Eglises d'Asie

L’Eglise catholique s’associe aux funérailles royales

Publié le 26/10/2017




La cérémonie de crémation du roi Bhumibol Adulyadej, qui a lieu aujourd’hui, jeudi 26 octobre, est un événement considérable pour la Thaïlande, eu égard à la longueur du règne du roi défunt et à la dévotion montrée par la population à son égard. L’Eglise catholique lui rend elle aussi hommage.

32 représentants d’Etats étrangers seront présents à la cérémonie de crémation du roi défunt, parmi lesquels Mgr Giambattista Diquattro, nonce apostolique en Inde et au Népal, qui sera présent en tant qu’envoyé du pape François et du Saint-Siège. Mgr Paul Paul Tschang In-Nam, nonce apostolique en Thaïlande, participera également à la cérémonie parmi les membres du corps diplomatiques, ainsi que le cardinal François-Xavier Kriengsak Kovithavanij, archevêque de Bangkok, invité par le gouvernement thaïlandais.

« Les chrétiens sont unis avec l’ensemble du pays pour cet hommage au roi »

Le jour de la crémation, le 26 octobre, « nous demandons à tous les catholiques de déposer des fleurs de santal près des répliques de crématorium les plus proches de leur domicile, et d’y aller en groupe, accompagnés de religieuses et des prêtres. Cela permettra de montrer aux Thaïlandais d’autres confessions que les chrétiens sont unis avec l’ensemble du pays pour cet hommage au roi », explique à Eglises d’Asie Mgr Vissanou Thanya-Anan, secrétaire-général adjoint de la conférence épiscopale. Et parallèlement aux cérémonies de funérailles, la conférence épiscopale de Thaïlande a organisé plusieurs célébrations et événements pour rendre hommage au roi défunt.

Le 21 octobre, une messe de requiem a été célébrée dans la cathédrale de l’Assomption à Bangkok en présence du cardinal Kriengsak Kovithavanij et de l’ensemble de l’épiscopat thaïlandais. Invité à cette cérémonie, un représentant du Palais Royal n’a pu y participer du fait de la préparation des cérémonies funéraires. Le 22 octobre, chaque église diocésaine du royaume a également organisé une messe de requiem pour le roi Rama IX. Et la conférence épiscopale a par ailleurs invité chaque paroisse à célébrer la messe quotidienne, du 23 au 25 octobre, à l’intention du roi défunt, avec des prières universelles spécifiques.

Dans ce pays où 95 % des 68 millions de Thaïlandais sont bouddhistes, environ 300.000 Thaïlandais sont catholiques. Ces derniers, comme une très grande majorité des Thaïlandais, révèrent le roi Bhumibol, y compris dans les minorités isolées. Ainsi, le P. Alain Bourdery, membre de la Société des Missions Etrangères de Paris, missionnaire en Thaïlande depuis 1999, témoigne de la manière dont les Karens témoignent de leur loyalisme à l’égard du roi défunt. « Les Karens connaissaient l’empathie du roi pour les minorités ethniques. Chaque maison a son portrait du roi, alors que rien ne les y oblige. Les Karens sont impliqués dans le deuil : chaque village enverra 50 représentants à la sous-préfecture le jour de la crémation et, en ce moment, des travaux d’intérêt collectif mobilisent les villages. On dégage les routes, on nettoie les écoles, on donne un peu de son temps pour saluer la mémoire du roi défunt. Du côté des catholiques, nous suivons les recommandations de la conférence épiscopale : nous avons traduit les prières en karen et célébrons chaque jour la messe pour le roi défunt depuis le 23 octobre. »

Le roi de Thaïlande, « protecteur de toutes les religions »

Outre ces célébrations religieuses, la hiérarchie catholique de Thaïlande a prévu d’autres activités. Ainsi, les 30 septembre et 1er octobre derniers, un concert de requiem sous la direction du chef d’orchestre italien Alfonso Scarano a été organisé conjointement par la conférence épiscopale et l’université Mahidol sur le campus de l’université. 2.000 personnes, catholiques et protestants, ont assisté à chacun de ces concerts, qui se sont tenus en présence du cardinal de Bangkok. « Avant le concert, les personnes de l’audience ont prié pour l’âme du roi pendant cinquante minutes. Des officiels du gouvernement et des dignitaires ont été invités. Au programme du concert ont figuré les requiem de Mozart, de Gabriel Fauré et de Giuseppe Verdi », a indiqué à Eglises d’Asie Mgr Vissanou. Parmi les personnalités thaïlandaises qui ont assisté au concert figuraient le général Surayudh Chulanont, ancien Premier ministre et actuellement membre du Conseil privé du roi.

Les autorités thaïlandaises ont grandement apprécié l’organisation de ces messes et de ces concerts d’hommage. « J’ai rencontré le ministre de la Culture Veera Rojpojanarat qui a déclaré qu’il fallait regarder l’église catholique comme un exemple pour les autres religions, pour les activités qu’elle avait organisées », a confié à Eglises d’Asie Mgr Vissanou.

Par le passé, l’Eglise catholique s’est déjà associé aux célébrations organisées en l’honneur du roi, que ce soit à l’occasion du soixante-dixième anniversaire du roi ou de ses soixante ans de règne. La participation active de l’Eglise catholique aux cérémonies de funérailles s’explique par les relations aussi anciennes que solides entre celle-ci et la monarchie thaïlandaise. Si les contacts aux XVIème siècle et XVIIème siècle furent parfois troublés, les relations s’ancrèrent véritablement au XIXème siècle. L’amitié liant Mgr Pallegoix au roi Mongkut ou Rama IV (règne : 1851-1868) établit les bases d’un partenariat qui se poursuit depuis.

Si, depuis la Constitution de 1932, le roi doit être bouddhiste, il est aussi le « protecteur de toutes les religion », en vertu de l’article 7 de la Constitution de 2016. Le roi Bhumibol, qui avait passé durant son enfance un an à l’école Mater Dei de Bangkok dirigée par les religieuses ursuline, avait rencontré le pape Jean XXIII au Vatican en 1960 et le pape Jean-Paul II lorsque celui-ci est venu en visite officielle en Thaïlande en 1984. « En tant que protecteur de toutes les religions, Sa Majesté le Roi a montré son souci personnel pour la pratique libre des religions autres que le bouddhisme dans son pays », avait alors déclaré le pape Jean-Paul II.

(eda/ad)