Eglises d'Asie

Wei Jingsheng souligne les différences entre les manifestations actuelles et le mouvement de 1989

Publié le 01/12/2022




Après les manifestations qui ont eu lieu ces derniers jours dans plusieurs villes chinoises dont Pékin, Nanjing, Shanghai, Chengdu, Wuhan et Guangzhou, en réaction aux confinements stricts et à la politique « zéro Covid » imposée par le Parti, un célèbre dissident chinois en exil, Wei Jingsheng, analyse les différences du mouvement actuel avec celui de 1989. Alors que les manifestations semblent s’affaiblir avec la présence massive des forces de l’ordre et les arrestations répétées, certains vont jusqu’à cibler Xi Jingping et la direction du PCC.

Wei Jingsheng, un opposant chinois de longue date, aujourd’hui exilé aux États-Unis.

« Il y a des différences » entre les manifestations actuelles en Chine et les événements Tiananmen en juin 1989, quand l’armée chinoise a massacré plusieurs milliers d’étudiants et manifestants dans la place emblématique de Pékin, où ils étaient rassemblés pour demander des réformes politiques et démocratiques dans le pays. C’est le commentaire donné par Wei Jingsheng, célèbre dissident chinois et symbole du mouvement de revendications démocratiques dans le pays, aujourd’hui exilé aux États-Unis.

Avec la présence massive des forces de l’ordre dans les rues, les arrestations répétées et les contrôles imposés aux manifestants, les manifestations qui ont pris de l’ampleur ces derniers jours en Chine contre les restrictions anti-Covid semblent commencer à s’affaiblir. Plusieurs milliers de Chinois ont manifesté dans plusieurs villes à travers le pays, pour demander la fin des confinements en cours, en allant jusqu’à cibler la direction du Parti communiste chinois (PCC).

Le mouvement a principalement été suivi dans les villes de Pékin, Nanjing, Shanghai, Chengdu, Wuhan et Guangzhou. La vague de colère a été déclenchée par des manifestations à Urumqui, capitale de la région autonome du Xinjiang, où la population a demandé ces derniers jours à mettre fin à la politique « zéro Covid » du président Xi Jinping. Beaucoup d’habitants ont notamment dénoncé les autorités pour la mort, le 25 novembre dernier, de 10 personnes dans un immeuble en flammes : les mesures draconiennes anti-pandémie auraient empêché leur évacuation.

« La nature spontanée des manifestations est évidente »

Alors que les médias officiels censurent les événements de ces derniers jours, les milieux les plus nationalistes commencent à dénoncer les « forces étrangères » derrière le déclenchement des émeutes. Trouver un « coupable extérieur » à des problèmes intérieurs est une stratégie établie de longue date par le régime chinois, et employée notamment lors des manifestations prodémocratie de 2019 à Hong-Kong.

Cependant, les autorités font face à un mouvement sans chef et sans représentant clair, et qui alterne entre la place publique et le monde virtuel, sur le web. « Le mouvement de 1989 était soutenu par certains responsables au sein du PCC, c’est pourquoi il a pu prendre une plus grande ampleur avec des manifestations à long terme à Pékin », remarque Wei Jingsheng. Par comparaison, l’opposant chinois estime qu’« aujourd’hui, il n’y a pas de soutien clair au sein du Parti, et la nature spontanée des manifestations est évidente ».

« Aujourd’hui, il y a la surveillance de pointe, et une répression ciblée avec précision »

Il ajoute qu’en 1989, les gens demandaient des réformes du régime communiste, la cible officielle des manifestants était la corruption des dirigeants et ils n’avaient pas le soutien des paysans et de l’armée. Il souligne toutefois que les politiques actuelles de prévention contre la pandémie en Chine « affectent tout le peuple chinois », c’est pourquoi le mouvement « a le soutien et la sympathie de la plupart des Chinois », affirme-t-il.

Il explique que « le mouvement de 1989 plaçait ses espoirs dans le Parti » et qu’il « affirmait publiquement son soutien au Comité central ». En revanche, ces derniers jours, des appels à la démission de Xi Jingping et au retrait du PCC ont été entendus, un signe qui signifie pour lui que le public ne fait plus confiance au Parti.

Wei rappelle également qu’il y a 33 ans, l’armée a réprimé les manifestants avec la force : « Aujourd’hui, le PCC n’ose plus utiliser l’armée, de peur qu’elle n’obéisse pas à ses ordres. Mais il y a la surveillance de pointe, et une répression ciblée avec précision, ce qui pourrait éviter une réaction internationale défavorable. »

(Avec Asianews)