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Moluques : l’accord de paix signé le 12 février dernier se concrétise mais les réfugiés chrétiens n’osent pas rentrer chez eux tant que les hommes du Laskar Jihad sont toujours présents

18 mars 2010
A Amboine, chef-lieu de la province des Moluques, la vie reprend peu à peu un cours normal et la ville n’est plus coupée en deux comme elle l’a été pendant presque trois ans. Les chrétiens ne craignent plus désormais de traverser les zones contrôlées par les musulmans et vice-versa. Afin d’enquêter sur les violations des droits de l’homme et pour assurer le respect de la loi, le gouverneur de la province a créé le 20 mars dernier une équipe d'”Administration de l’état d’urgence civil”, composée de civils et de membres des forces de sécurité, l’appareil judiciaire n’étant pas encore en mesure de fonctionner normalement. Le maire de la ville d’Amboine a annoncé que les services municipaux qui avaient été dédoublés, pour servir d’un côté les chrétiens, de l’autre les musulmans, allaient être réunifiés. Les fonctionnaires qui refuseraient cette évolution seront sanctionnés, a-t-il ajouté.


Moluques : malgré une situation encore très fragile, l’accord de paix signé le 12 février dernier entre les communautés chrétiennes et musulmanes semble entrer peu à peu dans les faits


Quinze jours après la signature à Malino, sur l’île de Célèbes, de l'”Accord des Moluques” ( Kesepakatan ), accord de paix en onze points (1), l’atmosphère générale semble avoir véritablement changé à Amboine et aux Moluques. Selon le Centre de crise du diocèse catholique d’Amboine, le 27 février, plusieurs milliers de jeunes hommes, chrétiens et musulmans, venus de la petite île de Haruku, ont parcouru les rues de la ville d’Amboine, passant à travers les zones chrétiennes et musulmanes de la ville et traversant les zones frontières qui séparent encore aujourd’hui les communautés. Ils entonnaient des chants de paix et d’unité tel le Satu Nusa Satu Bangsa et des policiers et des militaires se sont joints à eux. A la fin de leur périple, le gouverneur de la province, Saleh Latuconsina, a pris la parole devant eux pour déclarer : “Mulai sekarang Ambon itu aman” ( A partir d’aujourd’hui, les violences n’ont plus cours à Amboine’), invitant tous les Moluquois à prendre exemple sur les jeunes de Haruku. Toutefois, réalisant que ses propos pêchaient peut-être par excès d’optimisme, le gouverneur a ajouté que tous devaient en premier lieu déposer les armes et ne pas céder à d’éventuelles provocations.


Le Nouvel An chinois sera désormais un jour chômé dans tout le pays : un geste bien accueilli par la communauté sino-indonésienne mais insuffisant pour assurer une vraie égalité des droits


Le 17 février dernier, à l’occasion d’une célébration organisée dans un parc d’exposition de Djakarta pour marquer la fin des festivités du Nouvel An chinois, la présidente Megawati Sukarnoputri a créé la surprise en déclarant que désormais, à compter de 2003, Imlek, nom indonésien du Nouvel An chinois, sera une fête chômée dans tout le pays. Jusqu’alors, Imlek, fêté cette année le 12 février, n’était pas un jour férié bien que, dans les villes et les régions du pays où la population d’origine chinoise est importante, la plupart des écoles, des commerces et des bureaux étaient de fait fermés. “Je sais que c’est le souhait de beaucoup de voir le Nouvel An chinois devenir un jour férié. Au nom de la solidarité nationale, je décrète Imlek jour chômé dans le pays tout entier”, a déclaré la présidente qui a ajouté : “Pour nous, les différences, ainsi que le caractère pluriel de notre nation le montre, sont un fait. Qu’on l’apprécie ou non, c’est le visage de notre pays [.]. J’appelle tous les Indonésiens à accepter et à respecter ces différences.”


