Eglises d'Asie

Le brouillard reste toujours aussi épais quant aux motivations qui ont amené Mgr Ma Daqin à afficher sa proximité avec l’Association patriotique

Publié le 22/06/2016




En préparation depuis plusieurs mois, un colloque qui devait avoir lieu le 20 juin dernier à Shanghai a été annulé à la dernière minute. Le colloque était organisé par le diocèse de Shanghai à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de Mgr Jin Luxian (1916-2013), qui fut l’évêque « officiel » de ce diocèse de 1985 à 2013 ; il devait réunir …

… de nombreux évêques de la partie « officielle » de l’Eglise catholique en Chine.

Les organisateurs du colloque auraient, semble-t-il, voulu que Mgr Ma Daqin, l’actuel évêque « officiel » de Shanghai, prenne part à ce colloque, ce qui aurait été une manière d’affirmer sa qualité d’évêque du diocèse et de mettre un terme – ou, à tout le moins, une parenthèse – au régime de résidence surveillée qui lui est imposé par les autorités chinoises depuis son ordination épiscopale du 7 juillet 2012. Selon une source de Shanghai citée par l’agence Ucanews, le colloque a été repoussé au 28 juin prochain.

Dans l’intervalle, le gouvernement chinois a fait organiser par l’Administration d’Etat pour les Affaires religieuses une « session de formation » à Pékin. Prévue sur quatre jours, du 20 au 24 juin, la session réunit 150 responsables catholiques, évêques, prêtres, religieuses et cadres laïques ; chacune des vingt-huit provinces du pays a été chargée de déléguer cinq responsables dans la capitale. L’objet de la formation est d’« apprendre » des enseignements tirés de la réunion au sommet consacrée aux religions qui s’est tenue les 22 et 23 avril dernier à Pékin en présence des plus hauts dirigeants du pays. Ce sommet avait réitéré la doctrine du Parti en matière de contrôle des religions et fait porter l’accent sur la nécessaire « sinisation » des religions afin de préserver le pays de toute « infiltration venue de l’étranger ».

L’Administration d’Etat pour les Affaires religieuses étant dans le collimateur de la toute-puissante Commission centrale pour l’inspection de la discipline du Parti, pour avoir notamment failli à faire appliquer correctement la politique religieuse du Parti communiste, on peut penser que cette « session de formation » vient répondre au resserrement tous azimuts que l’on constate depuis quelques temps en Chine. Elle intervient aussi peu après que Mgr Ma Daqin a fait part, le 12 juin, sur son blog de ses « regrets » d’avoir démissionné avec fracas de l’Association patriotique le 7 juillet 2012, jour de son ordination épiscopale. Depuis ce 12 juin, les commentaires vont bon train dans la blogosphère catholique chinoise mais aucun n’élément déterminant n’est venu éclairer le texte posté par Mgr Ma Daqin ni expliciter les raisons et les circonstances qui l’avaient amené à l’écrire.

Nous vous proposons ci-dessous une traduction en français du texte posté le 12 juin 2016 par Mgr Ma Daqin. La traduction est de Marguerite Jacquelin.


他教导我们走爱国爱教的道路
Il nous mène sur les chemins de l’amour de la patrie et de la religion

par Mgr Ma Daqin

La nouvelle génération du clergé et de la communauté de fidèles de Shanghai a beaucoup à apprendre de Mgr Jin Luxian.

Il serait difficile d’arriver au niveau de Mgr Jin [Luxian] en termes de qualité de valeurs et d’expérience. Certes. Mais nous pouvons déjà essayer de tirer quelques enseignements de son attachement au pays et à la religion, de son dévouement au service de Dieu tout au long de sa vie, de son humilité de prêtre. Nous avons beaucoup à apprendre de lui, et c’est notre devoir de le faire. Le berger est un exemple pour ses brebis. Et les brebis doivent le suivre. Dans le discours prononcé lors du 40ème anniversaire de l’Assemblée patriotique de Shanghai, Mgr Jin avait eu des mots très forts. Pour lui, la mission du prêtre est de contrôler l’orientation de l’Eglise, et d’être capable de gérer les relations conflictuelles de toutes sortes. Les enseignements apostoliques de Mgr Jin et son orientation au service de la société ont toujours été très clairs. En même temps, il a aussi beaucoup travaillé à la modernisation de l’Eglise catholique chinoise et à son adaptation à la société contemporaine.

