Eglises d'Asie – Birmanie
Réactions mitigées en Birmanie suite à l’ordonnance de la CIJ pour la protection des Rohingyas
Publié le 25/01/2020

Selon Param-Preet Singh, juriste au sein du programme de justice internationale de Human Rights Watch, la décision de la CIJ est une étape fondamentale pour empêcher que d’autres atrocités soient commises contre l’une des populations les plus persécutées au monde. « Les gouvernements concernés et les organes des Nations Unies doivent maintenant s’assurer que la décision soit appliquée », a-t-elle ajouté. Nicholas Bequelin, directeur régional d’Amnesty International, a déclaré que les mesures exigées par la CIJ permettent d’envoyer un message clair aux autorités birmanes, en soulignant que le monde ne tolérera pas ces atrocités et qu’il n’acceptera pas aveuglément leur discours stérile sur la réalité dans l’État d’Arakan (Rakhine) aujourd’hui. Il a également rappelé que les quelque 600 000 Rohingyas qui y vivent encore sont quotidiennement et perpétuellement menacés et privés de leurs droits. « La Birmanie doit agir en urgence pour faire cesser toutes violations contre la communauté et empêcher la destruction de preuves », a-t-il ajouté.
600 000 Rohingyas toujours dans l’État d’Arakan
Le gouvernement birman a réagi fermement à la décision de la Cour internationale de justice, en affirmant que la condamnation infondée de la CIJ contre la Birmanie présente une image déformée de la situation. Kyaw Nyunt, pasteur baptiste de l’Église Judson à Rangoun, estime de son côté que l’ordonnance de la CIJ est destinée à éviter les violations des droits de l’homme, et affirme que c’est justement ce qu’a fait le gouvernement birman. « Une commission birmane a déjà reconnu que de graves violations des droits de l’homme ont eu lieu, mais sans parler de génocide comme il a été accusé par la communauté internationale », ajoute Kyaw Nyunt, qui faisait partie de la commission d’enquête birmane (Rakhine investigation commission) créée en 2012 sous l‘ancien président Thein Sein. Pe Than, parlementaire au sein de la Chambre Basse pour le Parti national Arakan, y voit « un signal que notre pays devra faire face à d’énormes pressions de la part de la communauté internationale et qu’il pourrait subir des sanctions économiques, ce qui serait très éprouvant pour nous, alors que le pays est en pleine transition démocratique ».
Il ajoute que la perception de la situation par la communauté internationale et la réalité sur le terrain sont deux choses totalement différentes, et il soutient qu’il n’y a pas eu de génocide dans le pays. En décembre, la conseillère d’État Aung San Suu Kyi a décrit les violences comme un « conflit interne armé » déclenché par des attaques des militants rohingyas contre des postes de sécurité du gouvernement. Elle a appelé les juges de la CIJ à rejeter les accusations de génocide et à laisser la cour martiale birmane traiter les abus commis. « Une bonne évaluation de la capacité de la Birmanie à gérer la question des violations en Arakan ne sera possible que si on permet à la justice intérieure de faire son travail », a-t-elle déclaré le 23 janvier, citée dans un article du Financial Times.
(Avec Ucanews, Mandalay)
Crédit : Crédit Department for international development (CC BY 2.0)