Aceh : la tentative d’implantation du Laskar Jihad dans la province ne semble pas rencontrer l’assentiment du GAM, mouvement séparatiste musulman


Le lundi 18 février dernier, le Laskar Jihad, groupe extrémiste de combattants musulmans originaire de Java, connu pour ses agissements contre les chrétiens aux Moluques et à Célèbes, avait annoncé une manifestation de masse à Banda Aceh, chef lieu de la province d’Aceh, au nord-ouest de Sumatra, où les forces armées gouvernementales livrent une guerre sans merci au GAM (Mouvement pour Aceh libre), actif depuis 25 ans dans cette province. A la grande mosquée de Baiturrahman, à Banda Aceh, le chef du Laskar Jihad, Jaffar Umar Thalib, n’a finalement pris la parole que devant un maigre auditoire d’une centaine de personnes, composé pour moitié de membres du Laskar Jihad, venus l’écouter parler sur le thème “Pourquoi les musulmans doivent se méfier des chrétiens et des juifs”. Les responsables de la mosquée, opposés à la venue de Jaffar Umar Thalib, n’étaient pas présents à ce moment-là et les hommes du Laskar Jihad avaient dû apporter leur propre matériel de sonorisation.


Célèbes : les responsables de l’Eglise catholique à Manado appellent prêtres et fidèles à ne pas s’engager dans les “milices chrétiennes” récemment formées dans la région


S’adressant à 70 prêtres venus de 44 paroisses catholiques des provinces de Célèbes-Nord, Gorontalo et Célèbes-Centre, le P. Yong Ohoitimur, président de la Commission pour le dialogue interreligieux du diocèse de Manado, a invité prêtres et laïcs de ces régions à abandonner une attitude d’esprit tournée en premier lieu vers la défense des intérêts particuliers de la communauté chrétienne. Faisant référence aux affrontements violents entre communautés chrétiennes et musulmanes dans la région de Poso, au centre de Célèbes (1), le prêtre a déclaré que “la coopération interreligieuse est essentielle”. Pour parvenir à cela, “les catholiques doivent se montrer ouverts et prêts à bâtir des relations fraternelles avec les croyants des autres religions”. Or, a ajouté ce responsable lors de cette réunion tenue à la fin du mois de janvier dernier, le développement “exponentiel” de “milices chrétiennes” dans la province à majorité chrétienne de Célèbes-Nord rend cet objectif improbable.


Florès : le chamanisme est étroitement lié aux conflits fonciers qui agitent l’île la plus catholique d’Indonésie


Le chamanisme est étroitement associé aux violents conflits fonciers qui agitent Flores, île à majorité catholique située dans l’est de l’archipel indonésien. C’est ce qui résulte d’une étude très poussée conduite par deux prêtres diocésains de l’île. “Les chamans sont systématiquement liés aux conflits qui agitent les villages concernant la terre. Les gens croient en effet que les chamans possèdent des pouvoirs magiques pour protéger les combattants rapportent les PP. Hubert Muda et Adam Satu. Les deux prêtres expliquent qu’un chaman utilisera des formules magiques et même la récitation du rosaire à l’occasion des rites qui précèdent le départ au combat des adversaires, rosaires et crucifix au cou. Au retour, ces derniers reviendront auprès du chaman et les blessés recevront de lui les premiers soins avant d’aller se faire soigner par le médecin de l’hôpital.


Moluques : à Amboine, des manifestations spontanées réunissent chrétiens et musulmans mais le gouverneur de la province met en garde contre tout excès d’optimisme


L’accord de paix entre les communautés chrétiennes et musulmanes signé à Malino le 12 février dernier (1) a été salué à Amboine, chef-lieu de la province des Moluques, par des manifestations spontanées réunissant chrétiens et musulmans. Quelques rares incidents, sans réelle gravité, ont été relevés ici ou là mais, selon les témoignages recueillis sur place, la tension entre les communautés semble avoir fait place à une atmosphère de détente et de joie. Toutefois, le gouverneur de la province, Saleh Latuconsina, a déclaré dans les colonnes du Jakarta Post daté du 12 mars que, si la plupart des groupes en présence avaient accepté l’accord en onze point dit de “Malino II” (2), un petit nombre d’organisations continuait à le rejeter et faisait campagne pour persuader les Moluquois de les soutenir dans leur cause.