Un courant de pensée libéral circule aujourd’hui, que ce soit dans la société ou dans l’Eglise. Les gens se permettent de se critiquer les uns les autres, de critiquer l’Eglise, la société, le pays, sans retenue, de manière naturelle, subjective et irresponsable. Certains pour le plaisir de critiquer, d’autres pour être méchant. En utilisant des termes sensibles de l’actualité, sans même connaître leur sens ou l’état actuel des choses, ils spéculent sans réfléchir et font du bruit à partir de rien. Pour un membre du Parti, agir de la sorte revient à un manque de « critique et d’autocritique » et « de pragmatisme ». Pour un catholique, c’est une entorse à l’enseignement de Jésus disant : « Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés. »

Mgr Jin, lui, n’a jamais critiqué ou insulté les gens de cette façon. A plusieurs reprises, il a dû essuyer les critiques, les insultes, les moqueries de personnes mal intentionnées, mais il en a toujours rit. Nous avons beaucoup à apprendre de sa simplicité d’esprit et de sa bonté.

Mgr Jin avait des idées bien claires quant au rapport que les lois du pays et les règlementations de l’Eglise devaient avoir. Selon lui, l’Evangile est l’essence même de l’Eglise et lui donne sa mission. Il faut suivre le chemin d’amour que Jésus a montré à ses disciples, et accomplir la mission évangélique qu’Il leur a confiée.

L’Eglise n’est pas là pour demander et recevoir les honneurs ou les privilèges de son temps. Elle est là pour accomplir une mission d’évangélisation, en s’adaptant à la société dans laquelle elle évolue. Selon Mgr Jin, il faut appliquer les règles de l’Eglise en respectant et se soumettant d’abord aux lois de son pays. C’est ainsi, car en tant que chrétiens, nous devons être des modèles pour les autres citoyens, et respecter les lois.

Avant, lors du césaropapisme, le gouvernement en place et l’Eglise ne faisaient qu’un. Petit à petit, l’Eglise en a oublié sa mission sacrée. Celle, non pas de rivaliser avec le pouvoir, mais de suivre les enseignements de Jésus et de servir le peuple. Le gouvernement laïque finit par la voir comme une ennemie irréconciliable et l’attaqua sévèrement. L’Eglise savait que le tort venait de son côté, et non de celui du gouvernement, car, en voulant rivaliser avec le pouvoir laïque et accéder au pouvoir, elle s’était détournée de l’Evangile et de ses commandements. Elle s’était détournée des valeurs fondamentales de l’Eglise établies par Jésus Christ.

Lorsque nous rencontrons des difficultés, Mgr Jin nous conseille de nous rapporter à l’histoire. L’Eglise, dynamique et pleine de vitalité, a connu un passé mouvementé et chaotique. Elle peut s’adapter à tout type de société et de culture, car elle n’obéit pas à une formule algébrique et elle ne suit pas un modèle type. Elle est là pour répandre l’esprit de l’Evangile, quelles que soient les conditions. C’est pour cela qu’il est d’abord important de respecter les Constitutions et les lois du lieu ou du pays où l’on vit. Si les lois du pays et celles de l’Eglise entrent en conflit, il faut se rappeler que la mission première du chrétien est d’être un serviteur. Quel serviteur ferait de l’ombre à son maître ? Nous ne pouvons pas prétendre en toute humilité être des serviteurs, et nous battre pour obtenir le pouvoir. Jésus s’était soumis aux lois et aux coutumes juives de son temps. A nous, ses disciples, de suivre son exemple en nous adaptant aux coutumes et aux lois de notre société.

Je suis tout à fait d’accord pour conserver une attitude positive vis-à-vis des autres religions, tel qu’il l’a été mentionné lors du sommet sur les religions qui a eu lieu récemment. L’Eglise catholique chinoise doit s’adapter à l’époque et à la société dans lesquelles elle évolue. Elle doit établir des rapports amicaux avec le gouvernement et les autres religions, issues de pays étrangers ou non, et avec les non-chrétiens, tout en respectant évidemment les lois de la nation et de l’Eglise. Ne pas appliquer ces règles nuirait à notre mission évangélique. Nous attiserions l’opposition et sèmerions des embuches sur notre propre chemin.

