Eglises d'Asie

Décès de Mgr Jin Luxian, évêque « officiel » du diocèse de Shanghai

Publié le 27/04/2013




Samedi 27 avril 2013, le diocèse de Shanghai a fait part de la disparition de Mgr Aloysius Jin Luxian, âgé de 97 ans, évêque « officiel » du diocèse de Shanghai. Son décès, dû à son grand âge et à une santé affaiblie ces dernières années par un diabète important, est intervenu aujourd’hui à 14h46 (heure locale) …

… à l’hôpital où il était en soins intensifs depuis plusieurs semaines à Shanghai. La mort de Mgr Jin marque la disparition d’une personnalité complexe et controversée dont l’empreinte aura marqué l’histoire de l’Eglise en Chine de ces soixante dernières années. Témoin et plus encore acteur de premier plan de cette histoire, l’évêque, qui appartenait à la Compagnie de Jésus, était pour Pékin, l’ordinaire du diocèse de Shanghai ; pour le Saint-Siège, il en était son coadjuteur.

Selon nos informations, une messe de funérailles sera célébrée lundi 29 avril et une cérémonie mémorielle sera organisée le 2 mai. Il semble que les autorités chinoises préparent activement la cérémonie des funérailles depuis quelque temps déjà. Celle-ci aura lieu en la cathédrale Saint-Ignace à Xujiahui, le quartier de Shanghai où se dresse l’archevêché.

La logique ecclésiale voudrait que la messe des funérailles soit célébrée par l’évêque auxiliaire de Mgr Jin, Mgr Ma Daqin, dont l’ordination épiscopale s’est tenue en cette même cathédrale le 7 juillet dernier. Mais, depuis cette date, Mgr Ma est en résidence surveillée dans des locaux du séminaire de Sheshan et empêché par la police d’exercer son ministère épiscopal. Les autorités chinoises ne permettront donc peut-être pas à Mgr Ma de présider les funérailles de Mgr Jin. Or, selon des informations issues des milieux ecclésiaux locaux, tant les fidèles que les prêtres et les religieuses de Shanghai refuseraient que la messe soit célébrée par quelqu’un d’autre que Mgr Ma.

Du côté des autorités, les pressions se multiplient pour que la messe des funérailles soit présidée par l’un ou l’autre des évêques qui ont été placés à la tête des instances « officielles » de l’Eglise. En effet, lors de l’« Assemblée nationale des représentants catholiques », organisée à Pékin en décembre 2010, Mgr Jin Luxian avait été porté à la présidence d’honneur de l’Association patriotique des catholiques chinois et de la Conférence épiscopale « officielle », une « distinction » qu’il partageait avec Liu Bainian, le laïc qui a été – et est encore – l’homme fort que le régime communiste a placé à la tête des instances « officielles » de l’Eglise.

Pour présider les funérailles de Mgr Jin, Pékin chercherait donc à imposer Mgr Fang Xingyao, évêque de Linyi (Shandong) et président de l’Association patriotique au plan national. Ordonné en 1997, considéré comme un proche de Liu Bainian, qui comme lui est originaire du Shandong, Mgr Fang a accepté, ces dernières années, de prendre part à plusieurs ordinations épiscopales illicites. Bien que Mgr Fang ait été reconnu par Rome comme évêque légitime, en communion avec le Saint-Père, il apparaît aux yeux de tous dans l’Eglise en Chine comme un homme soumis aux autorités.

A défaut de Mgr Fang, Pékin pourrait chercher à imposer la présence de Mgr Joseph Ma Yinglin, évêque de Kunming (Yunnan) et président de la Conférence des évêques « officiels ». Ordonné évêque en avril 2006 sans mandat pontifical, Mgr Ma Yinglin figure au petit nombre des évêques « officiels » qui ne sont pas en communion avec le pape et sont donc dépourvus de tout pouvoir canonique. Très proche lui aussi des autorités, Mgr Ma Yinglin ne peut donc être accepté par les fidèles de Shanghai pour célébrer les funérailles de leur défunt évêque, qui, en dépit des ambiguïtés qui ont été les siennes, avait été reconnu par Rome comme l’évêque coadjuteur légitime du diocèse de Shanghai.

Pour ajouter à la confusion, Pékin pourrait organiser les funérailles de manière à ce qu’y participent, au côté d’évêques « officiels » en communion avec le pape, d’autres évêques illégitimes, voire publiquement excommuniés par le Saint-Père. Un mois à peine après l’installation à Rome du pape François – qui partage avec Mgr Jin une même appartenance à la Compagnie de Jésus –, ces obsèques viennent tester l’unité de l’Eglise en Chine, entre des fidèles et un clergé shanghaïen désireux de témoigner de leur lien avec l’Eglise universelle et des autorités décidées à affirmer leur contrôle sur la communauté catholique de Chine populaire.