Eglises d'Asie – Malaisie
Traite des personnes : le gouvernement malaisien prépare de nouvelles lois du travail pour 2020
Publié le 12/12/2019
« Ils se sont complètement écartés du cadre de très mauvaises lois. Même dans le cas où ils ne retiendraient qu’une partie minime de ce que demandent les syndicats, ce serait déjà énorme », soutient Dave Welsh, directeur national du Solidarity Center, une organisation de défense des droits des travailleurs, à propos de nouvelles lois en préparation par le gouvernement malaisien, qui doivent être promulguées au cours du premier semestre 2020. Selon Dave Welsh, les nouvelles lois devraient permettre de mieux contrer le fléau de la traite des personnes en Malaisie, et revoir en profondeur les droits des millions de migrants qui travaillent actuellement dans le pays, souvent en situation d’illégalité. Sur une population active de plus de 15 millions de personnes, Dave Welsh explique que la Malaisie compte près de 6 millions de migrants – originaires d’Indonésie, du Cambodge et du Bangladesh en majorité – dont la moitié sont entrés illégalement en Malaisie. Sur 6 millions de travailleurs étrangers, seuls 1,8 millions d’entre eux sont enregistrés officiellement. Très peu portent plainte pour licenciement injustifié, à cause d’un trop faible salaire, de mauvaises conditions de travail ou d’horaires abusifs. Les employés domestiques vivent dans les maisons de leurs employeurs et travaillent sept jours par semaine. « Leurs conditions sont consternantes », dénonce Dave Welsh. Parmi eux, on compte environ 212 000 travailleurs piégés dans des situations d’esclavage (sur environ 40 millions dans le monde), selon l’Indice mondial de l’esclavage, établit par la Walk Free Foundation. La Malaisie est également mal notée par le rapport 2019 du département d’État américain sur la traite des personnes ; les pays les moins bien classés de ce rapport pouvant s’exposer à des sanctions.
Des lois qui remontent aux années 1950
La Malaisie compte neuf lois sur les relations industrielles, en cours de révision. Elles remontent aux années 1950 et accordent les pleins pouvoirs au gouvernement pour dissoudre les syndicats et limiter les négociations collectives. Il n’y a pas eu de grève en Malaisie depuis quinze ans. Face à cette situation, le gouvernement actuel travaille également avec le Congrès des syndicats de Malaisie (MTUC) et l’Organisation internationale du travail (OIT) au sujet des nouvelles lois à l’étude. Selon Dave Welsh, la plupart des pays d’Asie du Sud-Est respectent officiellement les normes fixées par l’OIT – le problème étant qu’elles ne sont pas réellement respectées sur le terrain. Contrairement à la Malaisie, dont les lois industrielles ne protègent que bien peu les travailleurs, mais qui sont quant à elles rigoureusement appliquées. « Leurs lois ont été parfaitement transparentes, et complètement, volontairement, presque fièrement en totale opposition avec n’importe quelle loi internationale du travail ; et elles ont été appliquées rigoureusement », affirme Dave Welsh. Mais sous la pression insistante des États-Unis, qui ont demandé à la Malaisie, comme prérequis aux négociations commerciales, d’amender ses lois dépassées, les choses ont commencé à changer. La situation a également évolué dans le cadre d’une série de réformes instituées après l’arrivée du nouveau Premier ministre Mahathir Mohamad, un vétéran de la politique malaisienne, il y a plus d’un an. Depuis, la Malaisie a également annoncé les amendements des lois concernant la peine capitale, dans le but de mettre fin aux exécutions dans le pays. « En Malaisie, cela va vraiment à contre-courant de ce qui se passe actuellement dans le pays ; le fait que les choses changent est encourageant », se réjouit Dave Welsh.
(Avec Ucanews, Kuala Lumpur)
Crédit : UN Women / CC BY-NC-ND 2.0