Eglises d'Asie

Dissidents et « terroristes » ouïghours ciblés par une même répression au Xinjiang

Publié le 09/12/2014




La répression se poursuit dans la Région autonome du Xinjiang où la minorité turcophone et musulmane dénonce depuis des années la politique discriminatoire et la sinisation forcée de Pékin.Lundi 8 décembre, la CCTV, télévision d’Etat, a rapporté que huit terroristes ouïghours avaient été condamnés à mort pour leur rôle …

… dans les attentats commis le 30 avril devant une gare et le 22 mai dans une rue commerçante d’Urumqi, capitale de la Région, lesquels avaient fait une quarantaine de morts.

Sans donner d’autres indications que les noms de quatre d’entre eux, les médias officiels ont déclaré que les huit Ouïghours avaient été reconnus coupables par le tribunal d’Urumqi d’avoir « dirigé ou intégré un groupe terroriste », d’avoir « fait détoner des explosifs » et d’avoir « attenté à l’ordre public par des moyens dangereux ». Cinq autres accusés dont l’identité n’a pas été révélée, ont été durant ce même procès, condamnés à une peine de mort avec sursis (1) tandis que quatre autres ont écopé de prison ferme à perpétuité.

Le China Daily, média d’Etat, rapporte aujourd’hui que l’un des condamnés à la peine capitale, désigné comme le principal responsable de l’attentat du 30 avril, Ahmet Rexit, un Ouïghour de 24 ans, ne « serait même pas capable de lire le Coran ». Toujours d’après le journal chinois, Abliz Dawut et Nurahmat Ablipiz, organisateurs de l’attaque du 22 mai, se seraient formés avec Ahmet Rexit à partir de « vidéos d’entraînement » sous la direction d’Ismail Yusup, leader du groupe terroriste du Mouvement islamique du Turkestan oriental.

« Ils n’ont eu droit à aucun moyen de défense», a dénoncé Dilxat Raxit, porte-parole du Congrès mondial ouïghour, basé à Munich, « et dans ce type de procès monté de toutes pièces pour servir la politique de Pékin, aucun chance n’est laissée aux accusés de pouvoir faire advenir la vérité ». Dans un communiqué, l’organisation représentant la communauté ouïghoure en exil a également accusé les autorités en Chine « de ne pas vouloir s’attaquer au problème du Xinjinag à la racine et donc de prendre en compte sa responsabilité dans les troubles en région ouïghoure ».

Ce mardi 9 décembre, les médias d’Etat ont annoncé que sept « séparatistes » du Xinjiang avaient été condamnés à des peines d’emprisonnement allant de 3 à 8 ans. Bien que le procès de ces derniers se soit tenu le 25 novembre à Urumqi dans le plus grand secret, c’est le lendemain de l’annonce de la condamnation à la peine capitale des huit Ouïghours « terroristes », que les autorités ont décidé de révéler les peines infligées à ces dissidents, opérant ainsi un amalgame favorable à la politique « anti-ouïghoure » actuellement prônée par Pékin.

Si les médias officiels ne donnent pas d’autres détails concernant les sept condamnés, la communauté ouïghoure en exil a révélé quant à elle qu’il s’agissait d’étudiants du célèbre universitaire Ilham Tohti, lequel vient de voir sa peine d’emprisonnement à vie pour « activités séparatistes » confirmée en appel il y a quelques jours.

Parmi ces sept jeunes jugés fin novembre, six d’entre eux sont ouïghours, le septième étant membre de la minorité ethnique des Yi (2). Ces étudiants aidaient Ilham Tohti à tenir un site internet bilingue chinois-ouïghour destiné à encourager la communication entre les Hans et les Ouïghours. Les autorités les ont cependant accusés d’inciter par l’intermédiaire de celui-ci à la « haine raciale » et à « l’indépendance du Xinjiang ».

Devant faire face à la même accusation que celle portée à l’encontre de leur professeur, les étudiants ont été condamnés à des peines de peines allant de 3 à 8 ans de prison.

A l’annonce de la sentence, les Etats-Unis, comme ils l’avaient déjà fait en faveur d’Ilham Tohti, ont réclamé « la libération immédiate des étudiants de l’universitaire dissident », soulignant que ces derniers travaillaient pour la réconciliation interethnique et non pas avec la volonté quelconque d’appeler à « l’indépendance ou au séparatisme ».

Depuis les violences du printemps 2014, la répression chinoise s’est traduite par une vague de mesures discriminatoires comme celle interdisant la pratique du Ramadan à la population locale ouïghoure, mais aussi par plus de 50 condamnations à mort ou exécutions annoncées officiellement, des centaines d’interpellations, des condamnations de masse suivant des procès expéditifs et des exhibitions publiques de « terroristes ».

Ces différentes mesures répressives et le déploiement d’unités paramilitaires dans les « zones à risques » du Xinjiang n’ont pas empêché la région d’être la cible d’un nouvel attentat il y a neuf jours, dans le district de Shache.

(eda/msb)