Mgr Jin n’a pas toujours eu ces idées. Son parcours a été assez tortueux. A vrai dire, beaucoup de catholiques chinois, moi compris, ont suivi le même type de parcours que lui.

En 1950, lorsque l’idéologie patriotique commença à se mettre en place, Mgr Jin ne voulut pas s’y conformer et décida de rejoindre l’Eglise « souterraine ». Puis, à travers certaines expériences plus ou moins douloureuses, il comprit beaucoup de choses et changea d’avis. Les croyants disent souvent que nous recevons beaucoup de Dieu à travers les épreuves, que du mauvais Il fait ressortir du bon. C’est très vrai. Les difficultés permettent souvent aux gens de comprendre un certain nombre de choses, d’ouvrir des horizons insoupçonnés. C’est probablement ce que l’on appelle mûrir. Cela ne veut pas dire qu’il faut endurer toutes sortes d’épreuves, mais les expériences nous font grandir et nous font découvrir d’autres aspects de la vie.

Tout le monde commet des erreurs, l’important est de savoir retomber sur ses pieds et repartir dans la bonne direction. Comme Mgr Jin. Après s’être égaré, il a su trouver sa vocation et accomplir sa mission, par amour du pays et de sa religion, et pour favoriser l’indépendance et l’autogestion de l’Eglise. Il déploya toutes ses forces à accomplir sa mission et vivre sa vocation durant le restant de ses jours.

Mgr Jin avait coutume de rappeler que, lorsqu’il était jeune, les Occidentaux contrôlaient toutes les affaires religieuses des catholiques chinois. Le plus grand souhait de ces catholiques chinois était alors de diriger eux-mêmes leurs affaires. Connaissant leur peuple, ils étaient plus à même de connaître les besoins de leur Eglise. Les Chinois, tout comme les Occidentaux, sont des êtres humains. Eux aussi aiment leur pays, veulent son indépendance pour pouvoir le diriger par eux-mêmes.

Selon Mgr Jin, les prêtres chinois ont vu leur désir satisfait après la mise en place de la République populaire de Chine. Saisissant cette occasion, ils adhérèrent à l’Eglise indépendante et ne voulurent plus se laisser influencer par les institutions étrangères.

Lorsqu’il était en vie, Mgr Jin travailla beaucoup pour l’indépendance et l’autogestion de l’Eglise de Chine, et travailla aussi à établir des rapports amicaux avec les catholiques d’autres pays. D’un côté, les religions chinoises sont donc en train de prendre leur indépendance et commencent à s’autogérer, dans la lignée de la politique diplomatique de la République populaire de Chine actuelle. Les principes d’indépendance et d’auto-administration sont des principes fondamentaux de la Constitution chinoise, qui ne s’appliquent pas seulement aux catholiques. Toutes les religions, ainsi que la politique, l’économie, et les affaires intérieures du pays, doivent se développer en s’appuyant sur les compétences des Chinois, et ne pas être influencées par les pays étrangers. D’un autre côté, nous devons rester en bons termes et entretenir des rapports d’égalité avec les religions du monde entier, afin de promouvoir ensemble le progrès de la civilisation. Je me rappelle avoir accompagné Mgr Jin en Europe et aux Etats-Unis plusieurs fois, il y a quelques années. Lors de nos échanges avec les évêques et les prêtres locaux, je me souviens que Mgr Jin insistait sur l’importance, dans la doctrine catholique chinoise, du caractère saint, catholique et apostolique de l’Eglise. Insister pour l’indépendance et l’autogestion de l’Eglise catholique de Chine ne rime pas introduire une différence entre l’Eglise de Chine et l’Eglise universelle, qui auraient un Dieu et une Bible différents.

Mgr Jin était très attaché à l’Eglise « officielle » de Shanghai et soutenait son travail. Selon lui, tous les membres de l’Association patriotique aidaient les diocèses et les paroisses à se développer et accomplissaient un travail indispensable. Mgr Jin les contactait souvent pour les encourager matériellement ou spirituellement.

