Eglises d'Asie – Birmanie
Trois églises détruites par la junte birmane dans la région de Sagaing et dans l’État Karen
Publié le 18/01/2023
La junte continue ses attaques contre les communautés chrétiennes birmanes avec la destruction d’une église catholique de plus d’un siècle, dans un village majoritairement chrétien. L’église de l’Assomption de Chan Thar, dans le canton de Ye-U (dans le nord-ouest de la région de Sagaing, dans le centre du pays), construite il y a 129 ans, a été incendiée le 15 janvier ainsi que de nombreuses habitations.
L’église a été complètement détruite, mais il n’y a aucune victime car les villageois ont pu fuir avant l’arrivée de l’armée. « Nous sommes profondément tristes face à la destruction de notre église historique. C’était notre dernier espoir », confie un villageois catholique, qui préfère rester anonyme par crainte de répercussions de la part de l’armée.
Selon les villageois, une grotte mariale et la chapelle de l’adoration ont été épargnées. Cependant, le presbytère et un couvent ont été également détruits. Ils expliquent que les militaires sont arrivés dans la région le soir du 14 janvier en mettant le feu à de nombreuses maisons du village, avant de passer la nuit dans l’église.
Celle-ci a ensuite été incendiée par l’armée le lendemain, alors que la communauté catholique locale devait s’y rassembler pour la messe. Plus de 500 maisons du village ont été détruites. Il s’agit du quatrième raid contre le village en l’espace de huit mois. « Nous n’avons plus de maisons, et l’église abritait une peinture ancienne et irremplaçable de la Vierge Marie », poursuit un autre résident anonyme.
Le village de Chan Thar victime de nombreux raids depuis mai 2022
Par ces attaques, la junte cherche à repousser la résistance qui s’intensifie contre le régime militaire, menée par les Forces de défense populaires qui seraient basées dans la région de Sagaing. Les chrétiens représentent environ 8,2 % de la population birmane, sur 55 millions d’habitants. La junte a lancé de nombreux raids contre le village de Chan Thar depuis mai 2022. Le 7 mai dernier, presque 20 habitations ont été détruites et deux catholiques, dont une personne atteinte de troubles mentaux, ont été tués. Le 7 juin, 100 autres maisons ont été incendiées, puis encore 300 habitations le 14 décembre.
Depuis, plusieurs milliers d’habitants ont fui le village pour trouver refuge dans des églises près de Mandalay, la deuxième plus grande ville du pays, ainsi que chez des proches dans d’autres régions. Les villages de Chaung Yoe, de Mon Hla et de Chan Thar, qui font partie de l’archidiocèse de Mandalay, sont connus comme les villages Bayingyi car leurs habitants seraient les descendants d’aventuriers et mercenaires portugais arrivés dans la région aux XVIe et XVIIe siècles. De nombreux futurs évêques, prêtres et religieuses y sont nés. L’église de l’Assomption a été consacrée le 18 février 1894.
La junte birmane appelée à respecter la vie et la dignité humaine
Par ailleurs, le 12 janvier, l’armée a également lancé une frappe aérienne dans l’État Karen, dans le sud-est birman, en causant la mort de cinq personnes, dont un catéchiste catholique et un pasteur baptiste, ainsi que la destruction de deux autres églises et de nombreux blessés, selon des sources ecclésiales et des groupes humanitaires. Une mère et sa fille de deux ans font partie des victimes des bombardements qui ciblaient le village de Lay Wah, dans le canton de Hpapun.
Selon les sources, anonymes, le village comptait au moins 40 foyers catholiques, baptistes et bouddhistes vivant côte à côte. Lay Wah dépend du diocèse de Hpa-an, qui couvre l’État Karen et une partie de l’État Mon. De nombreux habitants ont fui en lieu sûr à cause des bombardements.
Les conflits actuels dans le pays d’Asie du Sud-Est, déclenchés le 1er février 2021 par le coup d’État militaire qui a renversé le gouvernement civil élu démocratiquement, ont entraîné des répressions qui ont affecté de nombreuses églises et couvents dans les régions majoritairement chrétiennes de Kayah, Chin, Karen et Kachin. De nombreux prêtres et pasteurs ont également été tués ou arrêtés.
Selon le Gouvernement d’unité national (NUG) en exil, plus de 460 civils ont été tués par les bombardements de la junte. Ces derniers mois, le pape François et les évêques birmans ont appelé avec insistance à respecter la vie et la dignité humaine, en demandant à la junte de cesser les attaques contre les lieux de culte, les écoles et les hôpitaux.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
People’s Defense Comrade / Ucanews