Papouasie occidentale : les responsables religieux jugent profondément insatisfaisante la commission d’enquête mise sur pied pour élucider la mort du leader indépendantiste papou


Les responsables religieux de la province de la Papouasie occidentale, chrétiens et musulmans, ont envoyé le 2 février dernier une lettre commune à la présidente Megawati Sukarnoputri pour exprimer leur “profonde insatisfaction” au sujet de la Commission d’enquête mise sur pied par l’exécutif indonésien pour élucider la mort de Theys Eluay, figure de proue de la cause indépendantiste papoue, retrouvé mort le 11 novembre dernier après avoir été enlevé au retour d’un dîner passé dans une caserne des Kopassus, près de Jayapura (1). L’enquête sur la mort de Theys Eluay n’avance pas depuis plusieurs semaines, bien que la police sur place ait déclaré que des éléments des Kopassus, les forces spéciales de l’armée indonésienne, paraissaient être impliqués dans l’affaire (2).


Des chrétiens indonésiens ont accompagné leurs frères musulmans jusqu’à leur point de départ pour le pèlerinage à La Mecque


Les catholiques et les protestants, majoritaires dans la province de Nusa Tenggara Timur, située dans le partie orientale du pays, ont accompagné jusqu’à leur départ leurs frères musulmans en partance pour leur pèlerinage haj, à La Mecque. Les responsables des 14 districts catholiques et musulmans de la province s’étaient mis d’accord pour accompagner les pèlerins musulmans de leurs régions. En janvier dernier, le gouverneur, Piet Tallo, avait déjà accompagné 331 pèlerins jusqu’à l’aéroport El Tari de Kupang, capitale de la province. Johanes Berchmans Bali, responsable du bureau provincial du ministère des Affaires religieuses, a déclaré à cette occasion : “Je crois que les pèlerins à leur retour auront une bonne influence sur les gens d’ici. Je prie pour que Dieu les exauce, les comble de ses grâces et qu’ils concourent à l’harmonie de la vie de leurs compatriotes malgré les différences de religion ». Simon Masang, un catholique, membre du conseil pour les affaires religieuses du district de Flores a, de son côté, indiqué qu’il avait accompagné un groupe de pèlerins en partance pour La Mecque, de Larantuka jusqu’à Surabaya, à Java-Est : “Je n’ai pas seulement fait mon travail. J’ai la conviction d’avoir accompli quelque chose de religieux et, en tant que catholique, d’avoir fait un peu d’apostolat”.


Les catholiques javanais doivent rester enracinés dans leur culture, recommande un prêtre catholique, spécialiste de littérature javanaise ancienne


Un prêtre de l’Eglise catholique, spécialiste de la culture javanaise, estime que, pour des catholiques, être enraci-nés dans leur culture et leurs traditions n’est pas contraire à leur foi chrétienne (1). Etre catholique ne signifie pas renoncer aux coutumes traditionnelles puisque l’Eglise encourage ses fidèles à s’enraciner dans leur propre cultu-re, a déclaré le prêtre jésuite Ignatius Kuntara Wirjamantara. Le P. Wirjamantara, d’origine javanaise, s’adressait à une trentaine de personnes réunies en séminaire, le 3 janvier dernier, à Bantul, pour leur dire qu’il était naturel pour des catholiques javanais d’être totalement impliqués dans leur culture et leurs coutumes traditionnelles. “Les catholiques peuvent assister et participer aux rituels javanais traditionnels et même en devenir des leaders, sans pour autant sacrifier leur identité de catholiques”, a assuré ce professeur de littérature javanaise ancienne à son auditoire réuni au Centre culturel de Tembi. Répondant à la question de savoir pourquoi les catholiques devraient observer le rituel traditionnel javanais alors qu’ils possèdent déjà leur propre rituel catholique et croient en Jésus comme leur Sauveur, le prêtre a répondu : “En tant que Javanais, qu’ils soient croyants ou non, les catholiques comme ceux des autres religions ont à vivre au sein de leur propre culture et tradition”.