernement birman en exil. Depuis le début du conflit, au moins 100 000 réfugiés auraient afflué vers cette zone frontalière dans l’espoir d’échapper aux combats et de fuir vers la Thaïlande. Les conditions de survie de ces exilés sont difficiles dans une région où l’électricité et l’eau potable sont déjà rationnées en temps normal.
À Rangoun, le plus haut représentant local de l’Eglise catholique, le cardinal Charles Maung Bo a condamné l’attaque, après avoir été photographié le 23 décembre, découpant un gâteau de Noël à quatre mains avec le chef de la junte, le général Min Aung Hlaing. Le cliché avait provoqué une vague d’indignation sur les réseaux et la consternation chez les militants. Le cardinal a expliqué avoir accepté cette rencontre « au nom de la paix » et a réitéré le 26 décembre ses appels à l’armée birmane, pour qu’elle cesse « de bombarder et de tuer ». Il a également invité les armées ethniques à « faire des efforts de paix ».
L’armée thaïlandaise a annoncé renforcer sa présence dans la province frontalière de Tak, les villageois habitant trop près de la ligne de front ont la possibilité de venir s’installer dans des temples et des hangars, plus à l’intérieur des terres.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Ucanews