Mgr Jin se souciait beaucoup de la qualité de la formation des membres de l’Association patriotique. Il espérait que le rapport entre leurs convictions politiques, religieuses et culturelles soit équilibré. L’Association patriotique est une organisation catholique dont l’esprit devrait laisser transparaître la foi catholique. Parfois, Mgr Jin dénonçait les manquements de certains des membres de l’Association patriotique à la foi, ou le fait qu’ils n’allaient pas à la messe le dimanche. Il disait : « Comment ces membres de l’Association patriotique pourraient-ils servir de modèle de patriotisme et de religiosité ? Les croyants diront : cet homme là ne croit pas, nous ne le servirons pas ». Bien sûr, la foi de la grande majorité des membres de l’Association patriotique de Shanghai était grande, et ils menaient leurs missions de manière consciencieuse et équilibrée sous la direction de Mgr Jin.

Ce que Mgr Jin pensait de l’Association patriotique ressortait bien à chacun des discours qu’il tenait lors des réunions importantes de celle-ci. A chaque fois, il la remerciait très sincèrement au nom du diocèse de Shanghai pour l’aide qu’elle lui apportait, ainsi qu’à toutes les paroisses. Lors du pèlerinage annuel à Sheshan par exemple, c’est grâce au travail des membres de l’Association patriotique de Shanghai, qui travaillent dans l’ombre, que la statue de la Vierge peut être transportée sans difficultés par les fidèles tout au long du mois de mai. Même si nous ne voyons pas le travail qu’ils accomplissent, ce sont eux qui favorisent les progrès de la paix et de l’équilibre au sein de l’Eglise catholique de Shanghai. De plus, l’Association patriotique aide beaucoup au niveau de l’administration et des services protocolaires des diocèses et des paroisses de Shanghai. Que ce soit dans les tâches les moins agréables, les plus minutieuses, les plus lourdes. Cela fait de nombreuses années qu’ils travaillent ensemble, et leur collaboration est réussie.

Mgr Jin a beaucoup influencé notre génération, que ce soit au niveau de la vie spirituelle des fidèles ou au niveau du travail de l’Association patriotique. Il encourageait souvent les prêtres à collaborer avec l’Association patriotique dans leurs paroisses, et à lui laisser la main libre dans différents domaines d’activités.

Du temps de Mgr Jin, beaucoup de prêtres ont rejoint l’Association patriotique. Dans les diocèses et les paroisses, ils menaient leurs missions en promouvant simultanément l’amour du pays et celui de la religion, ce qui permettait aux fidèles de s’adapter à leur temps et à leur société. Mgr Jin m’a aussi recommandé très tôt de rejoindre l’Association patriotique de Shanghai. C’était deux ans après mon ordination [qui a eu lieu en 1994 – NdT]. Il me conseilla d’écouter avec humilité les enseignements des plus anciens de l’Association patriotique. J’étais tout jeune face à eux, et ils m’ont beaucoup appris, à travers des exercices à la fois théoriques et pratiques. A cette époque, je ne comprenais pas tout à fait le sens de cette Association patriotique. Peu après, on m’a demandé de donner des cours à ses membres les plus jeunes. Pour « apprendre en enseignant » comme dit l’adage. Mgr Jin me laissa par ailleurs prendre plusieurs fois la parole à sa place lors de rencontres importantes. Cet exercice était difficile mais très enrichissant.

Petit à petit j’ai compris le sens, le but, l’utilité de la mission de l’Association patriotique. J’ai changé d’avis à son sujet. J’ai travaillé en ayant en tête cet amour de pays et de la religion. Il permet aux croyants de s’adapter à l’évolution de la société socialiste, les amène à s’engager dans la construction de l’Etat et de la société. S’adapter et s’investir dans la société, en tant que catholiques, permet d’être mieux reconnus et acceptés, et facilite notre mission évangélique. Cette réciprocité est tout à fait positive. Après tout ce que nous avons fait ensemble, et malgré la différence d’âge, j’ai développé une profonde amitié avec des anciens de l’Association patriotique. Parmi eux se trouvait les laïcs Gu Meiqing, Tang Guozhi, Lu Weidu, Li Wenzhi, Ma Bailing, Wang Liangquan, Ai Zujiong, de qui j’ai beaucoup appris. Ils ont été très bons avec moi et m’ont beaucoup aidé. Même s’ils ont pris leur retraite, ils m’envoient encore des cartes à Noël.

Peu à peu, je me suis laissé influencer pendant un certain temps par les pays étrangers, et j’ai commis des erreurs avec l’Association patriotique. Je me suis mal comporté envers elle, que ce soit en paroles ou en actes. Puis, je me suis aperçu à quel point j’avais agi de manière irréfléchie, et je m’en suis voulu pour toutes ces personnes que j’avais blessées, alors qu’elles s’étaient occupées de moi pendant longtemps. J’ai aussi nui au travail considérable de Mgr Jin pour l’évolution de l’Eglise catholique de Shanghai. Je n’aurais pas dû commettre une telle erreur à Shanghai, où la tradition de l’amour du pays et de la religion était tellement implantée. Je m’en suis beaucoup voulu, et aujourd’hui, j’espère pouvoir réparer mes erreurs. J’ai toujours eu beaucoup d’estime pour l’Association patriotique de Shanghai, du fait de son histoire et de sa contribution pour le développement durable de l’Eglise catholique. Après les réformes et l’ouverture de la Chine, elle a notamment aidé l’Eglise à mettre en place son système. J’ai moi-même contribué à certaines de leurs actions, de grandes et de petites envergures. La définition faite par les pays étrangers de l’Association patriotique est fausse. Selon moi, la plupart des prêtres et croyants de Shanghai approuvent et font confiance à ses actions.

L’Association patriotique a toujours joué un rôle très important dans le développement de l’Eglise catholique de Chine. Beaucoup de documents historiques le prouvent. Et selon moi, c’est toujours le cas avec l’influence qu’elle a au niveau politique, des services de l’Eglise ou des services sociaux. L’Association patriotique est un pont qui aide les prêtres et les fidèles à mettre en place la politique du gouvernement. Solide organisation de fidèles, elle aide les diocèses et les paroisses à mener à bien des missions toujours plus nombreuses. Bras droit de l’Eglise, elle sert à faire valoir la charité promue par l’Eglise dans de nombreuses institutions de la société, et sert à répandre l’amour de Dieu. Je visualise Mgr Jin à Shanghai dans un carrosse tiré par quatre chevaux : l’Association patriotique catholique municipale de Shanghai, l’Association des intellectuels catholiques de Shanghai, la Commission administrative catholique de Shanghai et le diocèse de l’Eglise catholique de Shanghai. La collaboration de ces différentes institutions permet au diocèse catholique de Shanghai d’accomplir sa mission évangélique. Chacune d’elles a un rôle bien particulier à jouer et une marge de manœuvre différente, qui permettent finalement de combler les lacunes du travail que l’Eglise effectuerait si elle était toute seule.

Mgr Jin nous a laissé un autre héritage, auquel je m’identifie particulièrement. Le fait de savoir qu’il faut toujours avoir le courage de réparer ses fautes. Personne n’est parfait, Mgr Jin lui-même a eu une jeunesse un peu mouvementée. Mais il a su se reprendre et en tirer parti, trouver sa vraie vocation, et accomplir de grandes choses. Ces dernières années, je suis revenu plusieurs fois sur les documents laissés par Mgr Jin, j’ai étudié les vies de missionnaires, celle de Matteo Ricci et d’autres. Et puis j’ai effectué ma propre introspection, m’en suis voulu d’avoir été aussi vaniteux, arrogant, et pour tant d’autres mauvais comportements. Avant, je ne m’investissais pas beaucoup dans mon travail. Je me suis aperçu à quel point j’avais agi de manière immature, irréfléchie, et lacunaire. Tout le monde doit grandir, en taille certes, mais aussi en intelligence, en ouverture d’esprit et de cœur, dans sa manière de penser, dans son âme. Pendant de nombreuses années, les jeunes se sont reposés sur les lauriers des générations passées, celles qui aimaient leur religion et leur pays. Nous ne comprenons pas suffisamment les enjeux d’une Eglise indépendante qui s’auto-administre ; nous devons nous conformer à la Constitution et aux lois du pays, nous adapter à la société socialiste. Je me souviens de la messe de Pâques, où nous avons chanté l’Exultet. Les paroles contenaient ces mots : felix culpa, qui signifient littéralement ‘heureuse faute’. Aujourd’hui, ces mots semblent nous encourager et nous donner de l’espoir. Lorsque nous péchons et commettons des erreurs, cet encouragement nous aide à recevoir notre punition. L’espoir qu’il nous donne est celui de tirer des leçons de nos erreurs, et de nous relever pour repartir de zéro.

(eda/ra)